Selon le Premier ministre, les montants qu'il faudra injecter dans l'économie via le financement non conventionnel sont impossibles à évaluer actuellement. Cette affirmation est-elle vraiment crédible, sachant que les déficits du Trésor et l'état des équilibres budgétaires sont aujourd'hui bien déterminés ? Les pouvoirs publics ayant été incapables de mettre au point des politiques contra-cycliques pour échapper aux fluctuations du prix du baril de pétrole brut durant la période d'aisance financière sont condamnés actuellement à procéder à un ajustement structurel sévère de l'économie, sans le Fonds monétaire international (FMI). Au demeurant, le financement non conventionnel pour lequel opte le gouvernement, s'il n'est pas bien cadré, peut aggraver la situation des finances publiques. Dire que les montants qu'il faut injecter dans l'économie ne peuvent être évalués aujourd'hui signifie que les arbitrages ne sont pas encore réalisés en matière d'objectifs liés à la dépense publique. Logiquement, lorsqu'il y a crise financière, la première décision adéquate à prendre se rapporte à des mesures d'austérité à tous les niveaux. En apparence, ce n'est pas le cas puisqu' il est prévu le maintien du statu quo dans la structure du budget de l'Etat. Le recours au financement non conventionnel serait, selon Ouyahia, un choix rationnel car le niveau de la masse monétaire serait en-deçà de celui des réserves de change. Cette théorie peut-elle être économiquement fondée ? La masse monétaire a ses contreparties qui sont reconnues, en l'occurrence les montants des devises étrangères détenues par la Banque d'Algérie, les crédits à l'économie réalisés par le système bancaire au profit des agents économiques, et enfin les avances au Trésor prévues par l'article 46 de la LMC, dans la limite d'un maximum égal à 10 % des recettes ordinaires de l'Etat constatées au cours du précédent exercice budgétaire. Aller au-delà de ces trois composantes, c'est placer l'économie du pays dans un processus inflationniste qui pourrait s'avérer néfaste, voir susceptible d'anéantir les objectifs budgétaires que vient de se tracer le gouvernement. Les financements non conventionnels risquent-ils d'aggraver rapidement l'érosion de la valeur du dinar ? Le recours au financement non conventionnel dans des économies comme celle de l'Algérie est source d'inflation. L'écart inflationniste avec les pays partenaires peut amener à la dépréciation de la monnaie nationale, selon la règle de la parité des pouvoirs d'achat. Le taux de change effectif réel du dinar constitue justement un facteur d'ajustement de la balance commerciale. Il doit suivre une trajectoire correspondant aux variables économiques fondamentales du pays. L'Etat allait-il réellement être dans l'incapacité d'assurer le traitement des salaires des quelques mois à venir sans un accroissement de la masse monétaire, comme l'a affirmé le chef de l'Exécutif ? Le problème qui se pose est celui du financement du déficit budgétaire pour l'année 2017, puisqu'habituellement le Fonds de régulation des recettes (FRR) est sollicité pour la circonstance, mais, semble-t-il, il s'est épuisé. Sinon, l'ensemble des dépenses étant déjà budgétées dans le cadre de la loi de finances et les crédits de paiements sont notifiés. Le recouvrement des différentes sources de recettes fiscales (y compris la fiscalité pétrolière) doit normalement permettre au Trésor public de faire face aux différents engagements.