L'Italie compte reprendre une place stratégique sur le continent africain, laissé trop longtemps à ses rivaux, les Français, mais aussi les Allemands et les Chinois. Face à ces temps de vaches maigres en Europe, les terres africaines redeviennent l'eldorado des investisseurs. Une tournée africaine du président du Conseil italien, Paolo Gentiloni, devrait concrétiser cette ambition, qui coïncide avec la tenue du cinquième Sommet entre l'Union africaine et l'Union européenne (UA-UE), qui s'est ouvert hier, à Abidjan. La délégation italienne, présente à cette réunion internationale, compte apporter sa contribution pour traiter de thèmes cruciaux, comme la paix, la sécurité, la gouvernance, notamment la démocratie, les droits de l'homme, les migrations et la mobilité, l'investissement et le commerce, le développement des compétences, la création d'emplois. Le gouvernement de Gentiloni, et avant lui celui de Renzi, a lancé une véritable offensive diplomatique pour tenter de bousculer les autres pays industrialisés qui ont multiplié leurs investissements en Afrique dans les dernières décennies. Le Premier ministre italien qui était en Tunisie, samedi dernier, s'est entretenu avec le président de ce pays, Béji Caïd Essebsi, et le Premier ministre Youssef Chahed. Qualifiant ce petit pays maghrébin d'«exemple de démocratie régionale», le responsable italien a également rencontré l'envoyé spécial de l'Onu pour la Libye, Ghassam Salamè. L'Italie, premier investisseur européen dans les pays de l'Afrique subsaharienne, avec 12 milliards d'euros, compte augmenter le volume de ses exportations vers ce continent, dans un délai bref. «Nous sommes en train de reconsidérer l'Afrique comme un objectif fondamental de notre politique étrangère et de notre coopération», a confié M. Gentiloni aux hommes d'affaires italiens présents. Après la Tunisie, le Premier ministre italien s'est rendu en Angola, pays qui représente le troisième partenaire subsaharien de l'Italie, après l'Afrique du Sud et le Nigeria. D'importants groupes industriels italiens comme Eni, Saipem et Trevi sont présents en Angola, avec qui la péninsule entretient des échanges commerciaux pour un volume de 600 millions d'euros. Par ailleurs, le responsable italien a annoncé la signature de deux nouveaux accords entre Eni et le groupe pétrolier angolais Sonangol. Le Ghana, un autre pays africain où Eni est également présent et les exportations italiennes vers ce pays ont connu une hausse de 30% en deux ans. Au total, l'Italie enregistre 34 milliards d'euros, de volume d'échanges avec le continent africain, région du monde qui a été boudée par les précédents gouvernements de Rome, surtout de Silvio Berlusconi, qui avait focalisé l'investissement italien en direction de la Russie et des ex-Républiques soviétiques. Mais les récents Exécutifs, de centre gauche, et après que l'Italie ait pu décrocher un siège de membre non permanent au Conseil de sécurité de l'Onu, grâce au vote des pays africains, ont redécouvert l'importance de ce partenaire et ses énormes potentialités. Et les arrivées régulières sur les côtes italiennes de réfugiés provenant de ces pays inquiètent beaucoup les autorités italiennes, qui voudraient gérer ce phénomène en multipliant leurs alliés sur place. Ce ne sera pas une sinécure, surtout que le récent accord signé avec la Libye et qui, si d'un côté il a réduit le nombre de débarquements sur le littoral italien, a par ailleurs, attiré de virulentes critiques au gouvernement italien accusé par les organisations de défense des droits de l'homme d'avoir «abandonné des personnes vulnérables et désespérées dans les mains des geôliers libyens».