Le Royaume-Uni a donc répudié l'Union européenne! Un départ ressenti, vendredi, comme un cataclysme par les Européens qui sans doute, malgré la détermination des Britanniques à couper les liens avec l'UE, n'y croyaient pas trop. De fait, la victoire du «leave» est plutôt tirée par les cheveux [51,89% ont voté pour la sortie], loin d'un succès franc, massif et sans ambiguïté. Le «remain» (rester) a réuni 48,11% des voix. Plus clairement, l'Ecosse et l'Irlande du Nord ont voté «in» alors que l'Angleterre et le Pays de Galles ont voté «out», dessinant une fracture entre le Nord pro-UE et le Sud eurosceptique du Royaume-Uni. Notons que 60% des Londoniens ont voté pour le maintien dans l'UE. Une certitude toutefois, les lendemains de Brexit seront très durs pour les Britanniques avec de fâcheux effets en perspective. Ainsi, au plan intérieur, avec la rupture entre le Nord et le Sud, la Grande-Bretagne plonge dans l'inconnu avec la mise en équation du futur du royaume. Nombreux ont été les analystes qui se posaient vendredi la question de savoir si l'Union européenne survivra à la sortie de la Grande-Bretagne. In fine, n'est-ce pas plutôt la survie du Royaume- Uni qui est mise à l'encan? Il est patent que la sortie de la Grande-Bretagne de l'UE a créé un précédent inédit et pose maints questionnements - c'est le premier membre de l'UE qui quitte le navire depuis sa fondation en 1957 - à l'Union européenne et à la Grande-Bretagne, tant les Européens que les dirigeants britanniques ne s'attendaient sans doute pas à ce que les peuples britanniques franchissent le Rubicon. D'où le sentiment d'apocalypse ressentie vendredi, singulièrement par les dirigeants de l'UE. Ainsi, à la question de savoir si le Royaume -Uni pouvait adhérer à nouveau à l'UE, le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, énervé par le Brexit, s'exclama agacé: «Out is out» [Sortir c'est sortir]. Dans cette embrouille personne n'est sûr de pouvoir tirer son épingle du jeu, singulièrement les Anglais qui ont été les plus déterminés à sortir de l'Union. De fait, le Brexit a redessiné la carte géopolitique britannique. En effet, l'Ecosse [62%] et l'Irlande du Nord [56%] ont nettement voté pour le maintien dans l'UE. De fait, les Ecossais réfléchissent déjà à un second référendum demandant leur indépendance, alors que les Nord-Irlandais se demandaient s'il ne serait pas avantageux pour eux de rejoindre l'Eire (la République d'Irlande). Le Premier ministre David Cameron (qui annonça sa démission dans le sillage du résultat du vote), trop confiant dans la victoire du «in», a ouvert la boîte de Pandore, mettant son pays en porte-à-faux. Il est patent que Cameron a considéré le référendum comme un exercice de style permettant aux peuples britanniques de se «défouler» alors que lui y gagnerait un «blanc-seing» qui lui donnerait de conduire le royaume à sa guise. Il y aura tout perdu tout en laissant à ses successeurs une bombe à retardement. De fait, tétanisés par un résultat auquel ils ne s'attendaient certainement pas, les Britanniques étaient groggy vendredi matin, que le grand quotidien londonien The Gardian résumait en titrant sobrement «We're out» [Nous sommes sortis]. Ils sont sortis, sans réellement savoir où ils vont atterrir où aller. En fait, c'est le branle-bas dans l'Union européenne, et chacun de ses membres suppute des retombées qui ne peuvent qu'être négatives du Brexit sur l'Europe des 27 (28-1?). Déjà confrontée à des crises complexes: chômage, économie morose, migrations et réfugiés [l'une des raisons du départ des Britanniques], menaces terroristes, l'UE se trouve face à un défi existentiel. Des voix se font déjà entendre qui exigent une restructuration de l'UE et sa redynamisation. Ce qui sera difficile, d'autant plus que les extrêmes droites européennes, à l'instar des Française et des Néerlandaise, sollicitent de leurs gouvernements des référendums pour sortir de l'UE. Ce qui fit réagir le président du Conseil européen, le Polonais, Donald Tusk qui déclara: «Il s'agit d'un moment historique, mais assurément ce n'est pas un moment pour des réactions hystériques.» Or, l'hystérie n'était pas loin de gagner les rangs des dirigeants européens qui réagissaient émotionnellement à un évènement politique qui, par son ampleur, remet en question les bases mêmes sur lesquelles l'Union européenne a été bâtie. Des failles apparaissent ainsi au grand jour. L'UE n'est ni une fédération sur le modèle de la Russie, ni une Union d'Etats, comme l'Amérique du Nord [Etats-Unis]. De fait, l'UE, c'est autre chose, un patchwork, une Europe à la carte, une sorte «d'auberge espagnole» où chacun est sûr de trouver ce qu'il a amené. La Grande-Bretagne en a administré la preuve, laissant l'Union européenne face à une équation de prime abord insoluble.