Quarante mille habitants, une plaine agricole où les agrumes dominent et une importance de la vocation classant la commune parmi les plus importantes de la wilaya, tout comme la situation géographique, faisant d'elle une place stratégique à la croisée des routes de l'Est, de l'Ouest, du Nord et du Sud du pays. Cette vocation agricole lui interdira quelque peu le dégagement d'assiettes pour la construction de logements ou d'équipements. Aussi, il est rare d'entendre parler de réservation de logements sociaux et quand c'est le cas, nombre de familles originaires de la région espèrent. Encore une fois cette année, les espoirs ont fondu à la découverte de la liste des bénéficiaires des 100 logements prêts à la distribution : nombre de noms sont inconnus de la localité et certains habitants ont réussi à prouver que des bénéficiaires ne résident pas dans la commune, tout comme d'autres sont célibataires et jeunes : deux critères éliminatoires dans une région qui a longuement pâti du déficit en logements sociaux. Cherchant à connaître les raisons du mécontentement, la tentative d'approcher le chef de la daïra de Oued El Alleug demeurera vaine malgré l'établissement d'un rendez-vous. De guerre lasse, on tente d'approcher le P/APC, élu de la population. Là encore, il sera sera répondu qu'il était occupé ! Un élu passant dans les couloirs cherchera, lui, à s'esquiver en jurant qu'il n'a jamais été concerné par la commission d'attribution des logements et qu'il n'avait aucun avis à donner. Un citoyen, témoin de la scène, assènera en sa présence : « C'est le carnaval fi dechra ici ! » « Neuf années de veuvage et mon nom a été enlevé de la liste des bénéficiaires de logements en 2003, et je continue à être un poids pour ma famille. » C'est le cri de colère d'une des nombreuses postulantes au logement social dans cette commune de Oued El Alleug. Il n'a pas suffi que le terrorisme lui prenne son mari : elle aura à partager un trois pièces avec 24 membres de trois ménages vivant dans la même maison familiale. Une autre femme, mère de trois enfants et veuve depuis onze années, ne pouvait plus se taire : « Où vais-je mettre la petite famille de mon fils aîné qui veut se marier ? Je partage une chambre avec mes trois enfants dans un F3 occupé également avec une autre famille ? » Il est dit comme une fierté que « la population de la commune de Oued El Alleug est mûre, tranquille, civilisée, docile ». « Il vaut mieux dire qu'elle sait courber l'échine devant l'injustice et le pouvoir », dira un quadragénaire qui semble accepter son mauvais sort.