L'édition 2017 d'«Algérie en Mouvement», tenue à Paris du 27 au 30 septembre, a mis en exergue les différents acteurs de la société civile de notre pays. Les organisateurs de cet événement, eux-mêmes militants associatifs regroupés au sein de l'association Forum France Algérie (FFA), ont voulu encourager une «dynamique citoyenne», qui pourrait contribuer à enclencher un processus de changement à la fois sur les plans culturel, sociétal et économique. Ce qui impacterait forcément l'espace public politique. A travers cette initiative, «nous parlons de tous les Algériens qui sont en mouvement. Sont mis en valeur tous ceux qui font que l'Algérie tient encore debout. Ils sont des millions à se battre tous les jours desquels nous présentons uniquement un petit échantillon», déclare Farid Yaker, président du FFA, lors de son allocution d'ouverture de cette rencontre, à mi-chemin entre un colloque économique, un congrès écologiste et un festival culturel. En effet, au cours de quatre journées très chargées, ont été traitées plusieurs thématiques minutieusement choisies, souvent «sur la base d'un vote des adhérents», comme nous l'explique M. Yaker. Nous pouvons en citer quelques exemples qui ont particulièrement retenu notre attention : la place de la femme dans l'espace public ; l'économie sociale, solidaire et innovante (recyclage, digital, santé, etc.) ; la contribution des réseaux sociaux à la création de nouveaux espaces citoyens, et enfin l'émergence d'un engagement écologiste. Ainsi, le panel des conférenciers et des intervenants était riche, divers et varié. Parmi eux était présent l'activiste environnemental, Amar Adjili, qui a marqué les esprits grâce à ses campagnes de nettoyage des plages algériennes. Invité à prendre part à une conférence autour du thème «La société civile en Algérie et le dynamisme entrepreneurial : état des lieux et perspectives», M. Adjili est revenu, non sans grande émotion, sur son aventure «verte» qui a le mérite d'avoir lancé une vraie machine de solidarité citoyenne pour la collecte de déchets dans nos plages et nos forêts. En agissant de sa propre initiative, il a créé une belle dynamique et formé un circuit vertueux salutaire. Autour de la même table, mais s'activant plutôt dans le secteur culturel, son camarade Hacène Metref, directeur de Raconte-arts, a expliqué les secrets du succès de son festival qui dure depuis 14 ans : «Durant toutes ces années, des villageois kabyles nous ont donné des leçons de citoyenneté. Ils sont même en avance sur les villes en matière de tolérance et d'ouverture.» Selon M. Metref, la force de Raconte-arts c'est sa prise en charge entière par des acteurs locaux qui se sont «réapproprié la citoyenneté à leur manière», sans attendre quoi que ce soit des pouvoirs publics. «C'est un espace, dit-il, qui libère les énergies et les expériences. Il fait appel à la solidarité et à une révolution des esprits.» Coopération Ces deux témoignages prouvent, à eux seuls, que la société civile dispose d'une grande capacité à se renouveler et à mobiliser autour d'elle. Ce qui est loin d'être le cas de la classe politique. Cependant, Agnès Belaïd a rappelé l'importance de «l'approche du dialogue et de coopération entre les acteurs de la société civile et les pouvoirs publics. Un tel cadre d'échange est très constructif. Par exemple, l'association constantinoise Wafa qui s'occupe des enfants autistes s'est vu confier par les autorités la gestion d'un centre spécialisé.» Cette complémentarité serait nécessaire pour élever la conscience citoyenne, et devrait, selon la représentante de Joussour, s'élargir vers les acteurs économiques s'impliquant dans le développement durable. Ceux-là ont été représentés dans le débat par quelques jeunes entrepreneurs et chefs d'entreprise : Besma Belbedjaoui, directrice de PlastiCycle, une entreprise de recyclage et de tri sélectif ; Adlane Belahouel, cofondateur d'Ayrade, une société d'hébergement web et de services internet ; Kamel Haddar, cofondateur d'iMadrassa, un service d'accompagnement digital à la scolarité. Les trois intervenants ont exprimé leurs attentes vis-à-vis des autres acteurs de la société civile avec lesquels ils devront travailler pour développer leurs secteurs respectifs, considérés comme d'«importants vecteurs de développement économique en Algérie». L'une des spécificités de cette deuxième version d'«Algérie en Mouvement», c'est certainement la prédominance des projections-débats de films et de documentaires très engagés, qui ont eu lieu au cinéma L'Entrepôt (Paris) tels Bla Cinima de Lamine Ammar-Khodja, Wesh Derna de Riadh Touat (récompensé à l'occasion par le Prix du Forum France Algérie) ou encore A mon âge je me cache encore pour fumer de Rayhana, qui a été d'ailleurs honorée en présence de son actrice de marque Biyouna. Celle-ci a offert au festival une baisse de rideau en humour et dans la bonne humeur.