Le soir du 21 mai 2003, la maison du petit Ouaïl s'est effondrée. Effrayée par le bruit et paniquée par la force de la secousse, toute la famille est sortie précipitamment. Sans Ouaïl. Ce petit garçon de deux ans dormait à l'intérieur. Des voisins finiront par sortir l'enfant in extremis. Pas de blessures physiques, plutôt des séquelles psychologiques. Finalement, Ouaïl n'est pas si mal loti, il est même un peu plus chanceux que ses autres petits voisins. Il ne vient presque plus ici. Sa mère le laisse chez la famille loin de ces décombres. Isolés du centre-ville et situés en plein cœur d'un immense champ, les habitants de Ouled Maâmar ont désormais l'appellation des « sinistrés du haouch ». De ces vieilles bâtisses coloniales, il ne reste plus rien. Les plafonds se sont effondrés à 80%, les murs sont lézardés de toute part. Ces petites maisons en brique n'auront pas résisté à l'état d'âme de la nature. Les ruines rappellent de petits morceaux de gruyère parsemés. A l'entrée de cet ancien domaine, une maison complètement détruite et inhabitée. A droite, une seule entrée pour plusieurs maisons. Une petite porte avec quelques débris de mur autour. Les résidents ne l'utilisent plus. Il suffit d'enjamber les débris pour entrer dans la cour. « C'est là, exactement, où nous avions planté l'une des tentes que les autorités nous ont distribuées après le séisme », explique une jeune femme. A présent, plus rien. La tente s'est déchirée. Elle sert de rideaux devant la cour. Elle remplace en quelque sorte un bout du mur. Les pièces de leurs anciennes bâtisses sont toutes dans le même état. Les couloirs tortueux et les chemins accidentés qui mènent vers les autres habitations font de la peine à voir. Ici, dans ce passage qui conduit à la cour intérieure, on marche comme sur des œufs et on ne prend pas appui sur les murs. Voilà la seconde tente ! Au centre du patio, celle qui a résisté aux intempéries et aux pluies hivernales. Une dizaine de lits y sont alignés. Une télé y est installée. C'est l'endroit préféré des enfants. Seulement, l'été, la chaleur y est insupportable, et beaucoup d'entre eux finissent par la déserter. Autre inconvénient : les odeurs. « Cela fait deux mois que nous n'avons plus d'eau ! », explique une mère de famille comme pour justifier l'amoncellement de linge sale dans la cour, près de la tente. Classé zone rouge et orange 5, l'endroit est dangereux. Réfugiés dans la cour intérieure, certains résidents se sont fait piéger. Ils vivent au milieu d'un mur... en papier de cigarette. Aujourd'hui, « les sinistrés du haouch » revendiquent les chalets qu'on leur a promis. « Nous ne demandons rien, juste des chalets, c'est tout ! », déclare un homme. « Moi, je voudrais qu'on m'explique une chose, s'emporte-t-il : pourquoi, nous ont-ils envoyé des experts ? Pourquoi nous ont-ils classés zone rouge ? Pourquoi nous ont-ils promis des chalets, si c'est pour nous oublier après ? » A l'APC de Haraoua, le président par intérim, M. Bakalem, dit qu'il ne les a pas oubliés. « La famille Bahri qui occupe en grande partie ce domaine a bénéficié de trois chalets », a-t-il affirmé. M. Bakalem explique que la commune de Haraoua a bénéficié d'un quota de 400 chalets dont 200 ont servi au relogement des sinistrés des autres localités. Le président de l'APC par intérim ne « dédramatise » pas néanmoins la situation de ces personnes. Selon notre interlocuteur, des sinistrés, dont les bâtisses furent classées dans la catégorie orange 5, vont bientôt rejoindre leur logement et pourront ainsi libérer un nombre de chalets. M. Bakalem espère pouvoir les reloger dans ces chalets, même si la décision finale, dit-il, ne lui revient pas. « Leur problème nous préoccupe », a-t-il dit, avant de conclure que « l'APC de Haraoua devra saisir le wali délégué au courant de cette semaine ».