L'appel d'un collectif citoyen pour les libertés a été entendu jeudi par quelques dizaines de personnes qui se sont rassemblées devant le siège de la wilaya avant d'entamer un bout de chemin vers la place de la Liberté d'expression Saïd Mekbel, où avait lieu un second rassemblement avec prises de parole qui tenait lieu de l'université «populaire» de la LADDH. Le 29e anniversaire de la révolte populaire du 5 Octobre 1988 a été ainsi commémoré dans la rue, en présence de Me Hocine Zehouane, président de la LADDH, et Karim Tabbou, porte-parole de l'UDS, parti toujours pas agréé. A cet appel, ont répondu présents deux députés de la wilaya, Braham Bennadji, indépendant, et Khaled Tazaghart, du parti de l'Avenir. De vieux et jeunes militants des droits humains, représentants plusieurs organisations politiques et syndicales ainsi que des associations étaient présents pour commémorer cet anniversaire et dénoncer l'interdiction de l'université d'automne de la LADDH par les services de la wilaya. «Nous sommes là pour protester et faire la mise au point», a déclaré Me Zehouane qui ne pense pas moins que les arguments de l'administration sont «spécieux et ridicules». «En tant que juriste, je leur dis que s'il y a des conflits à l'intérieur de la ligue, juridiquement cela ne vous concerne pas, ce n'est pas votre problème. Vous avez pris une décision et vous êtes incapables de la motiver», a-t-il répliqué voyant en ceux qui empêchent la libre parole des personnes «momifiées dans leurs structures régaliennes». «Ils ont peur de qui, de quoi ? Du discours, de la parole ?» s'est-il interrogé, promettant de ne pas s'arrêter à cette réaction. «Mais ce n'est pas fini, nous allons reprendre le combat pour la démolition de cette loi scélérate de 2012 qui a été inventée pour tuer le mouvement associatif.» «Nous avons rêvé de créer une ligue qui appartienne au peuple, mais nous avons échoué à cause des brutalités», regrette Me Zehouane qui a vu dans la «mobilisation» de jeudi «un signe d'encouragement» pour la continuité du combat pour l'idéal démocratique, invitant à «la solidarité contre la répression, pour le développement des droits civiques et la défense des droits de l'homme». C'est ce à quoi aspire cette manifestation qui a compté le soutien de 25 organisations, dont celui de certaines n'a pas été agissant. Mais que l'on réussisse à fédérer autant de sigles et différentes sensibilités «fait peur au pouvoir», selon Said Salhi, vice-président de la LADDH. «On a réussi un exploit d'être ensemble, et ce n'est pas évident. Ça ne se fait pas ailleurs !» estime-t-il, appelant à sauvegarder «les acquis d'Octobre 1988 qui sont systématiquement attaqués». A commencer par les libertés d'organisation et d'association remises en cause par le refus d'agrément pour des partis comme celui lancé par Karim Tabbou, l'UDS. «Des prétextes fallacieux», dénonce Tabbou. «Tous les citoyens, quelles que soient leurs opinions politiques, ont le droit d'exercer leurs libertés», revendique-t-il. Karim Tabbou accuse le pouvoir qui, par ses pratiques répressives des libertés, «a décidé que la société ne doit pas décider de ses affaires». «Nous pouvons être différents et travailler pour les mêmes objectifs. Ainsi, on peut défoncer tous les murs qu'ils dressent devant nous», lance-t-il. «Le changement viendra avec la construction d'un rapport de force politique, avec les mouvements sociaux», estime Kamel Aïssat du PST, pour qui les partis politiques ne sont, dans ce combat, qu'un moyen et non une fin. Et pour Mohamed Labdouci, président du bureau régional du RCD, «tout s'arrache, ni concession, ni soumission». Tous les intervenants ont alerté sur le dévoiement de l'idéal d'Octobre 1988, dont les atteintes aux libertés démocratiques sont des exemples répétés 29 ans après «l'ouverture démocratique», une brèche qui se referme.