La crise que vit le Centre des inadaptés de Beaulieu (El Harrach), devenue publique depuis le 6 novembre à l'occasion de sa fermeture momentanée, est révélatrice d'un certain mode de gestion de l'Association d'aide aux inadaptés (AAI) créée en 1976 et qui prend en charge onze centres pour 600 personnes handicapées. Ce n'est pas par hasard si, depuis quelques mois, les échanges entre les responsables de l'association et la direction de l'établissement se font par courriers recommandés par l'intermédiaire des huissiers de justice et même des avocats. Les deux parties savaient qu'ils auraient à s'expliquer, un jour, sur le climat qui règne entre l'association et les centres de prise en charge des personnes handicapées. Il est cependant très difficile de comprendre le fond de la question. Les relations entre les deux parties se sont détériorées depuis le début de l'année. Aussi, en septembre dernier, elles se sont aggravées avec la rentrée scolaire. Suite à une demande d'audience, Mlle Hesbellaoui, directrice du centre de Beaulieu, a été reçue, le 5 septembre, par le président de l'AAI, M. Baba Ameur, pour entendre ses doléances. « Votre comportement irrespectueux et frisant l'insolence ne m'a pas permis de vous entendre ni de vous formuler mon avis », déclare le président de l'association dans un écrit adressé à la concernée. Un avertissement verbal est suivi d'une sanction à l'occasion de l'installation du conseil psycho-pédagogique, le 2 octobre dernier. Mlle Hesbellaoui aurait perturbé le « bon déroulement » de cette manifestation. Elle est convoquée pour le 18 octobre au siège de l'association et reçoit la notification de son licenciement 4 jours plus tard. Le 26 octobre, il y a eu l'installation d'une section syndicale affiliée à l'UGTA, dont la directrice est membre. Puis vint la fermeture du centre. Dans son recours, la concernée a demandé l'annulation de la décision de licenciement et sa réintégration dans son poste de travail. Plusieurs raisons ont motivé ce recours : motif de licenciement non spécifié dans la décision, dossier disciplinaire non remis à la concernée comme le stipule la loi et absence de réglement intérieur cité en référence dans la décision. Ce dernier existe, mais il n'est pas diffusé aux travailleurs de l'AAI comme le prévoit la loi 90-11 relative aux relations de travail, indique-t-elle. Mlle Hesbellaoui s'est engagée dans la section syndicale, parce qu'elle ne veut plus être payée 16 200 DA/mois après « vingt ans de service ». L'agitation au sein du centre a commencé bien avant. Une « tentative de soulèvement » du personnel du centre contre la directrice a été organisée, le 29 mai dernier, alors que la concernée est absente pour cause de décès d'un de ses proches. Dans la foulée, aucune fiche de paie n'a été remise, depuis juin, aux travailleurs. « Il se trouve que de nouvelles recrues touchent plus que les anciens », assure Mlle Hesbellaoui. De plus, l'association, qui exige des cotisations annuelles à hauteur de 2400 DA par élève, ramasse l'argent avec de simples bons qui ne comportent ni identification, ni griffe, ni cachet et encore moins une signature... « La directrice paie son engagement au côté des parents d'élèves », indiquent plusieurs d'entre eux. Les parents sont allés jusqu'à demander des comptes aux responsables de l'association. Dans un courrier adressé, le 28 septembre dernier, au président de l'AAI, ils ont exprimé les préoccupations suivantes : l'amélioration de la qualité et de la quantité de la nourriture, parer le manque en personnel éducatif spécialisé, absence de moyens d'évacuation en cas d'urgence, le transport et le rétablissement d'un « climat serein » au centre. Les parents ont exprimé aussi la nécessité de les associer (au moins deux représentants) à l'activité du centre pour une meilleure prise en charge de la réinsertion sociale des jeunes, l'organisation de réunions trimestrielles avec les parents, l'évaluation des acquis et leur participation aux assemblées générales. Ils demandent également la décentralisation des actes courants de gestion, la transparence et le professionnalisme ! « Les parents se déclarent disposés à collaborer et à apporter modestement toutes aides matérielles et financières pour améliorer les conditions de séjour de nos enfants », ajoutent-ils. Des propositions sont restées sans suite. Le président de l'AAI et la directrice générale des centres gérés par l'association n'ont pas souhaité faire de déclarations.