Quatre-vingt-six jeunes handicapés entre trisomiques, autistes et attardés mentaux sont dans la rue depuis le 6 novembre, suite à la décision de fermeture du Centre pour adultes inadaptés de Beaulieu (El- Harrach). Une énième injustice décriée par les parents qui se sont réunis pour dénoncer l'arbitraire du président de l'association d'aide aux inadaptés (AAI). 9h tapantes, Khadidja et Lamia sont déjà devant le portail. Tout comme leurs 84 autres camarades. Accompagnées de leurs parents, elles attendent patiemment de rejoindre leur classe. Une attente qui durera toute la matinée. La décision de fermer le centre, prise il y a plus d'une semaine par le président de l'association d'aide aux inadaptés, est déjà mise en application. “On ne comprend pas pourquoi c'est à nos enfants de faire les frais du dysfonctionnement du centre et du règlement de comptes au sein de l'association”, s'indigne une maman. Dans un avis signé par M. Baba Ameur, président de l'association d'aide aux inadaptés, il est clairement signifié que le centre de Beaulieu ferme ses portes “à compter du 6 novembre 2006, jusqu'à nouvel ordre”. Aucun motif n'est avancé pour cette fermeture décidée de façon unilatérale et sans aucun motif. “Nous ne comprenons pas comment une telle décision falut être prise sans aucune raison de sécurité, de santé ou même financière. Quand nous avons essayé de comprendre pourquoi nos enfants sont jetés à la rue comme des malpropres, il nous a été clairement signifié que c'est parce que c'est nous qui avons cherché ça”, poursuit un autre parent qui ne manquera pas de souligner que le seul problème que les parents ont essayé de soulever c'est de demander l'amélioration des conditions d'accueil de leurs enfants au sein du centre. Nourriture, insuffisance du personnel psychopédagogique, manque de personnel éducatif spécialisé, absence de moyens d'évacuation en cas d'urgence, inexistence de transport sont autant de points soulevés par les parents. Suite à la fermeture du centre, ces derniers sont montés au créneau pour revendiquer la réouverture immédiate de l'établissement et la tenue d'une AG avant la fin du mois. Les signataires dénoncent également “la situation précaire commune aux 11 centres gérés par l'association qui, de toute évidence, veut maintenir une gestion opaque, anarchique et sans transparence ni professionnalisme”. À l'origine de cette situation inhumaine, un différend administratif avec l'ancienne directrice, licenciée le 22 octobre dernier. Cette dernière dénonce, pour sa part, “les pratiques malsaines des responsables de l'association”. “Les problèmes ont commencé lorsque nous avons constitué une section syndicale. Et puis, il y avait ces problèmes de ravitaillement où à la fin de semaine, les jeunes n'avaient droit ni aux fruits, ni au laitage. L'intendant s'est permis une fois d'envoyer une pastèque pour 86 personnes”, souligne l'ancienne directrice du centre. Si la fermeture du centre n'est pas très bien accueillie au ministère de la solidarité, les parents attendent une réelle prise en charge des problèmes de leurs enfants, qui se retrouvent du jour au lendemain dans la rue, sans aucune prise en considération pour leur drame. “Il faut savoir que sur les 258 centres spécialisés à travers le territoire national, 119 sont gérés par le mouvement associatif, et il se trouve que le centre de Beaulieu fait partie de ces centres. Nous avons été destinataires d'une lettre de l'association d'aide aux inadaptés, où le président explique que le centre est fermé le temps que les problèmes avec l'ancienne directrice soient réglés. Mais il est inadmissible que le centre soit fermé comme ça sans qu'il y ait problème grave et sans l'aval du ministère. À cet effet, le ministère a ouvert une enquête juste après avoir reçu la lettre concernant la fermeture du centre”, dira M. Benachenhou, chargé de la communication auprès du département d'Ould Abbès. En attendant que la situation administrative du centre soit tirée au clair et que le conflit directrice/président de AAI trouve solution, Khadidja, Lamia et les autres attendent de regagner le centre, qu'ils ont l'habitude de fréquenter depuis des années. Le seul endroit où ils se retrouvent, l'espace d'une journée, pour s'adonner à l'apprentissage de quelques travaux manuels. “J'aime bien venir à l'école, j'apprends beaucoup de choses. Pourquoi, il faut revenir demain?” Poignant. Demande Khadidja. Wahiba L.