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Algérie 2017, année de l'électricité solaire et de l'alerte inflationniste
La semaine éco d'El Kadi Ihsane
Publié dans El Watan le 02 - 01 - 2017

L'année qui débute est la première des trois années modélisées dans la trajectoire budgétaire du gouvernement. Elle est donc l'année de base qui va dessiner la trajectoire ou la faire dévier et donc faire collapser le modèle.
Premier souci, le solde des finances publiques de 2016 va faire problème. Plus ou moins les 13,1% prévisionnels de la loi de finances pour 2016 ? Ensuite arrivent les autres prévisions qui construisent le modèle. Un prix moyen du baril qui passe de 50 dollars en 2017 à 60 dollars en 2019, des importations qui descendent de 45,6 milliards de dollars à 42 milliards de dollars, et une croissance qui partira de 3,9% en 2017 pour atteindre 4,3% en 2019 après un ressac à 3,6% en 2018. Le tout faisant atterrir le déficit du solde budgétaire à 1,7% (moins 25% du PIB en 2015). De ce point de vue, 2017 est l'an I du redressement des comptes extérieurs. Il consolide la baisse des importations et enregistre le premier rebond des revenus des exportations en trois ans. Beaucoup de mouvements. Il existe plusieurs approches pour stresser la trajectoire budgétaire du Premier ministre Abdelmalek Sellal.
Les prévisions de prix moyen du pétrole sont certes modérément optimistes, mais sont, bien sûr, une première porte de fragilisation car elles misent, tout de même, sur une hausse de 27% du prix moyen sur trois ans. De même, la prévision de hausse des recettes ordinaires de la fiscalité a déjà été évoquée ici comme un biais dans le modèle. Elle est construite sur une série de mesures à vocation de restreindre l'assiette fiscale par contraction de l'activité domestique et des importations. Au début de 2017, l'attention se pose cette fois sur une autre catégorie de prévisions qui vont habiller nos trois prochaines années. La catégorie des prévisions qui ne bougent pas. Parité du dinar à 108 dinars pour un dollar sans à-coup jusqu'à 2019 et le taux d'inflation de 4% les prochaines années.
L'inflation d'abord. Si on ne devait s'en tenir qu'au seul emballement du dernier mois, elle détruit l'année de base du modèle 2017-2019 de la trajectoire budgétaire. L'inflation est déjà au-dessus de 6% à la fin de l'année 2016. Elle est dopée par les nouvelles taxes dès ce 1er janvier 2017. Elle devrait être alimentée par le financement monétaire du déficit budgétaire dès le second semestre de 2017.
La Banque d'Algérie a déjà octroyé pour plus de 600 milliards d'avances au Trésor. Elle a également rétabli le refinancement des banques primaires afin de ne pas étrangler leur trésorerie et par conséquent les crédits à l'économie. La variation des prix des produits frais, qui continuent de bénéficier d'une pondération haute dans le modèle des prix de l'ONS, est aléatoire, mais n'échappe pas à l'impact des coûts des intrants de l'agriculture. Tendance haussière. Les 4% d'inflation de la trajectoire budgétaire ne sont pas sérieux. Ils ressemblent à une concession politique frivole faite par le Premier ministre au président de la République pour lui signifier que son gouvernement va faire face à la baisse des revenus d'exportations sans toucher au niveau de vie des algériens. De peur de se voir rejeter son projet en Conseil des ministres, c'était l'été dernier, par un homme, Abdelaziz Bouteflika, tétanisé par la peur du débordement social. La parité du dinar ensuite. Elle peut être administrativement maintenue à ces 108 DA pour un dollar durant une longue partie de 2017.
Elle est déjà quasi stable depuis six mois. Mais c'est là aussi une construction qui est soufflée d'entrée. L'écart entre le cours du dinar au noir et son cours officiel s'est encore creusé ces deux derniers mois. Il a accompagné une courbe invisible. Celle de l'écart d'inflation entre la zone dinar et les zones euro-dollar. Cet écart continuera à se creuser en 2017. Et avec lui le gap entre les 108 DA pour un dollar à la banque et les 178 DA pour un dollar de Port Saïd. Le nouveau gouverneur de la Banque d'Algérie Mohamed Loukal, peut rester stoïque et continuer à obéir à la directive politique de ne plus dévaluer le dinar. Le différentiel entre dinar officiel et dinar parallèle promet de relancer la fraude à la surdéclaration dans les importations, l'accès à la devise officielle devenant définitivement la véritable rente économique en territoire de 4e mandat présidentiel.
En un mot, le maintien d'une parité du dinar inchangée durant les trois prochaines années n'est pas plus sérieux que celui du taux d'inflation à 4%. La poursuite de la baisse des réserves de change par effet mécanique devrait s'ajouter aux autres facteurs de dépréciation du dinar face aux principales devises mondiales. Il en reste donc quoi à la fin ? Une trajectoire budgétaire qui ne dit rien sur l'essentiel. C'est-à-dire qui ne dit rien sur l'arbitrage inévitable entre deux risques majeurs, la stagnation de l'activité et l'emballement de l'inflation. Cet arbitrage se régule dans les coupes budgétaires. Plus dans le budget des subventions ou plus dans le budget d'équipement. La première option débride l'inflation, la seconde réduit le plan de charge des entreprises. Le gouvernement Sellal a discrètement opté pour la seconde. Le risque de 2017 en devient que plus redoutable. Le ralentissement de l'activité et l'emballement des prix tout de même.
La conjoncture mondiale a desservi l'Algérie depuis 2014. Elle ne la resservira pas en 2017. Le raffermissement des prix du brut se fera au détriment de coupes de production qu'on a vite oublié d'intégrer dans les projections. 50 000 barils/jour pour l'Algérie. La demande d'énergie carbonée restera atone dans la zone OCDE et modérée chez les émergents, ralentis à leur tour depuis deux ans. L'Algérie va développer une nouvelle relation avec le monde, avec son retour au guichet des crédits internationaux. Les taux d'intérêt historiquement les plus bas ces trois dernières années ont entamé une remontée. La Fed, qui a augmenté son taux directeur de 0,25% le 14 décembre dernier, compte poursuivre ce réajustement stoppé en 2016 par une reprise jugée à bout de souffle.
L'argent ne sera plus gratuit à la fin de l'année 2017, la FED prévoyant des taux directeurs à 1,4% en 2017. Cela part de tellement bas que le coût de l'endettement extérieur pour l'Algérie va demeurer raisonnable. Elle en aura besoin pour financer différents projets de développement. Le plus emblématique ? Celui des 4 gigawatts d'électricité solaire pour lequel un appel d'offres va être lancé dès le début de l'année. Dans le capharnaüm des promesses en chiffres de 2017, le plus souvent irréalistes, le lancement du plus grand chantier d'énergie solaire du monde brille dans la grisaille d'un avenir différent. 2017, année du soleil ? Il vaut mieux l'aborder ainsi qu'année de l'inflation à 4%.


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