Fils d'un ancien ministre du temps de Ben Bella, Abdelmoumen Khalifa, le grand absent du procès qui s'ouvre aujourd'hui au tribunal criminel de Blida, a commencé dans le commerce des médicaments au début des années 1990, pour construire un empire financier alors qu'il n'avait que 36 ans. Un empire qui s'écroula comme un château de cartes en 2003, après 4 ans d'existence. Du golden boy milliardaire, s'affichant à côté du Président et décoré publiquement en 2002 par le président de l'APN, Karim Younès, après avoir été élu homme de l'année, Abdelmoumen se transforme en un délinquant au col blanc recherché par les polices du monde entier, en vertu d'un mandat d'arrêt diffusé par Interpol. L'histoire de son groupe reste une intrigue pour l'opinion publique. Celle-ci ne connaît pas encore les raisons pour lesquelles Moumen a divorcé d'un système qui l'a hissé au plus haut de la pyramide. Il est important de noter que Abdelmoumen a entamé son ascension dès 1998 après la création de la banque Khalifa, renflouée avec les fonds publics des entreprises étatiques. Grâce à cette manne, il crée la compagnie aérienne Khalifa Airways, moins d'une année plus tard. Il obtient alors l'autorisation de s'implanter sur les aéroports français et son nom brille désormais sur les maillots des joueurs de l'Olympique de Marseille, dont il devient l'un des sponsors. Disposant de capitaux considérables constitués surtout de fonds des entreprises publiques déposés dans sa banque, Khalifa poursuit sa montée fulgurante en créant en France une société de location de voitures de luxe Khalifa Rent a Car et une chaîne de télévision, Khalifa TV. Celle-ci émet vers le Maghreb depuis le studio loué à TF1 et rassemble le gratin de la jet-set. Rafik Khalifa, au summum de sa puissance, achète un ensemble immobilier à Cannes, composé de trois villas, d'une surface habitable de 5000 m2, avec deux piscines intérieures et deux extérieures au prix de 37 millions d'euros. La résidence sert aux somptueuses réceptions qu'il organise et auxquelles est conviée la crème de la culture, du cinéma, du sport et de la politique. La gestion très controversée du groupe mène à une accumulation des dettes. La décision de bloquer les mouvements de capitaux de Khalifa Bank, prise le 27 novembre 2002, va mettre à nu la véritable assise du groupe. Il s'écroule comme un château de sable. La liquidation judiciaire est décidée. Khalifa tente alors de récupérer les fonds à travers la vente de certains de ses biens acquis, dont quelque 200 voitures de luxe : Maserati, Ferrari, Mercedes, Jaguar, etc., de son entreprise de location. Le 25 juin 2003 et après l'arrestation de ses trois plus proches collaborateurs à l'aéroport d'Alger, le 24 février 2003 avec une somme de 2 millions d'euros et des traveller's chèques, il vend sa résidence à Cannes pour 16 millions d'euros. Des transactions qui éveillent les soupçons du fisc français qui voit là une opération de blanchiment. Dans le rapport établi par le Tracfin, la cellule chargée de la lutte contre la criminalité financière, il est fait état de plus de 50 millions d'euros transférés de Khalifa Bank, à Alger, vers des comptes bancaires privés à São Paulo, et dans celui de Khalifa Airways. Deux informations judiciaires, l'une pour blanchiment et l'autre pour abus de biens sociaux et banqueroute frauduleusement, ont été ouvertes par la justice française. Pendant ce temps, Khalifa échappe à la justice algérienne et française en s'installant en Grande-Bretagne, terre d'asile de nombreux délinquants financiers, faute de convention d'extradition, notamment avec l'Algérie. Les autorités algériennes se disent confiantes et que les négociations sont, selon elles, en bonne voie. Pourtant des sources proches de Moumen affirment que cette extradition ne pourra jamais avoir lieu, parce que l'ex-milliardaire aurait tout simplement bénéficié du statut de réfugié politique.