L'industrie pharmaceutique algérienne fait partie des trois secteurs industriels ciblés par la France pour y investir. Pour ce faire, un certain nombre de préoccupations liées aux aspects réglementaires et administratifs ont été émises par la partie française. En effet, un comité d'opérateurs économiques dans ce secteur sera incessamment installé suite à la signature du mémorandum de partenariat et de développement, lundi, entre le ministre des Finances, Mourad Medelci, et son homologue Thierry Breton. Ce comité aura pour mission de chapeauter et d'aider à la réalisation des projets industriels dans le domaine du médicament à travers le soutien des deux gouvernements. La réalisation de ces projets ne peut se faire « sans l'amélioration de la visibilité de l'environnement économique, juridique et administratif du médicament », précise le document élaboré par la mission économique de l'ambassade de France portant sur les étapes du développement d'une filière pharmaceutique en Algérie et qui a fait l'objet d'une réunion de travail au niveau du ministère des Finances, quelques jours avant l'arrivée de Thierry Breton. Ce qui doit se traduire, entre autres, par la clarification de la politique du prix, le remboursement, les tarifs de référence, le développement d'une politique de qualité de haut niveau pour le médicament et l'amélioration de la protection de la propriété intellectuelle, en particulier la protection des données. Les rédacteurs de ce document regrettent qu'« aucun texte, législatif ou administratif, ne prévoit de protection des données ». Ce qui devient, pour les opérateurs français, « une situation préoccupante, compte tenu du développement récent des capacités techniques des opérateurs algériens, dont certains sont aujourd'hui en mesure de copier des médicaments techniquement plus complexes brevetés ». Devant cette situation, la partie française demande aux autorités algériennes d'adopter une protection des données des dossiers d'AMM et d'accompagner l'adoption de cette protection par « la mise en place d'une période transitoire qui permettrait au minimum un gel de la situation actuelle et si possible une rétroactivité sur une période dont la durée est à définir ». Le rapport de la mission économique relève que les structures des unités de fabrication à capitaux essentiellement étatiques du type Saidal « ne permettent pas d'assurer un niveau de qualité aux normes internationales ni une rentabilité suffisante ». S'agissant des unités de fabrication mises en place par des opérateurs privés locaux, la mission économique a signalé que ces unités créées par d'anciens importateurs ont été souvent réalisées avec des moyens limités. « Elles ne correspondent pas, pour la plupart, aux normes internationales et ne peuvent donc pas servir de base à l'industrie locale moderne souhaitée par les autorités algériennes », affirme-t-on. Comment expliquer alors que plus d'une trentaine de produits sont déjà fabriqués par des entreprises algériennes, dont certains appartiennent à des laboratoires français ? Comment se fait-il que le groupe pharmaceutique Saidal fabrique des médicaments connus (Maalox, Rovamycine et Toplexil, etc.) au compte de ces mêmes laboratoires ? Le développement de la filière pharmaceutique en Algérie doit alors passer, en premier lieu, selon le document, par le renforcement de la présence des laboratoires étrangers par l'ouverture plus systématique de bureaux de représentation, le développement d'un partenariat avec un opérateur local et la création de nouvelles unités de production. Ces deux dernières exigences ne semblent pas réalisables puisque le document précise que « le préalable à tout accord est la possibilité de trouver un partenaire possédant un site de fabrication aux normes internationales, avec un personnel qualifié et des procédures de qualité fiables ; et il convient de souligner que l'offre algérienne est encore très faible, ce qui représente un obstacle à la collaboration avec des firmes étrangères », indique-t-on. Pourtant, des projets de partenariat ont été signés par le passé entre le groupe Saidal et les laboratoires français (Solvay Pharma et Sanofi Aventis avec pour ce dernier des parts de marché de 70%). Concernant la création de nouvelles unités de production, les opérateurs français ne plaident pas pour de nouveaux investissements, mais pour une « optimisation du fonctionnement des unités existantes. Toutefois, la création de nouvelles unités à haute valeur ajoutée dans des domaines spécifiques, comme la production de protéines thérapeutiques, de sérums, de vaccins, pourrait tout à fait être justifiée dans la mesure où leurs productions pourraient être écoulées au niveau régional ». Cela prouve en fait, selon les observateurs, que les opérateurs français n'ont pas pour projet d'investir, mais qu'ils voient ce pays plutôt comme un débouché à leurs produits et entretenir des parts de marché qui pèsent, aujourd'hui, 700 millions d'euros.