Plusieurs milliers de Sud-Africains sont descendus hier dans les rues des principales villes du pays pour réclamer le départ du président Jacob Zuma, empêtré dans des scandales de corruption. Environ 10 000 partisans de l'Alliance démocratique (DA), le principal parti d'opposition, se sont réunis dans le centre-ville de Johannesburg, emmenés par leur leader Mmusi Maimane. Fait rare en Afrique du Sud, quelques centaines d'habitants — principalement Blancs — vivant dans les quartiers les plus huppés du nord de Johannesburg ont également manifesté aux carrefours des principales artères de la capitale économique sud-africaine en brandissant des panneaux «Zuma doit partir». A Pretoria, le parti communiste sud-africain, pourtant allié historique du Congrès national africain (ANC, au pouvoir), a organisé une marche vers le palais présidentiel, rejoint par des organisations de la société civile, toujours pour demander le départ de M. Zuma. Des partisans du président, ainsi que des dizaines de vétérans de l'ANC, se sont quant à eux rassemblés autour du siège du parti à Johannesburg. A la mi-journée, ces manifestations se déroulaient dans le calme. La popularité du président sud-africain est en berne depuis plusieurs mois en raison de nombreux scandales de corruption dans lesquels le nom de M. Zuma revient. Il est notamment accusé de favoriser les intérêts d'une sulfureuse famille d'hommes d'affaires, les Gupta. La semaine dernière, le président sud-africain a nommé dix ministres et autant de vice-ministres, la plupart considérés comme ses proches. Pravin Gordhan, ministre des Finances connu pour sa probité et pour sa lutte contre la corruption, a fait les frais de ce remaniement d'ampleur, remplacé à son poste par Malusi Gigaba, un fidèle de Jacob Zuma. «Nous courons le risque en Afrique du Sud que les personnes honnêtes ne veuillent plus s'impliquer dans les institutions. Et quand la société a atteint ce point, alors c'est qu'on a livré l'Etat à une poignée de gangsters», a déclaré M. Gordhan jeudi dans une attaque à peine voilée contre M. Zuma. Si l'opposition est vent debout contre Jacob Zuma, ce remaniement a aussi causé des remous au sein même de l'ANC. Plusieurs cadres se sont élevés contre ce coup de force du président avant de finalement rentrer dans le rang, quand le parti a réaffirmé mercredi son soutien au chef de l'Etat. Jacob Zuma devra néanmoins affronter devant le Parlement un vote de défiance demandé par l'opposition, le 18 avril. L'ANC a d'ores et déjà donné la consigne à ses députés de voter contre et le président devrait donc profiter de sa large majorité (249 sur 400 députés) pour éviter la destitution. Pour l'heure, le calendrier du parti reste donc inchangé : il se choisira un nouveau chef de file à la place de Jacob Zuma en décembre. Le vainqueur sera le candidat du parti pour les élections générales de 2019 qui désigneront un nouveau président. Deux factions s'opposent au sein du parti : les pro-Zuma soutiennent son ex-épouse Nkosazana Dlamini-Zuma, tandis que les frondeurs sont rangés derrière l'actuel vice-président Cyril Ramaphosa.