n En mars 2016, le ministère de l'Intérieur envoie une instruction (n°96) aux élus locaux en les invitant à recenser le patrimoine des communes et mieux l'exploiter afin de renflouer leurs caisses. Une année plus tard, rares sont les communes qui ont établi leur sommier de consistance. Pourtant, M. Bedoui n'a fait que rappeler une disposition (art. 162) déjà prévue dans le code communal. Dépourvus de pouvoir, les élus locaux ne prennent que rarement des initiatives. La plupart se contentent d'exécuter les injonctions qui viennent d'en haut, car ils semblent se complaire dans la politique d'assistanat. Le comble, c'est que même les lois en vigueur encouragent cet état de fait. Aujourd'hui, aucune commune du pays ne dispose de livret foncier des terrains et bâtisses se trouvant sur son territoire. A partir de 2018, aucune opération d'aménagement ou de réhabilitation ne pourra être engagée au niveau d'une quelconque structure, si l'APC ne dispose pas d'un acte de propriété. Les loyers des logements et des locaux commerciaux n'ont jamais été révisés, ni recouvrés. Cédés aux communes en 2016, plus de 60% des locaux du Président sont inexploités. Pis, certaines communes fonctionnent avec des listings de leurs parcs immobiliers qui datent de 1980. «A Boumerdès et partout ailleurs, les locaux de l'APC sont cédés au dinar symbolique. La commune dispose de plus de 100 mda de loyers non recouvrés», a précisé un élu. L'APC a désigné un expert pour identifier ses biens, mais celui-ci a trouvé d'énormes difficultés à accomplir son travail. La commune de Naciria, toujours dans la wilaya de Boumerdès, compte 500 logements au niveau de ses deux villages agricoles. Le prix du loyer est fixé à 40 DA et n'a pas changé depuis 40 ans. Malgré cela, la plupart des locataires refusent de payer. De nombreuses localités ont tenté de louer aux enchères les marchés de Batimetal et les parkings de stationnement, mais leur démarche a buté sur le refus de l'administration, qui a invoqué des décrets qui exigent de les céder gratuitement aux jeunes. C'est le cas dans la commune de Boumerdès, où les élus ont établi une délibération, fin 2016, en exigeant des commerçants de payer les droits de place. Mais la délibération a été rejetée par la daïra au motif que les prix n'étaient pas conformes. Bien d'autres décisions de même nature ont été refusées par l'administration pour des raisons contraires aux orientations du gouvernement. «On nous dit que les droits de place sont exigés pour ceux qui occupent des espaces au niveau des marchés ou des endroits couverts», s'étonne un élu de Naciria. Outre ces problèmes, la quasi-totalité des communes du pays ont perdu de vue la taxe des ordures ménagères et de voirie. «Il y a un marasme social et la plupart des foyers refusent de s'acquitter de ces taxes. En plus, ce sont les trésoriers intercommunaux qui doivent les recouvrer. Mais aucune autorité ne les oblige à le faire. Le recouvrement de ces taxes passe par l'instauration de l'autorité de l'Etat, or les communes n'ont aucune autorité de dissuasion», explique un autre élu. Aujourd'hui, même les directions des Domaines ne jouent pas le jeu. Des centaines de crèches, d'abattoirs et d'autres biens tardent à trouver des adjudicataires en raison des prix exorbitants fixés par les responsables des Domaines. Cela s'applique aussi pour de nombreux marchés hebdomadaires, à l'instar de celui des Issers qui fait rentrer 4 mda par an dans les caisses de l'APC, alors qu'il a été loué auparavant à un privé pour 8 mda. Pour nombre d'élus, l'amélioration des recettes des collectivités locales nécessite la levée des entraves qui empêchent la relance des investissements. «Le droit de jouissance du foncier doit être restitué aux communes. Pour l'agence foncière, nous avons d'énormes atouts à exploiter, notamment dans le domaine du tourisme de montagne. Il y a un investisseur qui a proposé de réaliser une unité de biomasse, un autre a déposé un dossier pour ouvrir une usine de lubrifiants. Il y aussi des jeunes qui veulent créer un village écologique chez nous. On attend le feu vert des services de la wilaya. Or, si nous avions de larges prérogatives, ils seraient déjà lancés», appuie le président de l'APC sortant d'Illoula Oumalou, dans la wilaya de Tizi Ouzou. S'agissant des taxes, il préconise la mise en œuvre d'un système de péréquation en fonction des besoins et des ressources de chaque municipalité.