La marche à laquelle ont appelé des étudiants de l'université Akli Mohand Oulhadj de Bouira, mobilisés contre le rejet d'une proposition d'amendement au profit de la langue amazighe par la commission juridique de l'APN, a tourné, hier, à l'émeute. En effet, les éléments antiémeute de la police, déployées en nombre important, ont utilisé la force pour empêcher les étudiants de marcher depuis l'enceinte universitaire au siège de la wilaya. Des affrontements entre les manifestants et les policiers ont duré plusieurs heures. Empêchés par le dispositif sécuritaire qui a quadrillé le campus universitaire, les étudiants ont été bousculés et repoussés à coups de matraque. Des pierres ont été lancées en direction des policiers qui ont répliqué de la même façon. Plusieurs blessés parmi les étudiants sont à déplorer, a-t-on constaté sur place. Aux jets de pierres des policiers «zélés», les manifestants répliquent par : «Ma ulach tamazight, ulach, ulach…!» Des bombes lacrymogènes auraient aussi été utilisées, selon des marcheurs qui ont dénoncé le recours à la répression pour interdire une manifestation pacifique. «Nous avons expliqué aux responsables de la police que la marche est pacifique et elle ne sortira pas de son cadre initial», a-t-on regretté. Selon des sources, c'est le wali de Bouira, Mustapha Limani, qui aurait instruit les forces de police d'interdire aux étudiants de marcher dans les rues du chef-lieu de wilaya. Un climat de tension a régné aussi à l'extérieur du campus, où plusieurs personnes ont été fouillées et embarquées dans des fourgons de police vers le commissariat central. Des lycéens venus marcher avec les étudiants auraient été chassés à coups de matraque par les éléments des forces antiémeute. «C'est regrettable. Même les lycéens n'ont pas été épargnés», a-t-on regretté. Tout mouvement de foule a été systématiquement dispersé. Selon une source sécuritaire, une vingtaine de manifestants ont été arrêtés. Par ailleurs, la grève, enclenchée par les lycéens en début de semaine en cours, se poursuit dans la wilaya de Bouira. Plusieurs établissements scolaires implantés dans des communes de l'est de la wilaya ont été paralysés par la grève. A M'chedallah, 45 km à l'est de Bouira, les lycéens et même des élèves du cycle moyen n'ont pas rejoint leurs établissements, a-t-on appris de sources locales. Des renforts des forces antiémeute ont été déployés à travers plusieurs quartiers de la ville de Bouira, ainsi que dans les chefs-lieux d'autres communes. Une centaine d'étudiants ont forcé le cordon de sécurité et décidé de bloquer la route à proximité du siège de la cour. «Libérez nos étudiants. Assa azeka tamazight tella tella !» ont-ils scandé. Le président de l'APW de Bouira, Ahmed Boutata, qui s'est rendu sur place, a rassuré les manifestants qu'aucune poursuite judiciaire ne sera engagée contre les personnes arrêtées, appelant les manifestants au calme et à libérer les lieux. Les étudiants arrêtés ont tous été libérés, mais la situation risque de dégénérer dès lors que les manifestants campent toujours sur leur position : marcher dans les rues pour tamazight.