Concernant le Top-Livres, c'est une bien bonne idée, et une louable initiative, mais répond-il à une demande ? Est-ce vraiment une priorité ? Tiendra-t-il la route ? Sera-t-il fiable ? Car à mon humble avis, votre proposition doit être un aboutissement reposant sur une vraie politique du livre que les pouvoirs publics n'ont pas encore vraiment engagée. Ce classement n'aura aucun intérêt ni signification pour le lecteur à cause des difficultés dans lesquelles se débat ce secteur, sans parler des autres aléas comme la disparité des lecteurs, très peu nombreux et confinés dans les villes, de l'offre limitée, de la cherté du livre... en plus de l'environnement où lire est, sans trop exagérer, synonyme de marginalité. Certes, il y a depuis peu une légère amélioration mais cela reste très insuffisant pour prétendre faire un classement des meilleures ventes. Combien de prix littéraires existe-t-il ? Celui des libraires est récemment institué. Dans un pays où le livre est la cinquième roue de la charrette pour nos responsables, il faut d'abord faire prendre conscience aux gens de l'importance, pas du livre, ils le savent, mais de la lecture en la réintroduisant en milieu scolaire tout d'abord, en ouvrant les bibliothèques, etc. Il vaut mieux commencer à encourager la lecture partout. Pourquoi par exemple à votre niveau ne pas penser à publier des romans en feuilleton, d'auteurs algériens ou autres, pourvu qu'ils soient assez captivants. Je suis sûre que cela incitera jeunes et moins jeunes à lire et contribuera, un tant soit peu, à généraliser l'acte de lire, car qu'est-ce qu'un livre sans lecteurs ? Avec le temps, ces lecteurs deviendront des assidus. L'idée d'un Top-Livres pour le moment ne fera pas long feu, c'est ce que je pense sincèrement, puisque vous avez sollicité nos avis ce classement peut se faire sur une année pour connaître les goûts, les préférences et les attentes des lecteurs, et aider éventuellement les professionnels du secteur et leur donner une visibilité pour leurs projets. Bon courage. Mme B. R. Alger Réponse : En annonçant le projet de Top-Livres, nous avons pris la précaution d'en souligner les limites en précisant notamment qu'il ne pouvait être que ce qu'il est, à savoir un classement des meilleures ventes en librairie pour les trois catégories retenues (littérature, essais, beaux livres) et non pas une appréciation de la qualité des ouvrages. Nous disions en substance qu'il existait des best-sellers sans grande consistance comme des chefs-d'œuvre victimes d'échecs commerciaux. Cela est valable partout où ces classements se pratiquent, y compris dans les pays où le livre est soutenu par une politique nationale forte. L'absence de cette dernière dans le nôtre, le manque de promotion en milieu scolaire ou dans la société en général, ne relèvent pas, vous l'admettez, de la responsabilité d'un journal. Doit-on attendre que le livre et l'édition connaissent de meilleurs jours pour informer des flux et tendances des ventes sur leur marché ? Les prix littéraires manquent cruellement en effet mais leur existence foisonnante sous d'autres cieux provoque aussi des débats acharnés. Leur attribution influence les ventes et cela apparaît dans les classements publiés. D'un autre côté, ces classements permettent d'introduire un élément de comparaison, sinon de contradiction, avec les choix des jurys, parfaitement contestable, ce qui est, par ailleurs, naturel dans un univers qui n'a rien d'une science exacte et où les intérêts ne sont pas exclus. Un Top-Livres mensuel ne peut être qu'un indicateur forcément approximatif des tendances dominantes d'achat et non pas de lecture, vous avez raison. Dans notre pays, la circulation élevée des ouvrages en milieu familial ou amical, combinée aux limites des pouvoirs d'achat et sans doute à des relations sociales moins individuelles qu'ailleurs, rend illisible le ratio nombre de lecteurs par ouvrage. Le classement des ventes ne peut être dès lors qu'un instantané dans les conditions assurément exécrables du livre en Algérie. Mais peut-être en raison justement de ces conditions, en avons-nous plus besoin que d'autres. Mesurer l'exécrable est hélas aussi une des missions d'informer. Il reste que ce projet n'est pas notre seule intervention sur le livre que nous défendons avec acharnement et constance (voir ce numéro d'A & L sur la BN et les précédents ainsi que la rubrique culturelle quotidienne). Enfin, nous prenons bonne note de vos idées et propositions. Nous avons lancé la semaine dernière une rubrique qui donnera à lire mensuellement des extraits d'un ouvrage récent de l'édition algérienne. Plusieurs lecteurs nous ont déjà demandé de la rendre hebdomadaire. Alors ? Avec le débat « Top-Livres ou pas Top », nous attendons d'autres réactions sur la périodicité de ces bonnes feuilles. Faites A & L avec nous. Bienvenue sur [email protected].