La commission provisoire chargée de délivrer la carte professionnelle de journaliste a été installée le 22 juillet 2014 pour une durée d'une année. Elle a constaté une vingtaine de cas liés à la falsification d'attestations de travail et adressé les dossiers au ministère de la Communication en 2016. Le ministère de la Communication a annoncé, dimanche, un audit pour vérifier l'authenticité des informations ayant servi à faire valoir la qualité du journaliste professionnel, afin «d'éviter» que la carte de journaliste professionnel «ne se trouve entre les mains d'indus détenteurs». La commission provisoire chargée de délivrer la carte de journaliste professionnel a recensé au moins une vingtaine de cas litigieux signalés au ministère de la Communication au début de l'année 2016. «Nous avons constaté une vingtaine de cas liés à falsification d'attestations de travail. Nous avons adressé les dossiers au ministère de la Commission qui a envoyé un inspecteur. Mais aucune suite n'a été donnée à ces cas», précise une source au niveau de la commission, qui a requis l'anonymat. Le chiffre de dossiers impliquant des faux journalistes remis à la commission serait encore plus important. Des directeurs de publication (DP) seraient impliqués dans les cas de faux et usage de faux. «Des DP ont falsifié les documents pour permettre à des chauffeurs, des secrétaires, des parents et des fils d'avoir la carte de journaliste», signale notre source. Kamel Amarni, journaliste et SG du syndicat national des journalistes (SNJ), favorable à l'opération d'assainissement annoncée par le département de Djamel Kaouane, confirme ces cas : «Certains patrons de presse n'ont pas été honnêtes. Ils ont glissé dans les dossiers remis à la commission de fausses attestations de leurs fils ou de proches.» Le contrôle engagé par la commission provisoire s'est fait suite au signalement par les rédactions des cas litigieux ou par l'identification par les membres de la commission des demandeurs. Notre source estime que si la commission a remis des cartes sur la base des documents déposées, l'inspection diligentée par le ministère de la Communication «avait l'obligation de vérifier les vraies-fausses attestations de travail auprès de l'organisme employeur.» D'aucuns s'interrogent sur le rôle de la justice, qui devrait être saisie pour statuer sur ces cas d'infraction à la loi (faux et usage de faux, usurpation de fonction). Blocage de la commission Installée le 22 juillet 2014 pour une durée d'une année, la commission provisoire n'a accompli qu'une partie de sa mission, celle d'identifier les journalistes en exercice. «La commission avait deux missions : la première est celle d'identifier les journalistes. La seconde est de préparer l'installation lors d'élections ouvertes à des journalistes dûment identifiés des instances instituées par la loi organique sur l'information (12-05) - Conseil supérieur de l'éthique et de la déontologie, commission permanente de la carte, autorité de régulation la presse écrite. Nous ne sommes pas allés au bout de cette mission», regrette notre source. Le retard dans l'installation de ces instances est imputé à l'ancien ministre du secteur, Hamid Grine, qui «n'a pas pris en compte le message du président de la République et les instructions de l'ancien Premier ministre, Abdelmalek Sellal». Kamel Amarni estime que le retard dans le lancement des instances prévus dans la loi sur l'information s'explique par «l'anarchie totale» de la presse, marquée par une pléthore de médias (journaux, sites électroniques, etc.) : «La commission de la carte devait délimiter la population de journalistes des différents médias. On n'installe rien si on n'a pas idée des personnes qui voteront ou seront éligibles. A partir de là on peut aller vers ces organismes.» La commission de la carte, dont l'activité a cessé, il y a trois mois, a adopté son bilan et a remis à la tutelle une banque de données contenant quelque 5500 journalistes identifiés. L'ancien ministre de la Communication n'a pas favorisé un «travail serein» de la commission, dont les membres (13) n'ont pas reçu leurs indemnités malgré une activité qui a duré 27 mois. «Nous avons entamé notre travail le 22 juillet 2014. Nous l'avons terminé il y a trois mois. Il y a eu un mépris total de la commission par l'ancien ministre, alors que les membres ont travaillé dur, surtout la première année», s'indigne notre source.