Le gouvernement de Paolo Gentiloni doit redoubler d'efforts et de patience pour, d'une part, gérer la difficile situation engendrée par l'arrivée incessante de réfugiés sur le territoire italien et ôter tout prétexte à l'instrumentalisation politique à l'opposition, et d'autre part, répondre aux accusation des pays européens, qui ne cessent de mettre la pression sur la péninsule, pour l'amener à «fermer ses ports». Il faut dire que si en 2016, les 180 000 personnes (Africains et Asiatiques) échouées sur le littoral sicilien, sarde ou calabrais (5022 ont péri dans la traversée) ont pu être accueillies et acheminées vers les centres de rétention et d'identification, dans une atmosphère de polémique entre les partis politiques au pouvoir et ceux de l'opposition, en ce premier semestre de 2017, le nombre des arrivées alarme déjà les autorités. Selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), entre le 1 janvier et le 30 juin 2017, 83 731 réfugiés sont arrivés en Italie, provenant principalement de pays comme le Bengladesh, la Guinée, la Côte d'Ivoire, et dans une moindre mesure de Gambie, Sénégal et Maroc. Curieusement, il n'y a pas de Syriens et d'Irakiens parmi ces derniers, et même les Erythréens et les Afghans, qui entreprenaient ces voyages dangereux vers l'Italie, se font rares. L'autre nouveau phénomène, c'est l'augmentation de Marocains candidats à l'immigration, à travers les passeurs et les embarcations de fortune. Ces débarquements, dont les médias se font l'écho régulièrement, ont poussé plusieurs communes du sud du pays, jusque-là hospitalières, à refuser d'héberger des réfugiés. C'est le cas dans la province de Messine, où les maires de plusieurs villages se sont réunis pour se rebeller contre les instructions du gouvernement central, en refusant d'accueillir dans les structures se trouvant sur leur territoire, le quota qui leur a été destiné. Ce malaise, y compris parmi les maires appartenant à des partis de la coalition au pouvoir, devient du pain béni pour l'opposition, surtout le parti xénophobe de La Ligue du Nord, qui exploite la situation pour brasser des voix dans le vivier des Italiens mécontents de leur vie et très pessimistes quant à l'avenir. Cet amalgame, entre les problèmes sociaux et économiques du citoyen et la question de l'immigration, a eu raison du projet de loi Ius soli (droit de sol) qui devait finalement pouvoir accorder la nationalité italienne aux enfants d'immigrés en situation régulière, nés et scolarisés en Italie, comme c'est le cas dans plusieurs pays de l'Union européenne. C'est le Parti démocrate lui-même, par la voix du président du Conseil italien, qui a annoncé que cette loi sera gelée pour l'instant, craignant une grave crise institutionnelle, si elle venait à être soumise au vote de confiance au Parlement. Cette volte-face a été très mal prise par les défenseurs des droits des immigrés et par l'Eglise catholique elle-même, qui y a vu «une défaite de la justice». Pourtant, l'Italie a un besoin crucial de l'immigration, comme l'a rappelé le président de la Caisse de prévoyance et des retraites, Tito Boeri : «Les travailleurs étrangers versent 8 milliards d'euros à la caisse de l'Etat et n'en reçoivent en retour que 3...» Le reste finance les retraites de la population italienne désormais trop vieille. Les Italiens âgés de plus de 65 ans dépassent les 13,5 millions, soit 22,3% de la population, alors que le taux de ceux qui ont atteint 80 ans est de 7%.