Saisi hier en référé par Air Algérie, le tribunal de Dar El Beïda a déclaré «illégale» la grève illimitée déclenchée par les travailleurs de la maintenance aéronautique, durant la nuit de mardi à mercredi, à l'issue d'une assemblée générale tenue à l'appel de leur syndicat autonome, le SNTMA (Syndicat national des techniciens de la maintenance aéronautique) pour revendiquer une revalorisation salariale. Une situation qui a lourdement perturbé le programme des vols de la compagnie et provoqué l'installation d'une cellule de crise. Contacté par nos soins, le PDG d'Air Algérie, Bekkhouche Allache, tout en «réitérant» sa volonté de «laisser les portes du dialogue ouvertes», a tenu à mettre en avant «le caractère illégal» de la grève, «lancée sans respect de la loi…». M. Allache a précisé en outre que «les voies du dialogue ont toujours été ouvertes. Nous avions prévu de recevoir aujourd'hui (hier) les représentants syndicaux lors d'une réunion où la question salariale était à l'ordre du jour. Mieux, encore. Ils savent tous que le conseil d'administration doit se réunir le 31 de ce mois pour discuter de cette question. Nous nous sommes donné un peu de temps, jusqu'au 31 décembre prochain, afin d'étudier la situation de l'entreprise et apporter les corrections nécessaires. Mais, contre toute attente, le syndicat de la maintenance décide de manière brutale de déclencher une grève.» Le premier responsable d'Air Algérie a, toutefois, précisé qu'il refuse «catégoriquement d'agir sous la menace. Je ne suis pas de ceux qui disent : ‘‘Après moi le déluge.'' La gestion a ses règles. Je ne peux pas travailler sous la menace. Nous avons essayé de parer à l'urgence en insistant beaucoup sur la ponctualité et la qualité de service de la compagnie dans le but de satisfaire la clientèle et d'en gagner d'autres, en améliorant les prestations. Sachez qu'Air Algérie est l'une des rares entreprises à faire face à 25 concurrents, et pour le seul marché de la France, au moins 7. Le défit est très important». Déclarations contradictoires Interrogé sur la grille des salaires, qui, selon les syndicalistes, consacre la ségrégation, en classant le personnel de la maintenance au bas de l'échelle, alors que sa place est en deuxième position après le PNC (personnel navigant commercial), Bekhouche Allache a répondu : «Il est tout à fait normal que la révision des salaires touche en premier lieu la catégorie professionnelle la plus courtisée par les compagnies aériennes. Mais cela n'a pas empêché les autres catégories de bénéficier de cette revalorisation, même si ce n'est pas dans les mêmes proportions. Je suis un enfant de l'entreprise. C'est Air Algérie qui a fait de moi ce que je suis aujourd'hui. Je le dis en toute humilité. Je vais faire tout ce qui est possible pour la remettre sur les rails.» Abordant les conséquences de la grève sur le programme des vols de la compagnie, le PDG a affirmé que «les perturbations n'étaient pas aussi importantes que le syndicat le présente. D'ailleurs si la grève était aussi suivie, certains n'auraient pas recouru à des actes répréhensibles pour tenter d'empêcher des avions de décoller». De son côté, le représentant du SNMTA a démenti l'information selon laquelle certains grévistes auraient arraché les extincteurs ou les civières des avions pour les empêcher de voler : «Ce n'est pas vrai et je profite de cette occasion pour mettre en garde contre tout incident. Comment peut-on autoriser des vols sans la maintenance ? La question doit être posée à l'administration qui reste l'unique responsable des conséquences d'une telle situation. Nous prenons acte de la décision du juge des référés, que nous respectons, mais ce n'est pas au syndicat de décider s'il faut arrêter ou poursuivre la grève. Le PDG dit que les portes du dialogue sont ouvertes, mais jusqu'à maintenant (fin de journée), personne n'est venu voir les travailleurs. Nous avons notifié la décision du juge à l'assemblée et nous allons attendre sa réponse.» «Injustice» Dans son communiqué, diffusé très tard dans la soirée de mardi, le syndicat a attiré «l'attention» des autorités sur «le non-droit et l'injustice dont fait l'objet la corporation au sein de la compagnie, à travers la violation de la convention collective, notamment en ce qui concerne la hiérarchisation des métiers et des salaires et la ségrégation en tout genre qu'elles soient professionnelles ou sociales, pénalisant le corps de la maintenance». Le syndicat a rappelé, par ailleurs, que sa revendication «n'est pas seulement salariale», parce que pour lui «le plus important est de reconquérir notre place dans l'échelle des valeurs dans la hiérarchisation des salaires de la compagnie. C'est pour cette raison que nous estimons que seul un dialogue franc et honnête pourra résoudre ce problème loin de toute pression ou menace qui ne fera qu'aggraver la situation, étant donné que notre métier ne peut supporter ce genre de contrainte». Toutefois, l'organisation syndicale a exprimé sa disponibilité, mais «avec la contribution indiscutable de tout le personnel de la maintenance», à «relever tous les défis et à ne lésiner sur aucun effort pour valoriser le métier de la maintenance aéronautique». Tard dans la journée d'hier, les travailleurs n'avaient toujours pas pris de décision.