La banque El Khalifa n'était pas en faillite. » Abdelmoumen Khalifa ne l'admet pas. De Londres, et à travers la chaîne satellitaire Al Jazeera, il tente de se disculper en accusant le président Bouteflika d'être le premier responsable de la banqueroute d'El Khalifa Bank. Dans un arabe approximatif, Moumen Khalifa, réfugié en Grande-Bretagne, depuis 2003, parle de « problèmes » qui lui ont été « créés » à partir de juillet 2002 dans le but de pousser sa banque à la faillite. Cela a commencé, d'après lui, le jour où la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE, services secrets français) avait fait un rapport dans lequel est souligné que « El Khalifa Bank est au bord de la faillite ». « Le rapport, affirme-t-il, a été partiellement publié par Libération, Le Parisien et Le Canard enchaîné. » Il se demande ainsi « comment a-t-on pu prédire la banqueroute, alors que la banque se portait bien et continuait à opérer normalement ». « Et depuis, insiste-t-il, Bouteflika et son entourage ont fait toutes sortes d'obstacles pour qu'elle soit mise en faillite. » Remettant en cause son passé de moudjahid, Moumen Khalifa estime que Abdelaziz Bouteflika avait « une affaire personnelle » avec son défunt père, Laâroussi Khalifa, l'un des fondateurs des services secrets algériens. Accusations graves qu'il dit assumer « pleinement ». « Mon père a sauvé Bouteflika et Belaïd Abdesselam d'une condamnation à mort au Maroc. Et, il les a aidés à partir au Mali pendant que la guerre de Libération se poursuivait en Algérie », a-t-il soutenu. Moumen Khalifa évoque aussi que « la banque a été liquidée, pas pour ces histoires évoquées dans la mascarade de Blida, mais parce qu'elle a accordé un crédit important à une société pour construire le nouveau siège du ministère des Finances. » Pourquoi ? Pas de réponse. Il rejette en bloc les chefs d'inculpation qui ont été retenus contre lui. « J'ai laissé 3 milliards de dollars dans les caisses », dit-il, remettant en cause le chiffre donné par les autorités et qui est de 1,5 milliard de dollars. Pour lui, ceux qui sont au pouvoir « parlent de milliards comme ils parlent de la pomme de terre ». Mais où est passé cet argent ? « C'est l'Etat qui l'a pris. » Pour quelle raison ? « Avec un tel groupe, j'avais une force politique », explique-t-il. Revenant sur l'affaire de Khalifa Airways France et ses démêlées avec l'Etat français, il a souligné qu'en mars 2003, la justice française a dépêché à Londres une délégation composée de deux juges, cinq policiers et un responsable de l'ambassade de France à Londres. « Je les ai rencontrés au Scotland Yard », précise-t-il, notant leur avoir fourni les preuves nécessaires sur tout ce qu'ils voulaient savoir. « Leur problème, c'était les quatre voitures blindées de 500 000 euros chacune, que Khalifa Airways France avait achetées. Ils pensaient qu'il s'agissait d'une fuite organisée de capitaux. Mais, ces voitures sont chez Bouteflika. On les voit à la télé. Même les chauffeurs de la présidence, entraînés pendant deux semaines en Belgique, ont été transportés par les avions de Khalifa Airways », souligne-t-il. Questionné sur ses relations avec les généraux, Moumen Khalifa dira qu'il connaissait tout le monde, « de Bouteflika aux ministres et à l'armée » et qu'il n'était pas au service de tel ou tel clan. Sur son refus de rentrer au pays pour se défendre, Moumen Khalifa dira qu'« il n'y a pas de justice ni de démocratie en Algérie ».