Le Polisario accuse Rabat de construire une «route goudronnée» dans la zone afin d'y maintenir une présence militaire permanente. Le Maroc et le Front Polisario ont violé l'accord de cessez-le-feu de 1991 au Sahara occidental en déployant des éléments armés dans une zone proche de la Mauritanie, selon un document confidentiel de l'Organisation des Nations unies (ONU). Selon ce document, daté du 28 août et transmis pour information au Conseil de sécurité, le Maroc a mené du 16 au 25 août une opération présentée comme anticontrebande dans la région de Guerguerat, au sud du Sahara occidental, au-delà du mur de défense, une barrière de sable érigée sur près de 2500 kilomètres. Cette opération marocaine «a été lancée sans avertir au préalable» la Mission des Nations unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental (Minurso), «contrairement aux exigences de l'accord militaire n°1 et avec le soutien du personnel de sécurité armé appartenant à la Gendarmerie royale marocaine». Une patrouille de la Minurso a «confirmé la présence d'une dizaine de membres de la Gendarmerie royale marocaine dans la zone», indique le document. En réponse, le Front Polisario a protesté auprès de l'ONU et a annoncé, dimanche, son intention de «prendre des mesures» en déployant lui aussi des forces. Le Polisario accuse Rabat de construire une «route goudronnée» dans la zone afin d'y maintenir une présence militaire permanente. La Minurso a ensuite constaté la présence «d'environ 32 membres militaires armés du Front Polisario» dans la région de Guerguerat, à l'intérieur d'une zone tampon qui jouxte la Mauritanie, «en violation» de l'accord de cessez-le-feu que la Minurso est chargée de superviser depuis 1991. La Minurso, relève le document, continue de suivre de près la situation, et l'ONU exhorte Rabat et le Polisario «à faire preuve de retenue» pour éviter une reprise des hostilités. «Le secrétaire général (Ban Ki-moon) souligne l'importance pour les deux parties de respecter leurs obligations», selon le document. Jeudi dernier, la Minurso a indiqué n'avoir pas constaté de mouvement militaire suspect au sud-ouest du Sahara occidental, en réponse à une protestation du Front Polisario. La Mission «a déployé les 16 et 17 août des moyens terrestres et aériens pour enquêter sur des accusations de violation dans la partie sud-ouest du Sahara occidental, près de la Mauritanie», a indiqué le porte-parole adjoint de l'ONU, Farhan Haq. La Minurso «n'a pas détecté de présence militaire ou d'équipement militaire» mais seulement des «véhicules civils passant par le mur» de défense. Elle a fait part des «résultats préliminaires de son enquête» au Front Polisario et va continuer à essayer «d'établir les faits», a ajouté le porte-parole. Inquiétudes Ban Ki-moon s'est dit, dimanche, «profondément préoccupé» par la situation tendue dans la zone tampon d'Alguergarat, au sud-ouest du Sahara occidental, appelant au retrait de tous les éléments armés afin d'empêcher toute nouvelle escalade. «Le secrétaire général appelle (...) à suspendre toute action qui modifie le statu quo et à retirer tous les éléments armés afin d'empêcher toute nouvelle escalade et permettre à la Mission des Nations unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental de tenir des discussions avec les deux parties sur la situation», a déclaré son porte-parole. Comme il a souligné l'«importance pour les deux parties de respecter leurs obligations conformément à l'accord militaire, ainsi que la nécessité de respecter l'esprit et la lettre de l'accord de cessez-le-feu», signé en septembre 1991 par le Front Polisario et le Maroc sous les auspices de l'ONU, en attente du parachèvement du processus de décolonisation au Sahara occidental par le biais d'un référendum d'autodétermination du peuple sahraoui. Samedi, le secrétariat national du Front Polisario a averti «des répercussions de cette approche agressive de l'Etat marocain et ses conséquences dévastatrices pour la paix, la sécurité et la stabilité dans la région». Et de poursuivre : «Les actions entreprises par l'Etat marocain reflètent l'intention délibérée et dangereuse pour imposer le fait accompli colonial, l'expansion de l'occupation, la provocation et à créer plus de tension, qui s'inscrit dans le cadre de la rébellion de Rabat contre la légitimité internationale, l'ONU, son secrétaire général, son représentant spécial et la Minurso, jusqu'aux compétences du Conseil de sécurité.» Aussi, il a souligné que «ce comportement dangereux marocain représente un défi flagrant à la légitimité internationale par une force d'occupation brutale qui ne tient pas compte de ses répercussions sur la paix et la stabilité dans la région».Le Maroc considère le Sahara occidental, ex-colonie espagnole annexée en 1975, comme faisant partie intégrante du royaume. Rabat propose comme solution une large autonomie sous sa souveraineté, alors que le Front Polisario réclame un référendum d'autodétermination.