La situation se complique pour le chef de l'Etat sud-africain du fait qu'il n'y a pas que l'ANC qui réclame sa tête. Les députés sud-africains sont aussi appelés à se prononcer le 22 février sur une nouvelle motion de défiance le visant. Eclaboussé par d'innombrables scandales financiers, les jours de Jacob Zuma en qualité de président de l'Afrique du Sud semblent comptés. Le Comité national exécutif (NEC), la plus haute instance décisionnaire du Congrès national africain (ANC), aura à se prononcer aujourd'hui sur son cas. Selon des indiscrétions, la balance penche en effet en sa défaveur. «Nous espérons qu'une position sur ce sujet (le devenir de Jacob Zuma) se dégagera à l'occasion (de la réunion) du NEC», a indiqué hier la secrétaire générale adjointe du parti, Jessie Duarte. Cette instance «peut décider de rappeler n'importe qui de ses employés, y compris le président de la République», a-t-elle assené. La réunion du NEC qui se tiendra au Cap, siège du Parlement, apparaît tellement cruciale que Jacob Zuma a dû reporter son discours annuel sur l'état du pays, prévu demain devant le Parlement. A quoi aurait-il servi de le maintenir sachant en effet qu'il n'est plus sûr de rester Président ? Des partisans du nouveau chef de l'ANC, Cyril Ramaphosa, élu en décembre, font pression depuis quelques jours déjà pour obtenir au plus vite le départ du président Zuma. Pour eux, il compromet l'avenir politique du parti. L'ANC domine la vie politique sud-africaine depuis la chute de l'apartheid et l'arrivée au pouvoir de Nelson Mandela, à l'issue des premières élections libres de l'histoire du pays en 1994. Mais il est aujourd'hui en sérieuse perte de vitesse, affaibli par une crise économique persistante, caractérisée par un taux de chômage record de plus de 27% et les multiples accusations de corruption qui visent Jacob Zuma que la presse accuse d'être l'homme de paille de grands industriels. «La frustration de millions de Sud-Africains noirs laissés pour compte est telle que l'ANC pourrait effectivement perdre en 2019 sa majorité absolue. Le parti a déjà subi l'an dernier un revers électoral retentissant en perdant le contrôle de villes telles que Johannesburg et Pretoria. Du jamais vu depuis 1994. Aujourd'hui, il s'agit pour la nouvelle direction de l'ANC de limiter les dégâts et de remobiliser ses troupes. C'est la raison pour laquelle Ramaphosa et ses partisans cherchent à tourner la page Zuma au plus vite», confie à El Watan Mathatha, un journaliste sud-africain. Les partisans du chef de l'Etat estiment à l'inverse qu'il doit terminer son second mandat, qui expire en 2019. Bras de fer à l'ANC Certains signes montrent néanmoins que les partisans de Cyril Ramaphosa ont de grandes chances de remporter le bras de fer qui les oppose aux pro-Zuma. Mais ils ne désespèrent pas de parvenir à convaincre Zuma de démissionner de son propre chef afin de lui éviter l'humiliation d'un éventuel renvoi. A ce propos, l'exécutif de l'ANC s'est rendu dimanche à la résidence officielle du chef de l'Etat sud-africain à Pretoria pour, selon le n°3 du parti, Gwede Mantashe, parler de «ce qui est dans le meilleur intérêt de l'ANC et du pays». D'après la presse locale, rien n'a filtré officiellement de ces discussions. Mais, selon Julius Malema, chef des Combattants pour la liberté économique (EFF, gauche radicale), un ancien de l'ANC que l'on dit «très bien informé de ses débats internes», le président Zuma aurait «refusé de démissionner». Il a estimé qu'il «n'avait rien fait de mal» qui justifierait son départ anticipé. Il ne laisse donc d'autre choix à ses camarades de l'ANC que de le renvoyer. Jacob Zuma, que les médias sud-africains surnomment «le président aux neuf vies» en raison de sa capacité à survivre à tous les scandales, a perdu beaucoup de son influence depuis l'élection de Cyril Ramaphosa à la tête de l'ANC. Il n'a même jamais été aussi vulnérable. Aussi, il est peu probable qu'il puisse parvenir cette fois à sortir indemne de cette mauvaise passe. La situation se complique davantage pour lui du fait qu'il n'y a pas qu'à l'ANC qu'il a des problèmes. Jacob Zuma est pratiquement cerné de toutes parts. Les députés sud-africains sont appelés en effet à se prononcer aussi, le 22 février, sur une nouvelle motion de défiance le visant. Cela fait d'ailleurs dire à de nombreux Sud-Africains que les carottes sont cuites pour lui.