Face à l'incertitude du lendemain due aux disparités économiques entre les pays membres et les politiques sécuritaires unilatérales qui érigent des murs contre l'immigration, les 27 Etats ont renouvelé, solennellement, leur «Union» dans la capitale italienne. Le président italien, Sergio Mattarella, a invité à affronter les réformes avec «courage», citant l'exemple des pères fondateurs de l'Union européenne, qui nourrissaient un optimisme illimité pour un avenir florissant de leurs peuples. Le président du Conseil italien, Paolo Gentilonia, a qualifié la journée de samedi de «grande démonstration d'unité et une réponse au Brexit». Les autorités italiennes, qui ont organisé la célébration du 60e anniversaire de la signature du Traité de Rome, dans une ville blindée par des mesures de sécurité exceptionnelles par crainte d'actions démonstratives des mouvements contestataires de la politique européenne, ont dressé un bilan positif de ce rendez-vous, qui s'est tenu dans une conjoncture historique particulière : la sortie de la Grande-Bretagne de l'Union européenne et l'arrivée au pouvoir aux Etats-Unis d'un président défenseur du protectionnisme commercial américain à outrance. Préoccupés par leur sécurité, extérieure et intérieure, et faisant face aux défis de garantir à leurs citoyens une protection sociale équitable, les leaders des 27 pays de l'UE n'ignorent pas que les prochaines élections européennes prévues en 2018 et les votes, auparavant, en Allemagne et en France, ne manqueront pas d'être instrumentalisés par les mouvements extrémistes populistes de l'extrême droite. Les chefs d'Etat et les dirigeants des institutions européennes ont tenté de booster le moral du groupe, en appelant à unir les efforts pour une stratégie commune. Le président du Conseil européen, Donald Tusk, a invité à œuvrer pour «l'union des principes communs, l'union de la souveraineté externe et l'union de l'unité politique». Pour sa part, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a exhorté à rester unis «pour affronter les défis qui nous attendent». Car les six Etats qui avaient signé le traité fondateur de l'Union européenne le 25 mars 1957, à Rome, étaient loin de se douter que l'an 2000 apporterait de grandes préoccupations aux peuples du Vieux Continent. Le manque de travail, une croissance à un niveau minimum, la montée de la xénophobie faisant des immigrés des boucs émissaires, la sécurité interne fragilisée par des attentats terroristes ont fait émerger une forte contestation des choix politiques et économiques que les stratèges de l'Union européenne ont appliqués jusque-là. Et après le divorce de la Grande- Bretagne de cette Union, les autres membres regardent avec suspicion vers des pays, comme la Grèce et la Pologne, craignant de nouveaux départs. Les mois passés ont montré la grande faille qui sépare ces Etats membres, notamment face au drame des réfugiés syriens. L'attitude ferme et répressive que des gouvernements de pays de l'Est (Bulgarie, Hongrie, Serbie) ont adoptée face aux civils syriens fuyant les bombardements russes et du régime d'Al Assad, a montré les limites des déclarations d'intention des responsables appelant à partager l'effort pour faire face aux situations d'urgence. Sans défense commune, sans politique migratoire et d'asile unifiée et avec une économie à plusieurs vitesses, l'Union européenne n'aura pas les moyens de résister au protectionnisme américain et à la globalisation. Ce qui rend encore plus significative la déclaration du pape François, qui a reçu, au Vatican, les chefs d'Etat. «Les populismes fleurissent justement sur l'égoïsme qui enferme dans un cercle étroit et suffoquant», a affirmé le souverain pontife, appelant à plus de «solidarité avec ceux qui souffrent».