L'Union nationale des barreaux d'Algérie et l'Union des avocats d'Alger et ses circonscriptions limitrophes, notamment celle de Boumerdès, ont observé une halte historique à l'occasion du 60e anniversaire de l'assassinat, voire l'exécution sommaire par les parachutistes français sous l'ordre du général Paul Aussaresses, de Ali Boumendjel. C'était le 23 mars 1957. Il l'avait jeté depuis une terrasse d'un immeuble de six étages – lieu de détention et centre de torture – situé au 92, rue Clemenceau, actuellement baptisée rue Ali Khodja, à El Biar. Avant ce crime, Ali Boumendjel avait été affreusement torturé. Depuis, cette date du 23 mars, celle de la célébration de la Journée nationale de l'avocat a été institutionnalisée. C'est devant un aréopage constitué des membres de la famille d'Ali Boumendjel et de son frère Ahmed Boumendjel, cadres de l'Etat, de moudjahidine, des secrétaires généraux des ministères de la Justice et des Moudjahidine, que l'on a évoqué la mémoire de ce martyr de la Révolution algérienne de novembre 1954. Ali, Ahmed, Abane, Youcef et Sâad frères d'armes Après la récitation d'un verset coranique et la diffusion de l'hymne national, le bâtonnier d'Alger, Abdelmadjid Sellini déclarera : «Nous célébrons tous les ans Ali Boumendjel. Comme tous ceux qui sont morts pour l'Indépendance de l'Algérie. Nous célébrons ce héros, ce symbole, ce chahid, cet avocat. Nous faisons et prêtons serment à son sacrifice qui n'est pas vain…». L'éveil nationaliste et militant d'Ali Boumendjel, il lui sera transmis par son frère aîné, Ahmed Boumendjel alors membre du PPA (Parti du peuple algérien) puis au sein de l'UDMA (Union démocratique du manifeste algérien). Ali Boumendjel, œuvrait pour l'Indépendance, dix ans avant le déclenchement de la Révolution de novembre 1954. Les massacres du 8 mai 1945 commis contre la population pacifique de Sétif, Guelma et Kherrata renforcera son aversion pour le colonialisme… Au lycée Duveyrier, à Blida, il côtoiera des camarades de classe, de grands noms de la révolution algérienne : Abane Ramdane, Youcef Benkhedda, Saâd Dahlab, Lamine Debaghine ou encore Jean Daniel. Ali Boumendjel réussira à fédérer des membres du Parti communiste (algérien) et ceux de l'UDMA pour grossir les rangs du FLN. Le général de l'armée française, Paul Aussaresses, avouera son crime dans ses mémoires en 2000. L'exécution d'Ali Boumendjel, Larbi Ben M'hidi et Maurice Audin : «Je me suis rendu directement à El Biar, boulevard Clemenceau où Boumendjel (Ali, ndlr) était détenu. La cellule de Boumendjel était au rez de chaussée. Je suis passé au bureau du lieutenant qui me sembla étonné de me voir. Je venais d'assister à une longue réunion avec le général Massu…Il ne faut plus laisser Boumendjel, ici, dans ce bâtiment. Il faut le transférer discrètement dans l'immeuble voisin par la passerelle du 6e étage. J'attends en bas. Un moment après ce lieutenant était revenu essoufflé pour m'annoncer qu'Ali Boumendjel était ‘‘tombé''. Avant de précipiter Ali Boumendjel dans le vide depuis le 6e étage, on lui avait asséné un coup de manche de pioche sur la nuque.» Le cynisme d'un criminel de guerre. Le général Paul Aussaresses sera condamné, en 2002, pour apologie «belliqueuse» et non pas pour crime de guerre. Emouvante Fadhila Chitour-Boumendjel Fadhila Chitour-Boumendjel, films d'Ahmed Boumendjel se souviendra non sans émotions : «Mon oncle Ali Boumendjel n'avait que 38 ans quand il a été assassiné. Un très jeune homme. Sur les photos, il paraît austère. Dans la vie de tous les jours, il était un homme d'une grande gentillesse. Souriant, amoureux des belles lettres, du latin, de la musique, de la peinture. C'est lui qui nous a inculqué et appris l'amour de l'art. C'était un homme simple, modeste et persuadé par sa cause, son combat. J'ai une pensée pour mes grands-parents. Ali Boumendjel a été jeté du 6e étage. Côté cour, donnant sur une montagne. Celle du maquis de la Révolution, la liberté, l'Indépendance,…». Son oncle, ce héros ! A l'issue de cette commémoration, des distinctions honorifiques ont été remises aux familles d'Ali Boumendjel et Ahmed Boumendjel, Ali Haroun, avocat et ancien membre de la direction de la Fédération de France, le Moudjahid Ghaouti Benmelha, Hadj Hamou ou encore le défunt Tebkha. Un ouvrage portant sur Ali Boumendjel sera publié bientôt aux éditions Barzakh et une fresque murale lui sera dédiée dans la commune d'El Biar, à Alger.