Le gouvernement de transition somalien, appuyé par l'armée éthiopienne, a pris le dessus sur les miliciens islamiques après une semaine de combats et promis hier l'amnistie à ceux qui déposeraient les armes. Les combattants des tribunaux islamiques ont reconnu avoir cédé du terrain, mais assurent qu'il s'agit d'un repli tactique et promis une guerre d'usure, pour confronter l'armée régulière éthiopienne qui opère ouvertement en Somalie. Selon des habitants et des responsables islamistes, les miliciens ont abandonné leurs positions autour de Baïdoa (250 km au nord-ouest de Mogadiscio), siège des institutions de transition somaliennes et objectif proclamé des forces islamiques. Ils se sont également retirés de Dinsoor (120 km au sud-ouest de Baïdoa) et de Burhakaba (60 km au sud-est de Baïdoa). Le chef de l'exécutif du Conseil suprême islamique de Somalie (SICS), cheikh Sharif Sheik Ahmed a expliqué hier que les islamistes avaient « changé de tactique militaire » et étaient prêts à « mener une guerre de longue haleine avec l'Ethiopie ». Ce retrait intervient après l'entrée en action lundi de l'aviation éthiopienne, qui a notamment bombardé l'aéroport de Mogadiscio tenu par les combattants des tribunaux islamiques depuis la chute, en juin, de la capitale somalienne entre leurs mains. « L'ennemi a commencé à utiliser de l'aviation. Comme nous n'avons pas d'armement lourd contre cette attaque à grande échelle des forces (du Premier ministre éthiopien), Meles Zenawi, nous avons décidé de changer nos tactiques », a assuré le dirigeant islamiste. Le gouvernement éthiopien, qui a officialisé dimanche sa participation à ces combats, a revendiqué hier la prise de six localités, selon un communiqué du ministère de l'Information éthiopien. Addis-Abeba voit avec hostilité la montée de l'influence islamiste en Somalie, qu'elle associe au terrorisme et se considère en état de légitime défense dans ce conflit. Elle se dit également dans son droit en soutenant le gouvernement transitoire somalien mis en place par la communauté internationale. Selon le communiqué, l'armée éthiopienne « encercle » également la ville de Dinsoor et avance « pour contrôler Bulo, Borde et Jowhar ». Le ministère, qui affirme que le camp islamiste a subi « de lourdes pertes humaines et matérielles », prévient que l'aviation éthiopienne « va intensifier ses frappes » en territoire somalien. Le gouvernement de transition somalien s'est, pour sa part, déclaré hier prêt à accorder une « amnistie totale » aux combattants des tribunaux islamiques, les appelant à déposer les armes. Ces revers pour les combattants islamistes interviennent après plusieurs mois d'une poussée progressive qui leur a permis de prendre le contrôle de la majorité du centre et du sud de la Somalie, un pays en guerre civile depuis 1991. Les institutions de transition somaliennes, mises en place en 2004, se sont avérées incapables, selon les observateurs, de rétablir l'ordre dans le pays face à la montée en puissance, depuis 2006, des islamistes. Les affrontements, qui se déroulent depuis le 20 décembre, risquent de déstabiliser davantage la Corne de l'Afrique, région stratégique notamment dans la lutte contre le terrorisme international. Lundi, l'Union africaine (UA) a condamné « l'escalade dans la crise » en Somalie et décidé d'organiser une « réunion de concertation mercredi à Addis-Abeba avec la Ligue arabe et l'Igad (l'Autorité intergouvernementale de développement - 7 pays d'Afrique de l'Est) ». L'intervention de l'armée éthiopienne, qui bénéficie de l'appui des Etats-Unis, fait craindre dorénavant une extension des combats dans cette zone fragile de l'Afrique de l'Est. L'Erythrée, qui a un différend frontalier avec l'Ethiopie depuis des années, est soupçonnée de soutenir et d'armer les combattants islamiques. Washington accuse ces derniers d'être liés à l'organisation terroriste Al Qaïda, ce qu'ils démentent.