En allusion à des propositions israéliennes de créer un Etat palestinien avec des frontières provisoires avant de parvenir à un règlement final, le président palestinien Mahmoud Abbas a affirmé dimanche à la secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, le refus des Palestiniens de toute solution temporaire du conflit proche-oriental. Dans une conférence de presse conjointe avec Rice à Ramallah, en Cisjordanie occupée, Abbas a déclaré : « Je suis opposé à des solutions temporaires, y compris un Etat avec des frontières temporaires, car je ne pense pas que ce soit un choix réaliste sur lequel on puisse bâtir un règlement ». D'un côté cette déclaration confirme la profondeur des divergences avec la direction américaine, car la secrétaire d'Etat américaine, qui reconnaît ne pas avoir de propositions concrète à présenter aux Palestiniens, se suffit, généralement, d'adopter les positions israéliennes, d'un autre côte, c'est un signe que désormais, ils ont retenu les leçons des accords d'Oslo dans lesquels toutes les solutions étaient temporaires, ce qui a donné lieu à un véritable fiasco. Ces accords prévoyaient la création d'un Etat palestinien au bout de cinq ans, mais plus de 13 ans après la signature sous les auspices de l'ancien président américain Bill Clinton dans la Maison-Blanche, la cause palestinienne ne fait que reculer. L'Etat palestinien n'a pas vu le jour. La colonisation dans les territoires s'est accentuée. Israël poursuit la construction du mur de séparation qui découpe la Cisjordanie en bantoustans isolés, confisque près de 50% de ce territoire et qui risque de devenir la frontière future de l'Etat palestinien. Les multiples visites de l'hôte du président Abbas n'ont jamais fait avancer le processus de paix paralysé depuis de longues années. Cette fois, elle tient les mêmes propos en confirmant que les Etats-Unis étaient « absolument engagés à favoriser une solution » au conflit et « profondément engagés dans les efforts visant à trouver les moyens d'accélérer les progrès de la Feuille de route. » Israël a tué dans l'œuf ce plan de paix élaboré en 2003 par le Quartette (Etats-Unis, Union européenne, Russie et onu), qui prévoyait la création d'un Etat palestinien indépendant et viable en l'an 2005. Le président Abbas a appelé Israël « à mettre fin à ses activités d'occupation, à relâcher nos prisonniers et à mettre un terme aux punitions collectives, comme son dernier raid à Ramallah », début janvier. Il a indiqué que les Palestiniens étaient engagés à préserver un cessez-le-feu dans la bande de Ghaza, conclu le 26 novembre entre les mouvements armés palestiniens et Israël. « Nous déploierons tous les efforts possibles pour imposer la loi et l'ordre et pour renforcer nos services de sécurité », a-t-il assuré, alors que l'Administration américaine cherche à obtenir l'approbation du Congrès pour 86 millions de dollars d'aide militaire destinée à ses forces de sécurité. Comme c'est souvent le cas, les promesses ne sont jamais entièrement tenues, ce qui donne l'occasion à ses détracteurs de le fustiger au niveau de l'opinion publique palestinienne en le présentant comme étant l'ami de ceux qui sont responsables de toutes les misères faites au peuple. Pour preuve, le Premier ministre israélien Ehoud Olmert, qui a rencontré le président Abbas quelques jours avant l'Aïd El Adha, n'a tenu aucune de ses promesses, comme la libération de prisonniers, la levée des barrages militaires qui découpent la Cisjordanie occupée et empoisonnent quotidiennement la vie de dizaines de milliers de Palestiniens. Israël continue de bloquer des centaines de millions de dollars, douanes et taxes prélevées sur les marchandises palestiniennes transitant par les ports et les aéroports israéliens depuis presque une année. Le mouvement Hamas, qui dirige le gouvernement depuis le 25 mars dernier, a accusé la secrétaire d'Etat américaine d'ingérence dans les affaires palestiniennes et d'encouragement de la guerre civile. Il a par ailleurs critiqué sa façon de traiter les Palestiniens ainsi que les Etats voisins en modérés et extrémistes. D'un autre côté, alors que les territoires vivent un certain calme depuis quelques jours avec l'absence d'affrontements armés interpalestiniens et les nouvelles prédisant un accord proche entre le Fatah et le Hamas pour la formation d'un gouvernement d'union, Israël veut une nouvelle fois brouiller les cartes, car il est le seul gagnant de l'Etat d'instabilité actuel. Des sources de l'armée israélienne affirment qu'une opération militaire de très grande envergure contre la bande de Ghaza n'attend que le feu vert des politiques. Le but déclaré de cette nouvelle escalade est de mettre un terme aux tirs de roquettes artisanales contre les localités israéliennes proches de ce territoire palestinien duquel se sont retirés les Israéliens en septembre 2005. Bien sûr, la réalité est tout autre.