Assa, Azeka tamazight tella tella ! (Aujourd'hui, demain, tamazight existera toujours…») Tel est le slogan que scandait à vive voix par une septuagénaire marquant une «halte», hier, à proximité de la gare routière où des étudiants, plus de 300 personnes, se sont rassemblés à l'appel du collectif des étudiants libres de l'université Akli Mohand Oulhadj de Bouira, réclamant à la réouverture du campus. Dès 10h, les manifestants commencent à former le premier carré. Une banderole géante a été brandie sur laquelle est écrit : «Abolition des organisations satellites, Onea et Ugel». D'autres, munis de pancartes sur lesquelles ont pouvait lire : «Non à la loi de finances. Halte à la répression. Le peuple ne sera jamais vaincu». Les forces antiémeute déployées sur place ont encerclé les manifestants pourtant bien organisés. Portant des dossards, une dizaine d'étudiants voulaient signifier aux policiers que la marche est pacifique et qu'«elle ne sortira pas de son cadre initial». Les premiers renforts de la police antiémeute arrivent. La tension monte d'un cran. La circulation automobile a été rapidement déviée. D'autres policiers en civil encerclent la foule. Le rassemblement n'a pas duré longtemps. Les services de police ont usé de leurs matraques pour disperser les manifestants. Ordre a été donné pour réprimer la manifestation. Une trentaine d'étudiants ont été violemment interpellés et emmenés dans des fourgons vers le commissariat central, a-t-on constaté. Refoulés par les agents de police, une dizaine de marcheurs ont tenté de bloquer la circulation sur l'autoroute. Les éléments de la Gendarmerie nationale, déployés le long du tronçon autoroutier, ont réussi à convaincre les manifestants de libérer les lieux. La vague d'arrestations entamée par la police s'est poursuivie durant toute la journée d'hier . D'autres manifestants ont été interpellés à différents endroits de la ville de Bouira. Des membres du collectif libre des étudiants du campus de Bouira, qui se sont déplacés hier en fin d'après-midi à notre rédaction, ont condamné «la répression féroce qu'ont subie les manifestants ces derniers jours». Ils ont dénoncé la décision qualifiée d'arbitraire du conseil scientifique de fermer les portes de l'université et exigent la réouverture immédiate de l'infrastructure. Par ailleurs, l'ensemble des établissements scolaires de la wilaya de Bouira demeurent toujours paralysés par la grève entamée depuis plus d'une semaine. Le climat reste toujours tendu. Les pouvoirs publics, à leur tête le wali de Bouira, sont appelés à ouvrir la voie au dialogue dès lors que l'usage de la matraque n'a jamais été une solution. En fin d'après-midi, des jeunes, réclamant la libération des personnes arrêtées et s'élevant contre la décision des pouvoirs publics d'interdire toute marche au chef-lieu de wilaya, ont procédé à la fermeture du tronçon autoroutier à l'aide de pneus brûlés, de troncs d'arbres et autres objets hétéroclites. Des barricades ont été érigées à hauteur des villes d'El Esnam et d'El Adjiba, paralysant la circulation automobile. Le député de Béjaïa du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), Athmane Mazouz, s'est déplacé en fin de journée à Bouira, où il s'est rendu au commissariat central pour s'enquérir de l'état des personnes arrêtées et réclamer leur libération. Joint par téléphone, Athmane Mazouz s'est dit stupéfait du comportement d'un haut responsable de la police qui, selon lui, ignore «la qualité et le mandat d'un député». «Au commissariat, j'ai constaté que les personnes arrêtées ont été tabassées et maltraitées. Je dénonce le sort qui leur a été réservé et j'ai réclamé leur libération immédiate», a-t-il dit. Le P/APW de Bouira ainsi que le député Mohamed Bouha ont rassuré que toutes les personnes arrêtées seront relâchées.