La région de Tataouine, à la frontière libyenne, est au bord de l'insurrection. Des barrages de manifestants empêchent les camions de pétrole de remonter vers les ports. Le chef du gouvernement, Youssef Chahed, hésite à aller sur place, faute de propositions de solution, à la mesure des attentes d'une population désabusée, six ans après la révolution du Jasmin. Le taux de chômage à Tataouine s'élève à 32%, soit le double de la moyenne nationale, se limitant à 15%. 4500 diplômés sont au chômage, soit près de la moitié des diplômés des dix dernières années. La zone vit d'élevage, des transferts des Tunisiens de l'étranger et, surtout, de contrebande, comme toutes les zones frontalières dans le monde. Mais, durant les trois dernières années, cette proximité de la Libye a été à l'origine de l'asphyxie de la région, en raison de la lutte contre le terrorisme. Les restrictions frontalières ont sensiblement réduit le flux de la contrebande, notamment le pétrole, la chute du dinar libyen a impacté l'élevage et rabaissé le prix du kilo de la viande ovine à 12 dinars, alors qu'il était autour de 20 dinars auparavant. D'où une autre chute des revenus de la population locale, qui doit faire face à la hausse des autres denrées. La région s'est donc retrouvée dans l'impasse et les jeunes n'ont pas cessé de manifester durant les derniers mois pour exprimer leur mécontentement. Lors de la récente visite du ministre de l'Emploi, le 15 avril, les manifestants ont accepté de geler leur mouvement pendant une semaine, à condition que le chef du gouvernement, Youssef Chahed, vienne sur place avec un programme de développement régional. M. Chahed avait programmé la visite à Tataouine pour le 27 avril. Mais les manifestants, dont certains sont manipulés par des sympathisants de l'ex-président Marzouki et de l'opposition, n'ont pas accepté d'attendre quelques jours de plus. Ils ont décidé, depuis samedi dernier, de bloquer le mouvement des camions transportant le pétrole vers le port de Sekhira, situé à 50 kilomètres au sud de Sfax. L'Union régionale du travail de Tataouine (URTT) soutient le mouvement des manifestants. Les ouvriers observent une grève de deux heures, chaque jour, pour exprimer leur appui aux manifestants. Le syndicat patronal soutient, lui-aussi, le mouvement social. Les patrons locaux déplorent l'octroi des services annexes à des sociétés, siégeant en dehors de Tataouine et employant une main-d'œuvre provenant des autres régions. On déplore également à Tataouine que les promesses des précédents gouvernements n'aient pas été tenues. Tous les gens de la région parlent, principalement, de la promesse du gouvernement de Hamadi Jebali d'installer une unité de transformation de gaz, employant 2700 personnes. Le projet est allé du côté de Gabès, tout comme l'école de formation des instituteurs.