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Le caractère de crime d'Etat bientôt reconnu ?
Assassinat de Maurice Audin par l'armée française
Publié dans El Watan le 06 - 02 - 2018

L'assassinat de Maurice Audin par l'armée française, en juin 1957, est en passe d'être reconnu comme un crime d'Etat par le président français, Emmanuel Macron.
C'est ce qu'a dit, à demi-mot, Cédric Villani, député de La République en marche (LREM), intervenant samedi dernier lors d'une rencontre en hommage au mathématicien et martyr algérien, organisée dans le cadre du Maghreb-Orient des livres 2018. «J'ai eu l'occasion de m'entretenir longuement avec le président de la République lors de sa visite en Chine (8-10 janvier 2018, ndlr) sur l'affaire Maurice Audin.
Il m'a affirmé qu'après toutes les recherches faites à ce sujet, l'Etat ne connaît toujours pas le contexte exact de sa mort. Mais il compte exprimer sa conviction qu'Audin a été assassiné par l'armée française», a déclaré M. Villani. Le mathématicien, ayant reçu la médaille Fields 2010, et ami de longue date de M. Macron, explique que celui-ci va aller plus loin que son prédécesseur, François Hollande, «qui a admis (le 18 juin 2014, ndlr) qu'‘‘Audin ne s'est pas évadé.
Il est mort durant sa détention'', sans en dire plus». Le conférencier a précisé néanmoins que «l'Etat français ne va plus imposer sa façon d'écrire l'histoire. Toutes les archives liées à cette affaire seront ouvertes et le resteront afin que les historiens puissent y accéder et faire leur travail». Relancé par El Watan afin d'avoir plus de précisions sur ce que compte faire le président français et quand, M. Villani a répondu que «le travail d'instruction du dossier est en cours mais la forme de ce qu'il va dire ou faire n'est pas encore définie.
Il ne faut pas être impatient». Ce à quoi Nathalie Funès, journaliste et modératrice de la conférence, a répliqué qu'il y a, au contraire, urgence à traiter cette question. Et pour cause, les archives risquent de ne rien révéler d'important sur cette affaire. «Il faut donc essayer de trouver rapidement un moyen de libérer la parole au niveau de l'armée, afin que les derniers acteurs encore vivants apportent leurs témoignages sur cette affaire», a-t-elle suggéré.
En plus de Michèle Audin, qui a présenté brièvement la biographie de son défunt père, le professeur Aïssa Kadri était invité à donner un aperçu sur les travaux universitaires sur l'affaire Audin. «La vérité historique sur son assassinat sera un moment fort, un moment-clé dans le dépassement des blocages et un pas dans la reconstruction de relations franco-algériennes apaisées», a-t-il lancé d'emblée. Selon lui, «sur le plan historique, on ne sait pas grand-chose. Seulement des témoignages, toutefois de première main».
Dans ce registre, et à l'occasion de la sortie de son livre La vérité sur la mort de Maurice Audin (Editions des Equateurs, 2014), le journaliste Jean-Charles Deniau confia un enregistrement exclusif à l'émission «Le Grand Soir 3» (France 3), diffusée le 8 janvier 2014, où le général Paul Aussaresses avoue : «On a tué Audin, voilà ! On l'a tué au couteau… pour faire croire que ce sont les Arabes qui l'avaient tué. Qui avait décidé de ça ? C'est moi. Ça vous va ?!» Dans son enquête, Deniau affirme qu'en respectant la chaîne de commandement de l'époque, en pleine Bataille d'Alger, le premier responsable de la mort de Maurice Audin serait le général Jacques Massu, puisque Aussaresses travaillait sous ses ordres.
Ce dernier, alors qu'il était devenu le plus proche collaborateur de Massu au début de 1957, avait donné l'ordre de torturer et d'exécuter Larbi Ben M'hidi et Ali Boumendjel. Pour rester sur le cas Audin, Nathalie Funès a révélé que le colonel Yves Godard a écrit dans des carnets, déposés à l'université de Stanford (Californie), qu'il a été tué «sur ordre» par Gérard Garcet. Ce sous-lieutenant du 6e RPC (Régiment de parachutistes coloniaux) était l'officier d'ordonnance de Massu.
Par ailleurs, Aïssa Kadri cite le livre Alger-Eté 1957. Une victoire sur le terrorisme (L'Harmattan, 2002) du général Maurice Schmitt, proche de Massu, qui était en service à Alger à partir de septembre 1957. On peut y lire : «Il est clair que Boumendjel, Maurice Audin et Larbi Ben M'hidi auraient dû être traduits devant un tribunal.» Ces témoignages d'acteurs importants du conflit permettent d'établir qu'Audin a été, sans aucun doute, exécuté durant sa détention d'une manière extrajudiciaire par l'armée française.
Pour Kadri, au-delà de l'Affaire Audin, «il est très important de lever toutes les restrictions et faciliter l'accès aux archives militaires qui sont primordiales pour l'écriture de l'histoire, notamment en ce qui concerne la torture et les disparitions forcées incombées à l'armée française durant la Guerre de Libération algérienne». Il rappelle que des milliers de «suspects» ont été arrêtés et interrogés dans des camps d'internement, appelés centres de triage et de transit (CTT).
Entre 1954 et 1962, il y en avait près de 200, répartis sur le territoire algérien et rattachés directement aux quatre corps d'armée (Alger, Constantine, Oran, territoires du Sud). Beaucoup d'entre eux ne sont plus jamais rentrés chez eux. «Uniquement en 1957, durant la Bataille d'Alger, il y a eu entre 3000 à 3200 disparus algériens, dont Audin, le 11 juin. Le lendemain, c'est au tour d'Henri Alleg d'être arrêté, torturé par des parachutistes au CTT d'El Biar, où il resta interné près d'un mois.
Or, dans son ouvrage La Question, Alleg évoque ‘‘une longue rafale de mitraillette'' qu'il entend alors qu'il s'apprête à quitter le lieu. Il pense qu'il s'agissait de son ami Maurice Audin sans en avoir la confirmation», précise encore M. Kadri. Plusieurs sources historiques considèrent que le CTT d'El Biar, resté quasi clandestin jusqu'à décembre 1957, servait vraisemblablement de centre d'interrogatoires et de tortures.
Que l'Etat français décide de régler cette affaire permettra non seulement de rendre justice à Maurice Audin, à sa veuve Josette et ses enfants, Michèle et Pierre, mais aussi aux milliers de disparus algériens et français qui ont subi le même sort que lui. Ce sera aussi un pas de plus vers la réconciliation des mémoires entre la France et l'Algérie, qui semble enfin possible, près de 60 ans après l'indépendance algérienne.


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