Créneau porteur et lucratif, la production d'eau minérale a fait, depuis quelques années, de nombreux adeptes parmi les investisseurs privés qui, depuis 1990, ont détrôné les labels publics et occupé progressivement 90% du marché. Actuellement, pas moins de 26 propriétaires de nouvelles concessions attendent une autorisation d'exploitation du ministère des Ressources en eau, ce qui porterait le nombre de marques commercialisées à 59.L'autorisation des pouvoirs publics est devenue incontournable pour la production et la commercialisation des eaux minérales et de source, aux fins de mettre un terme à l'anarchie qui règne dans ce domaine. Il faut dire que par le passé les autorisations étaient parfois allégrement accordées par les walis, ce qui donnait lieu à des abus et à une exploitation anarchique de l'eau de source sous l'appellation usurpée d'eau minérale de surcroît. Pour illustrer cette situation, un responsable du ministère des Ressources en eau nous raconte l'histoire de ce concessionnaire privé qui, durant l'année 2000, dans la wilaya de Tizi Ouzou, a fait main-basse sur la source d'un village obligeant les autorités à détruire l'unité de production suite aux protestations des villageois spoliés. L'anecdote ne renvoie pas à un fait isolé, mais illustre parfaitement une réalité du marché où pullulent des produits au design affriolant mais sans réelle conformité avec les véritables caractéristiques d'une eau minérale. Plus aberrant encore, des producteurs mettent sur le marché leurs produits sans solliciter parfois l'autorisation officielle d'exploitation de leur unité. C'est le cas de plusieurs marques dont les propriétaires ont été sommés depuis le 15 janvier dernier de retirer leurs produits des étals sous peine de poursuites. Une réglementation plus rigoureuse Depuis cette date également, les consommateurs peuvent différencier grâce aux nouveaux étiquetages obligatoires entre une eau de source et une eau minérale et disposer d'informations sur les réelles caractéristiques physico-chimiques de l'eau choisie. Ainsi 33 marques sont reconnues conformes à la réglementation dont 23 ont déjà reçu une autorisation de mise sur le marché et 10 autres attendent une régularisation administrative de leur situation. Pour ce qui est des 26 demandes d'autorisation pour de nouvelles concessions le président de la commission permanente des eaux minérales naturelles et des eaux de source affirme que "les autorisations - qui seront accordées après les analyses, les études environnementales et les études de danger rendues obligatoires par la nouvelle réglementation - se feront exclusivement sous l'appellation eau de source. "Il faudra ensuite attendre une année d'exploitation et un suivi rigoureux de la qualité de l'eau produite pour que la dénomination d'eau minérale soit accordée". "Il faut qu'il y ait une stabilité des caractéristiques physico-chimiques pour que l'eau exploitée soit classée eau minérale", poursuit notre interlocuteur, "sinon l'exploitant ne pourra prétendre qu'à l'appellation d'eau de source". La commission qui veille au respect des dispositions d'un arrêté interministériel, daté du 22 janvier 2005 et publié au Journal officiel le 26 avril 2005, compte les représentants des ministères des Ressources en eau, du Commerce, de l'Industrie et de la Santé. Elle doit notamment faire respecter de nouveaux étiquetages qui comporteront obligatoirement les proportions en nitrates, nitrites, potassium, calcium, magnésium, sodium, sulfates chlorures, pH, résidus secs contenus par les eaux concernées. Par ailleurs, les producteurs dont les eaux minérales contiennent plus de 1 mg de fluorure devront mentionner sur l'emballage que le produit ne convient pas aux nourrissons ni aux enfants de moins de sept ans pour une consommation régulière. Autant de précautions qui visent à protéger le consommateur et à l'aider dans son choix d'une eau minérale appropriée lorsqu'il recherche des vertus thérapeutiques par exemple. La concurrence va pousser les prix à la baisse De nouvelles habitudes de consommation s'installent petit à petit dans un domaine où les Algériens sont peu regardants sur les caractéristiques minérales de l'eau et s'attachent plutôt à sa qualité première : celle d'être une eau propre à la consommation. Pour les consommateurs, une eau minérale se confond souvent avec la dénomination Saïda et se choisi rarement parce qu'elle est produite par telle et telle usine. Les commerçants eux aussi écoulent les fardeaux d'eau minérale sans réellement prêter attention à la marque. Un état de fait qui devrait changer à l'avenir, la concurrence qui s'installe étant un gage de règles de marketing meilleures qui pousseront le consommateur à faire un choix et qui se traduiront par une baisse certaine des prix. Des prix qui ont en fait déjà amorcé une baisse, quoique une certaine anarchie règne encore notamment au niveau des détaillants. Ceux-ci prennent parfois des marges dépassant 30% sur un fardeau de six bouteilles. Vendues 95 DA chez les grossistes, les six bouteilles sont revendues à 25 DA l'unité chez le commerçant du coin. Il est à noter que la consommation individuelle des eaux minérales a été estimée en 2006 par le ministère du Commerce à 16 litres par an, sur un total de 550 millions de litres consommés. Des chiffres qui font ressortir une nette progression puisque des chiffres enregistrés en 2004 démontrent une consommation moyenne annuelle de 11 litres par habitant pour un marché estimé alors à 350 millions de litres par an.