Voilà plus d'une année que le bureau d'études français Simecsol a rendu les conclusions de son enquête, commandée par le président de la République, sur le phénomène complexe des glissements de terrain, qui affecte pas moins de 120 ha abritant quelque 15 000 logements à Constantine. Plus de trois années d'études et une dépense initiale de 106,6 millions de dinars puisée dans les fonds publics, et malgré cela, aucun impact n'est aujourd'hui ressenti dans la capitale de l'Est, que ce soit dans les pratiques architecturales ou dans la réglementation en vigueur. Le rapport n'a jamais été rendu public mais, ce qui est sûr, c'est que Boussouf, quartier où l'immobilier a atteint des prix prohibitifs et abritant une population importante, figure parmi les sites classés inconstructibles et marqués désormais par la couleur rouge. A contresens, le commun des citoyens peut constater que les chantiers de construction n'ont pas cessé leurs travaux depuis. Il est loisible de remarquer surtout l'érection d'immeubles dans le terrain le plus fragile situé dans le lit de la chaâba. Des cités appartenant à des coopératives de travailleurs y ont vu le jour récemment, et ce qui est d'autant plus étonnant, c'est de voir figurer parmi les noms de ces coopératives, ceux d'entreprises de construction et surtout celui du CTC. Ce dernier n'a-t-il pas vu ce rapport ou alors, plus grave, n'est-il pas d'avis sur ses conclusions et juge ses propres études plus détaillées en partant du principe que tout terrain est constructible ? En somme, 320 logements sont prévus dans les programmes initiaux des huit coopératives. Ceci dit, ces chantiers dont les permis de construire datent du début des années 1990, soit une décade avant le travail de Simecsol, n'ont pas tous démarré les travaux et certains ont même vendu leurs terrains à d'autres coopératives qui voulaient bénéficier de la formule LSP et construire pour leurs souscripteurs. Ces nouveaux acquéreurs doivent être malheureux puisque la DUC leur a refusé l'autorisation de construire. Cependant, quelques-unes de ces coopératives ont entamé leur chantier bien avant, et aujourd'hui leur situation se trouve en porte-à-faux avec le rapport de classement. C'est-à-dire qu'elles continuent à construire sur un terrain classé inconstructible. Quelques familles ont même habité leurs logements, exposant leur vie à de sérieux risques si l'on considère la chose du point de vue du rapport Simecsol et des avis des services de la DUC et ceux de l'APC. Un véritable imbroglio. Quelle solution ? Cette situation semble indisposer les autorités locales et créer, en tout cas, la gêne chez leurs services dès que nous posons la question. En fait, plusieurs interrogations sont apparues mais là où nous avons frappé, les réactions ont été à chaque fois timides quand elles ne sont pas fuyantes. Au niveau de la DUC, nous avons demandé au chef de service de l'urbanisme, M. Bouderbala, si la direction avait engagé des démarches pour arrêter ces constructions depuis que les conclusions du rapport sont connues. Il nous a répondu qu'effectivement ses services avaient réalisé un recensement de ces cas durant la période août-septembre 2005. Il nous dira aussi que « ce problème requiert une solution politique globale qui doit prendre en considération le dédommagement des familles à déloger, ce qui n'est pas une mince affaire » et que « la responsabilité de démolition de ces constructions relève du président de l'APC ». A cela, l'adjoint au maire chargé de l'urbanisme, M. Benlebdjaoui rétorquera en précisant que la responsabilité revient à l'ensemble des autorités, notamment le ministère, et rappellera que le sujet devait récemment être traité durant la réunion de l'exécutif de wilaya. Nous n'avons pas pu avoir davantage de précision de la part de ces deux responsables, mais au moins nous savons qu'ils sont d'accord sur la nécessité de démolir. Une option que rejette Amar Chanti, chef de l'agence locale du CTC, qui reconnaît ne pas souscrire à l'ensemble des conclusions du rapport en insistant sur l'existence d'autres solutions que la démolition. Il nous citera la possibilité de stabiliser le sol mais là aussi notre interlocuteur manquera de précision, révélant l'absence d'une réponse, dûment élaborée, aux thèses de Simecsol. Dans ce cafouillage qui prolonge les risques d'avant le séisme de Boumerdès, beaucoup se demandent ce qu'a fait le département de Hamimid du travail de Simecsol et quel est l'impact de cette étude sur notre réglementation. Et puis, si ce rapport est validé, ne devrait-il pas être institutionnalisé pour bénéficier de la force de la loi et devenir un règlement applicable pour/par les autorités locales ? Entre-temps, les promoteurs, eux, profitent du vide et choisissent le règlement qui convient à leurs affaires.