L'érudit Mohammed Ben Omar El Houari, appelé Sidi El Houari, est le saint patron de la ville d'Oran, et, sans doute, son symbole identitaire et son repère historique le plus fort. C'est ce qui a été souligné, lundi et mardi, par les intervenants, à la faculté des sciences sociales et islamiques, lors d'un colloque national qui lui a été consacré. En effet, les participants à ces deux journées d'étude ont affirmé que l'héritage du saint patron d'El Bahia a résisté au temps et à l'acculturation à travers la reconnaissance de ses réalisations en faveur de la population qui lui rend hommage, en donnant son nom, «Houari» à ses enfants. Organisé par le laboratoire des manuscrits de la civilisation islamique en Afrique du Nord de l'université d'Oran 1, en partenariat avec l'Association des zaouïas et de la culture mystique, ce colloque a mis l'accent sur la spécificité de Sidi El Houari en tant qu'érudit qui a su adopter la posture scientifique dans la jurisprudence, tout en choisissant la voix de l'ascétisme et du mysticisme, à une époque où la division régnait entre les deux approches, tant sur le plan méthodologique que sur le fond et la finalité. C'est ce qui a été souligné par Pr. Mohamed Benamar de l'université d'Oran 1, qui rappelle que l'imam El Houari «n'a pas pris parti dans les confrontations entre les défenseurs de la charia et ceux de la science de la vérité, le soufisme». Il a choisi d'être les deux et de lier les deux voix au nom de l'intérêt des gens. En outre, plusieurs interventions ont évoqué la vie de Sidi El Houari, natif de Sour, à Mostaganem, en 1350, et descendant de la grande tribu amazighe des Maghraouas, et qui n'a cessé de voyager de Tlemcen jusqu'au Moyen-Orient, à la rencontre de savants et érudits, en passant par La Mecque, où il entreprit son pèlerinage avant de revenir à Oran. En plus de son œuvre scientifique et mystique, les intervenants ont souligné son rôle politique dans la résolution des conflits, l'unification des populations et la gestion des affaires de la société. Mais, la plus grande part des débats a été consacrée à sa relation avec la ville d'Oran, dont les enfants portent le nom, filles et garçons, et qui lui réservent un cénotaphe au mausolée de Tijinni Boulahbal, dans le quartier de Sidi El Houari, reconstruit par le bey ottoman dit «Le borgne» en 1793. D'autres villes du pays, comme Hassi El Ghalla, à Aïn Temouchent, ainsi qu'à Adrar, rendent hommage au saint homme en lui consacrant des cénotaphes et mausolées. D'ailleurs, c'est à Adrar et à Timimoune que l'on trouve les rares écrits sur Sidi El Houari, en plus de ses propres œuvres sur la vérité et le mysticisme. Dans ce sens, l'ancien maire d'Oran, maître chercheur au Crasc, Benkada Sadek, est intervenu sur l'histoire d'Oran pour démontrer qu'elle est étroitement liée au vieux centre-ville, Sidi El Houari, qui porte le nom et la tombe de l'érudit-mystique d'El Bahia. Ce même quartier a connu le passage de plusieurs civilisations, mais la persistance et l'enracinement du saint patron dans les esprits et la tradition démontrent son rôle dans la construction de l'identité maghrébine, en somme, ainsi que sa place dans l'imaginaire partagé par tous les Algériens.