Deux conférences ayant pour thème principal « L'apport de l'intellectuel algérien pour la révolution de Novembre » ont été animées, jeudi passé, au niveau de la bibliothèque communale de Souk Ahras par Khachab Djalel, chercheur et directeur de l'Institut des langues et lettres à l'université de Souk Ahras, et le docteur Aouadi Sadek de l'université de Annaba. Le cas Mustapha Kateb et son rôle prépondérant dans la dynamisation du théâtre populaire des années 1950, véritable plaidoyer pour la lutte contre l'oppression coloniale, a fait l'objet d'une approche historique de la part du premier conférencier qui a tenu à mettre en relief l'aspect révolutionnaire de ses œuvres artistiques qui lui valurent des démêlés avec la police française de l'époque. Né en 1920 à Souk Ahras, ce descendant de la tribu des Keblouti s'installa en 1934 à Alger où il découvrit le théâtre pour devenir plus tard l'une de ses illustres figures. Insérant ses textes dans un cadre éminemment nationaliste et engagé, Mustapha Kateb a joué un rôle important dans la prise de conscience des Algériens et leur sensibilisation pour le combat libérateur. Le langage adapté ou vécu des gens humbles qui composaient la majorité du peuple, la simplicité des idées et la richesse des symboles ont donné au théâtre de Mustapha Kateb toute sa splendeur et fait de ses pièces l'expression de tout un peuple. L'une des anecdotes rapportées par le docteur Khachab présente l'homme sous sa forme crue de révolutionnaire. Suite à l'interdiction par l'administration coloniale d'un spectacle où le principal antagoniste symbolisait par sa tenue bleu, blanc et rouge, un occupant voué à l'échec et contrairement à ce que tout le monde prédisait, Kateb alla annoncer aux intimes, l'air jovial : « Dieu merci, le message est passé. » Kateb Yacine, cet autre Keblouti, victime de torture lors des événements du 8 Mai 1945, s'inscrira depuis l'âge de 16 ans dans le cercle des écrivains engagés. La quête de l'identité et la dénonciation de l'oppression colonialiste étaient partie prenante des options de l'adolescent révolté contre l'occupant et ensuite, l'écrivain auteur de Nedjma, célébrissime œuvre qui a fait l'objet de plus de 400 thèses de recherche doctorales. Ce livre qui l'immortalisa est aussi l'histoire d'une Algérie qu'on tenta de dépersonnaliser. Par son appartenance à la culture rurale, Lakhdar, l'un des personnages du roman, est l'incarnation de la sagesse du terroir et l'ambassadeur des gens attachés à la terre avec leur bonté et leurs principes indéfectibles. Sa rencontre avec Mourad est en fait la symbolique de la cohésion qui exista entre « les gens du Djebel » ou les moudjahidine et une élite intellectuelle d'expression française que l'administration coloniale tenta vainement d'apprivoiser. Le docteur Aouadi et le professeur Khachab n'ont pas démérité les applaudissements du public venu se remémorer une page de notre histoire et redire l'effet Kateb sur la révolution algérienne.