Assainissement: traitement de près de 600 millions m3 d'eaux usées par an    Foot / Ligue des Champions (Gr: A - 6e et dernière journée) : héroïque en Tanzanie, le MC Alger qualifié en quarts de finale    Foot: clôture du Séminaire sur la gouvernance organisé par la CAF à Alger    La Coopérative Oscar pour la culture et les arts de Biskra commémore le 21e anniversaire de la mort du musicien Maati Bachir    Conseil de sécurité: la diplomatie algérienne réussit à protéger les avoirs libyens gelés    Cancer de la prostate: le dépistage individuel seul moyen de prendre connaissance de la pathologie    Intempéries: plusieurs routes coupées en raison de l'accumulation de la neige    Tourisme saharien : près 23.000 touristes étrangers ont visité le Grand Sud depuis début octobre 2024    Le Caftan constantinois: un des habits féminins prestigieux incarnant l'authenticité algérienne    Volley/Mondial 2025 (messieurs) - Préparation : le Six national en stage à Alger    Agression sioniste: environ 35 enfants palestiniens tués par jour à Ghaza, selon l'UNICEF    Chutes de neige sur les reliefs de l'ouest du pays à partir de samedi    L'attaque "lâche" contre le siège de "Global Aktion" vise à empêcher toute forme de solidarité et de soutien au peuple sahraoui    Marchés de gros: relance et développement des activités de la société MAGROS en 2025    Vers un embargo sur les armes    La valorisation du savoir et la bonne gouvernance et non le volume des réserves d'or qui permet le développement d'un pays    Vers l'importation de près de 28.000 tonnes de viandes blanche et rouge    LG lance un service de streaming audio gratuit    Bensaha deuxième recrue hivernale de l'USMH    Les Verts ratent leur sortie et déçoivent leurs fans    Championnat d'Arabie saoudite : L'Algérien Yousri Bouzok s'engage avec Al-Raed    Le ministre présente ses condoléances suite au décès du Moudjahid Mohamed Hadj Hamou,    Le Président Tebboune a reçu les responsables de médias    L'état du secteur de la communication et ses perspectives futures    Campagne de lutte contre la chenille processionnaire    Le wali en faveur du projet «SBA verte»    Mostaganem Premieres averses, grand soulagement    Poursuite des réactions internationales et appels au respect de l'accord    RDC : Appel à soutenir le processus de paix de Luanda    Frédéric Berger n'est plus    Entre bellicisme médiatique et journalisme populacier    La 10e édition a tenu toutes ses promesses    Agrément à la nomination du nouvel ambassadeur d'Algérie auprès de la République de Sierra Léone    Batna: la dépouille mortelle du moudjahid Lakhdar Benchaïba inhumée au cimetière d'Arris    Boughali reçoit des représentants de l'Association des parlementaires algériens    Batna: décès du moudjahid Lakhdar Benchaïba, dit Abdelhafid        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Tunisie
L��preuve de v�rit�
Publié dans Le Soir d'Algérie le 04 - 04 - 2013


Reportage r�alis� par Lyas Hallas
Pass� l�euphorie du renversement du r�gime de Ben Ali, l�implacable r�alit� du terrain met les Tunisiens devant des examens p�rilleux, dont les vell�it�s totalitaires des islamistes d�Ennahdha.
�Nekhel mat, siaha matet, ouladna battala� (�les palmiers sont morts, le tourisme a cal�, nos enfants sont au ch�mage�). �Cha�b ja�, ouaklouh chara�a� (�la l�gitimit� ne nourrit pas un peuple qui a faim�). Ces graffitis encore visibles sur les murs de Nefta, dans le gouvernorat de Tozeur au sud � une oasis o� il fait bon vivre situ�e non loin de la fronti�re avec l�Alg�rie �, sont particuli�rement significatifs du malaise qui ronge les Tunisiens. Et certains commencent d�j� � regretter la dictature. Le jasmin sent le soufre dans cette r�gion frapp�e par la s�cheresse et endurant la baisse de l�affluence des touristes � cause du climat de frayeur qui a marqu� les lendemains de la chute de Ben Ali. La r�gion a eu son lot de protestations. Des mouvements revendicatifs qui sont, � vrai dire, en d�phasage avec les pr�occupations des �lites politiques, pr�occup�es surtout par la reconqu�te du pouvoir accapar� par les islamistes d�Ennahdha. Rompu � la clandestinit�, le parti de Rached Ghanouchi �tait la seule formation structur�e, pr�sente sur le terrain au lendemain du changement politique intervenu en Tunisie. Les Tunisiens de l�int�rieur du pays partagent les m�mes frustrations avec les jeunes de Tunis qui ont vu leur �r�volution� confisqu�e par de vieux routiers de la politique. �Ils nous ont pouss�s � affronter la police mais, apr�s, ils nous ont ferm� les portes. Nous sommes, ainsi, bons pour faire les gilets pare-balles et non pas pour d�cider de notre sort�, ironise, avec amertume, Ali qui fut de toutes les manifestations � Tunis. Dans cette Tunisie qui se cherche, c�est aussi le mouvement associatif qui prend, tant bien que mal, le devant de la sc�ne politique. Des organisations de gauche s�ing�niant � vulgariser le droit � la diff�rence des concitoyens plut�t sensibles aux �uvres caritatives des associations satellites d�Ennahdha. Un dilemme. Il l�est notamment pour le mouvement citoyen Kolna Tounes d�Emna Menif qui essaye de r�concilier les deux. Emna Menif, 46 ans, est radiologue de formation et chef de service dans un h�pital public � Tunis. Syndicaliste avant la chute de Ben Ali, elle s�impose comme une figure de proue de la soci�t� civile tunisienne des deux derni�res ann�es. Apr�s une exp�rience peu concluante au sein du parti Afek Tounes (Horizons de Tunisie) dont elle �tait la porte-parole, elle opte pour la cr�ation de Kolna Tounes. Le dynamisme d�Emna g�n�re de l��nergie autour d�elle et beaucoup de jeunes Tunisiens, frustr�s par la tournure des �v�nements, se reconnaissent dans l�action de son association. Le projet qu�elle porte se fonde sur quatre points principaux : �La veille civique, la promotion des valeurs citoyennes, de la culture, du dialogue et des politiques de pr�vention contre la violence.� Elle vise �la consolidation de l�identit� tunisienne construite au fil des si�cles � la faveur de brassages culturels multiples (berb�re, ph�nicienne, romaine, byzantine et arabo-musulmane), l�interactivit� dans les domaines politique et �conomique et le soutien au d�veloppement dans toutes les r�gions du pays�.
Prostitution et contrebande � Sakiet Sidi Youssef
L�association a produit un film-documentaire sur la situation de la femme � Testour, dans le gouvernorat de B�ja. La ville, qui se trouve � 70 km de Tunis, l�une des plus anciennes de Tunisie, o� cohabitaient des Tunisiens de toutes les communaut�s religieuses, se radicalise au point o� �les femmes sont d�sormais interdites de passer par certaines ruelles de la ville�. Une ville qui a p�ti plus que les autres du �boycott� des touristes. Kolna Tounes organise justement des campagnes de collecte de dons pour les populations de Testour vou�es � la mis�re. Idem pour le village frontalier de Sakiet Sidi Youssef, au nord-est. La �cam�ra citoyenne� de l�association, port�e b�n�volement par Rym, la vingtaine, a rapport� des t�moignages qui donnent la chair de poule. La moiti� de la population de ce village o� le sang des Tunisiens s�est m�lang� � celui des �fr�res� alg�riens en 1958 dans un bombardement au napalm, s�adonne aux substances illicites. Seules la prostitution et la contrebande leur permettent de survivre. �Quand un p�re construit un g�te au milieu de la for�t pour accueillir les clients de sa fille qui offre son corps pour 4 dinars tunisiens et confie la caisse � son fils qui joue le soir aux cartes avec ceux qui abusent de sa s�ur, il y a de quoi se poser des questions. Cela se passe en Tunisie ! C�est inadmissible !� s�indigne Emna Menif.
Le secteur du phosphate tourne au ralenti
Le sud de la Tunisie n�est pas fait uniquement d�oasis. C�est l� aussi o� se concentrent les richesses naturelles du pays : p�trole � Tataouine et phosphates au bassin minier de Gafsa. Cinqui�me producteur mondial de phosphates, la Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG) est le plus important employeur � Gafsa. Elle symbolise l�Etat dans la r�gion. Et, en plus des gr�ves de ses personnels, tous les contestataires manifestent devant son si�ge pour porter leurs revendications sociopolitiques. A tel point que toutes les protestations enregistr�es � Gafsa ont touch� d�une mani�re ou d�une autre l�activit� de la compagnie, laquelle a vu sa production r�duite au minimum. Le secteur du phosphate en Tunisie qui p�se 10% du PIB tourne au ralenti. En termes de chiffres, de huit millions de tonnes r�alis�s en 2010, la production a atteint 2 millions de tonnes en 2011. Elle n�a toujours pas repris sa vitesse de croisi�re (4 millions en 2012). En effet, la CPG, qui approvisionne l�industrie locale de transformation, a �puis� son stock de s�curit� durant ces deux derni�res ann�es suivant la chute de Ben Ali et le recours � l�importation de cette mati�re premi�re n�est pas � �carter. �D�sormais, nos clients doivent prendre leur mal en patience pour voir leurs commandes satisfaites.� Les d�g�ts subis par la compagnie donnent le tournis : 16 millions d�euros en 24 heures suite � un incendie sabotant une unit� de production. De m�me que le manque � gagner engendr� par la situation politique du pays est incommensurable. La compagnie a besoin de dix-huit trains par jour pour acheminer son phosphate en temps opportun. Les co�ts de transport se multiplient par trois � la moindre protestation des cheminots. Le recours aux camions, s�il permet d�amortir la tension, dope les co�ts d�exploitation. Si la production du phosphate commence � reprendre avec le semblant de stabilit� qui r�gne actuellement au sein des institutions de l�Etat tunisien �, la fuite en avant du gouvernement risque n�anmoins d�introduire la CPG et� la Tunisie avec, dans une spirale infernale. Le minist�re du Travail a affect� 2 500 demandeurs d�emploi dans les diff�rentes structures de la compagnie. Un effectif au-dessus des capacit�s d�absorption de l�entreprise qui devrait gonfler inutilement la masse salariale et augmenter les co�ts d�exploitation. �Nous avons besoin plut�t de comp�tences.
De la po�sie populaire soutenue par l�Institut fran�ais
Avec le concours financier de la fondation allemande Friedrich Naumann, un rassemblement des jeunes Maghr�bins pour la libert� a �t� organis� du 20 au 26 mars dernier � Tunis et Tozeur par l�association Kolna Tounes. �Nous avons jug� judicieux de sortir de Tunis et donner la chance � une autre ville. La Tunisie, c�est aussi Kairouan, Tozeur, Tataouine��, a estim� Emna Menif. L�association a ainsi apport� sa contribution � la relance du tourisme saharien par l�organisation, en marge de cette formation destin�e aux jeunes et ayant pour th�me la transition d�mocratique dans les pays du Maghreb, d�un festival de po�sie arabe � Nefta. Une manifestation culturelle soutenue par le minist�re tunisien de la Culture et du Tourisme et de l�Institut fran�ais de Tunisie. Une procession festive d�ambulant � travers les ruelles et venelles de �Bled el Arbi�, appellation dialectale de la vieille cit� de Nefta et de toutes les vieilles villes de Tunisie. A chaque halte, un po�te prononce des vers. Tant�t en arabe classique, tant�t en arabe dialectal. Les po�tes, tous originaires du sud de la Tunisie, ont chant� leurs villages, leurs amours et m�me leur boisson spirituelle : �el legmi� ou le jus de palmier ferment�. C�est la haute saison touristique � Tozeur et ses environs mais l�affluence n�est pas au top. �M�syrha tarja� ! (�Elle finira par reprendre�)�, soupire un artisan de Nefta, plut�t avec pessimisme.
Syst�me politique d�testable
Sujette au populisme d�Ennahdha, l��conomie tunisienne est en berne et sa relance passe d�abord par le r�glement des questions politiques. Le recrutement dans les entreprises publiques est confi� au minist�re du Travail qui en fait de la politique. Et le durcissement de la taxation de l�alcool et le laxisme vis-�-vis des �barbus� qui commercent en dehors des circuits l�gaux d�figurant des art�res jadis calmes et conviviales, y compris � Tunis, comme la rue de Paris, mitoyenne de l�avenue Habib Bourguiba, ne sont pas pour rassurer les touristes. La situation politique actuelle est la r�sultante, selon Kamel Jendoubi, ancien pr�sident de l�Instance sup�rieure ind�pendante pour les �lections, d�un �faux diagnostic du rapport de force en Tunisie�. Il explique : �Les gens pensaient que les �lections seraient en faveur des forces non islamistes. Les plus g�n�reux leur accordaient une repr�sentativit� � hauteur de 20%. Finalement, c�est la loi relative aux �lections sous l�ancien r�gime qui aura sauv� la Tunisie d�un raz-de-mar�e islamiste�. Et d�ajouter : �L�effet de ce faux consensus a fait que nous sommes devenus otages de la l�gitimit�. Le r�gime de Ben Ali a laiss� place au plus d�testable des syst�mes politiques, celui o� le parti le plus fort gouverne suivant la loi du nombre. Dit autrement, c�est le conseil consultatif d�Ennahdha (majlis echoura) qui d�cide du sort des Tunisiens. Il s�est arrog� le droit de l�gif�rer et se taille d�sormais des lois sur mesure. Et ce n�est pas pour garantir les libert�s.� Les islamistes d�Ennahdha, s�ils n�ont pas la majorit� absolue, composent une tro�ka avec deux partis la�ques, le Congr�s pour la R�publique (CPR) du pr�sident Moncef Marzouki, et Ettakatol, la formation dirig�e par le pr�sident du Parlement, Mustapha Ben Jaafar. Ce partage des postes- cl�s au sein des institutions de l�Etat n�est apparemment pas pour renforcer le gouvernement qui dispose, th�oriquement, de l�essentiel du pouvoir ex�cutif. Sous la pression de la rue, la gr�ce cens�e lib�rer les d�tenus politiques fut fatalement �largie aux criminels. �C�est � cause de la faiblesse du gouvernement de Mohamed Ghanouchi qui a eu � g�rer les affaires courantes apr�s la chute de Ben Ali (� ne pas confondre avec Rached, leader d�Ennahdha, Ndlr). Il faut dire ce qu�il en est. Et, ce sont des juristes et militants des droits de l�Homme se revendiquant de la gauche, de par leur exc�s de z�le, et non pas les islamistes comme on pourrait le penser, qui le lui ont impos�e�, a soulign� Kamel Jendoubi.
Les lois de la discorde
Sceptique, Kamel Jendoubi, tout en rappelant que les d�lais assign�s � l�Assembl�e constituante pour r�diger la nouvelle Constitution ont expir� depuis plus de trois mois, pense que cela va prendre encore plus de temps. Jalel Bouzid, d�put� d�Ettakatol et membre de la Commission des collectivit�s publiques, r�gionales et locales � l�Assembl�e nationale constituante (ANC), a justifi� l�alliance avec Ennahdha par la �volont� de prot�ger la r�volution�. Chose que Kamel Jendoubi n�admet pas vraiment : �Les lois les plus lib�ratrices ont �t� promulgu�es avant l��lection de l�Assembl�e.� Si les d�put�s rencontr�s au sein de l�ancien palais des Beys du Bardo, abritant le Parlement, expliquent le retard accus� dans la r�daction de la nouvelle loi fondamentale par l��absence d�un consensus entre les partis de la tro�ka�, certains observateurs disent qu�Ennahdha �use de moyens dilatoires afin de se doter des outils qui lui permettraient d�asseoir son pouvoir et le maintenir dans la dur�e�. Le projet de loi dite de �protection de la r�volution� en est la parfaite illustration. Elle d�finit les r�gles de justice transitoire. C�est une loi qui divise les Tunisiens et apporte de l�eau au moulin de l�opposition et les �gauchos� ne se privent m�me plus � user d�expressions � connotation religieuse pour titiller Ennahdha. �Hia kalimat hak youradou biha batil (�une parole de v�rit� destin�e � justifier la perfidie�). Elle cache des arri�re-pens�es revanchardes�, a avanc� Mohamed Hamedi, pr�sident du bloc d�mocratique au sein de l�ANC. Il estime : �La loi vise les anciens du Rassemblement constitutionnel d�mocratique (RCD) de Ben Ali qui n�ont pas ralli� Ennahdha. Elle les criminalise parce qu�ils n�ont pas pr�t� serment d�all�geance. Elle veut les rendre ��orphelins�� et leur proclamer son tutorat. Or, la r�conciliation ne se construit pas sur la base de l�exclusion.� En ce qui concerne la Constitution, c�est la r�f�rence � la Charia ou aux chartes internationales des droits de l�Homme qui divise les d�put�s. Mustapha Ben Jaafar, pr�sident de l�ANC, se veut rassurant en tout cas : �Les d�bats organis�s au sujet de la mouture de cette loi fondamentale �taient tr�s riches. Les Tunisiens auront une Constitution consensuelle o� les citoyens seront �gaux devant la loi. La question de la r�f�rence a occup�e une grande partie de ces d�bats. Mais je rassure qu�il n�y aura plus de tyrannie en Tunisie ! Le texte final sera bient�t rendu public.� Autant dire que si la r�volution du jasmin, qui fut applaudie aux quatre coins de la plan�te, a mis fin au r�gne du r�gime tyrannique de Ben Ali, et � moins d�un autre sursaut populaire des Tunisiens, elle aura aussi plac� le pays � un carrefour peu enviable pour des �mes avides de libert� et d��galit�.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.