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Quel modèle de festivals dans le nouveau modèle culturel ?
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Publié dans El Watan le 02 - 10 - 2017


Par Noureddine Nesrouche,
Kamel Belkacem, Zoheir Bouzid, Brahim Mechaar
Membres fondateurs du Dimajazz
Espaces de rencontres et de convivialité, les festivals de musique, plus que toute autre forme de manifestation culturelle, peuvent attirer le grand public, diffuser la culture au sein de toutes les couches sociales et agir telle une locomotive économique dans les régions.
En Europe par exemple, les festivals de musique sont devenus une tendance culturelle et économique, un baromètre infaillible de la vie et de la consommation culturelle dans les pays.
Au Sud, Dubaï, Beyrouth et Abidjan rivalisent de même et brillent sur la carte mondiale des événements. Au moment où l'enjeu économique et social est mesuré un peu partout dans ce monde qui saisit la force des festivals dans la diffusion de la culture, en Algérie l'expérience et les acquis de 15 ans de festivals institutionnalisés sont liquidés en bloc, sans bilan ni alternative. Faut-il jeter le bébé avec l'eau du bain ? Ou alors révolutionner les mentalités pour exploiter l'immense potentiel du spectacle vivant ?
Cette réflexion propose d'ouvrir le débat entre professionnels et institutions. Elle est motivée par notre inquiétude de voir notre pays faire des choix à l'opposé de ses intérêts culturels, et notre crainte de voir sacrifier ce pour quoi nous avons milité et travaillé assidûment et avec passion depuis 20 ans.
De notre expérience dans l'organisation d'événements de musique, essentiellement à travers Dimajazz, nous avons tiré des enseignements que nous désirons partager ici, ainsi que notre approche concernant l'avenir des festivals de musique en Algérie. Ces acquis ne doivent pas être sacrifiés sur l'autel de l'austérité. Il n'y a pas pire erreur que de considérer la culture comme un luxe superflu et céder aux sirènes du populisme qui réduit l'Algérien à un tube digestif.
La crise économique ne doit pas suspendre la vie culturelle, d'autant que la culture a démontré partout son potentiel de développement économique. En France, par exemple, la culture contribue pour 3,2 % à la richesse nationale et emploie 670 000 personnes (chiffres officiels de 2013). Les 1887 festivals de musique actuelle recensés en 2015 avaient généré 155 M€. L'industrie des festivals profite aux collectivités à travers les droits d'auteurs, les recettes fiscales, l'emploi, les contrats directs et indirects, le tourisme… une aubaine. La culture représente un véritable microsystème économique.
Les festivals comme système d'irrigation culturelle
Le droit à la culture découle des droits de l'homme auxquels adhère notre pays. Les orientations de l'Etat algérien de ces 15 dernières années ont permis au secteur de bénéficier de budgets jamais égalés, ayant favorisé l'agrandissement du réseau d'infrastructures et l'éclosion d'un nombre inédit de festivals (plus de 170 pour ceux institutionnalisés). Stigmatiser aujourd'hui ces événements en l'absence d'un bilan chiffré, établi par des professionnels neutres, et embrassant les aspects technique, artistique, organisationnel et l'impact économique et/ou sociologique, revient à dénigrer ceux ayant travaillé sincèrement et à enterrer les expériences réussies, à supprimer des soupapes pour le grand public et des opportunités d'emploi pour les artistes.
Certes, le modèle né en 2003, à l'initiative du ministère de la Culture, portait en lui des aberrations ayant débouché sur une inflation et in fine, sur des dérives. En témoigne le décret exécutif n° 03-297 du 10 septembre 2003 fixant les conditions et les modalités d'organisation des festivals culturels, toujours en vigueur. Cependant, pour paraphraser Luc Benito (Les festivals en France, Editions l'Harmattan), en Algérie l'abondance n'a pas tué la faim, mais a plutôt stimulé l'appétit. On ne peut nier l'apport des festivals dans la diffusion des œuvres, la promotion des genres artistiques, et surtout l'irrigation culturelle de l'ensemble du territoire algérien.
Même si le cadre a été utilisé abusivement, parfois comme fourre-tout aux mains d'éternels amateurs, ou comme tremplin pour des positions rentières, le potentiel n'en reste pas moins intact. Le public, en tout cas, a appris à distinguer entre un événement de qualité et une arnaque. On ne peut imaginer un nouveau modèle culturel sans qu'il soit tracté par une politique cohérente et offensive de création de festivals à travers le territoire national. Il existe une corrélation structurante entre les initiatives culturelles et le développement local. Ce sont les régions qui doivent porter la demande, et ce sont les professionnels, qu'ils soient issus du milieu associatif ou organisés en sociétés commerciales, qui doivent assurer la mise en œuvre des événements, en production directe ou en sous-traitants de l'Etat.
Ces succès, produits indépendants
Le succès du Dimajazz dans les murs de Constantine et au-delà est la preuve qu'un festival musical est un investissement gagnant, pourvu qu'il remplisse les conditions. Ce succès est dû au fait que Dimajazz est porté par des musiciens ayant pu définir avec précision le pourquoi et le comment de l'événement, ce qui a permis de capter un public qui se compte aujourd'hui par milliers, des milliers de citoyens qui payent les droits d'accès, une option où Dimajazz a été pionnier. Avec des moyens réduits (le budget le plus modeste dans la catégorie des festivals internationaux) le Dimajazz a pu réaliser l'essentiel : une facture artistique remarquable, une qualité technique exemplaire et une organisation saluée par le public, en plus d'un rayonnement médiatique qui déploie une belle image de l'Algérie sur les cinq continents.
On ne peut omettre aussi le volet formation que nous avons introduit comme élément structurant dans le cadre de notre vision et notre approche de l'utilité d'un festival. Dimajazz inspire le respect du public et de nos partenaires ici et à l'étranger, notamment les agents artistiques avec lesquels nous sommes liés par des relations de confiance inestimables.Les expériences du Dimajazz à Constantine, de Joua à Béjaïa et Racont'art à Tizi Ouzou, ou encore l'éphémère et excellent Bledstock à Alger, sont pionnières et méritent d'être reproduites à travers le territoire national.
Pour nous, ces événements, émanation de la jeunesse structurée dans des associations, sont le modèle le mieux indiqué aujourd'hui pour créer des rendez-vous culturels adaptés aux besoins des populations locales, avec une rationalisation des moyens financiers qui n'empêche pas des ambitions de programmation.
En ce qui nous concerne, nous avons fonctionné selon le modèle associatif suivi par celui du commissariat. Cependant, cette forme institutionnelle conjoncturelle est devenue obsolète. La dimension qu'a prise cet événement, aux niveaux local, national et international, dépasse largement les limites des cadres administratif et juridique auxquels il obéit.
Libérer l'initiative
Aujourd'hui, nous avons besoin de passer à une nouvelle génération de festivals et non pas d'enterrer ceux en activité. Nous avons besoin de capitaliser cette expérience et faire son bilan avant de passer à une version 2.0, assise sur la correction des erreurs passées. Des corrections qui ordonnent surtout de libérer le champ d'organisation des festivals pour inclure tous les opérateurs, en ce qui concerne les festivals qui choisissent de rester sous la tutelle du ministère de la Culture, il convient d'élaborer des cahiers des charges adaptés à chaque festival et de les confier en sous-traitance à des indépendants. Un prix de concurrence pourrait motiver les uns et les autres et tirer vers le haut la qualité de ces événements.
La culture, comme les autres secteurs économiques, doit contribuer à l'effort national. Mais elle ne peut pas être jugée à l'aune des autres secteurs, s'agissant d'un levier principal du lien social. En outre, la notion de service public ne peut être amputée de la politique du secteur. Par conséquent, l'Etat ne peut lâcher brutalement ces festivals, il est appelé à les accompagner durant une période de transition afin qu'ils puissent opérer leur mue et trouver de nouveaux appuis financiers.
En parallèle, il est nécessaire que le gouvernement puisse mettre en œuvre des modalités d'encouragement et de facilitation du sponsoring culturel, afin de renforcer et mettre en application la plateforme déjà établie, notamment le décret exécutif n° 11-129 du 22 mars 2011 (relatif à la déduction des dépenses de sponsoring, de patronage et de parrainage des activités à vocation culturelle, de l'impôt sur le revenu global ou de l'impôt sur les bénéfices des sociétés).
Le désengagement de l'Etat ne doit pas l'empêcher d'œuvrer aussi à la mise en place d'un environnement propice à l'implication du mouvement associatif. L'Etat pourrait payer moins, mais il devrait d'abord libérer l'initiative et créer un climat favorable à la naissance d'une offre festivalière adaptée à la demande populaire.
Ceci dit, le privé ne peut être la panacée, comme l'entend le gouvernement. En France, où le nombre de festivals et leur impact économique et social sont conséquents, seulement 6 % des festivals de musique actuelle sont réalisés par des sociétés privées. La part du mouvement associatif s'élève quant à elle à 70%, alors que les structures publiques réalisent 16% des festivals et le double s'agissant des festivals où l'entrée est gratuite (statistiques Sacem, Irma et CNV). Cet apport considérable du mouvement associatif est tributaire cependant d'une prise de conscience et de pragmatisme au niveau des collectivités locales, notamment les communes, qui, aujourd'hui, hélas, sous-estiment l'opportunité économique et sociale qu'offre un bon festival musical.
En résumé, nous préconisons l'élaboration d'une législation adaptée et la décentralisation de la décision, des cahiers des charges souples, une fiscalité avantageuse pour les sponsors et des facilités administratives. L'activité événementielle dans le domaine musical a besoin d'une véritable révolution des mentalités pour asseoir un système solide à même de favoriser une dynamique festivalière. Ainsi stimulés, la culture algérienne, la création, la production, l'emploi des artistes (et des effectifs liés aux métiers du spectacle), ainsi que la diffusion large et la consommation, n'en seront que bénéficiaires. Nous rêvons qu'un jour notre pays puisse faire mieux qu'en France, où plus de 1200 communes accueillent et profitent des festivals, ou encore mieux qu'en Croatie, où le festival Ultra draine 150 000 festivaliers issus de 125 pays. Nous pouvons y arriver !


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