Ammar Azzouz, militant FLN, auteur, compositeur pour des chanteurs comme El Ghazi, Fella Ababsa, Mohamed Lamari ou encore Kamel Messaoudi, est un agitateur de talent. Interview agit-prop ! En matière de musique algérienne, est-ce que tout a été défriché et exploité, et ce, en tant qu'acteur et actant mélomane... Je ne le pense pas justement. Il me semble que les efforts nécessaires n'ont pas été mobilisés par les pouvoirs publics pour la mise en valeur de la richesse du patrimoine musical algérien. Techniquement... Qui dit techniquement veut dire financièrement. Il n'y a jamais eu cet effort financier pour favoriser cet effort culturel pluridisciplinaire. Parce qu'il y a eu défaillance des pouvoirs publics et également absence d'un secteur privé qui pourrait faire du mécénat. Ce que vous faites actuellement dans votre studio d'enregistrement Sono Star... Ce que j'essaie de faire. Je n'ai pas les moyens financiers pour cela. Je le fais simplement en favorisant le contact entre les différents artistes et en mettant à leur disposition un studio d'enregistrement. Et selon les formules qui leur conviennent. Les artistes disent que ce studio produit un bon son... C'est un studio qui rayonne et qui dégage un son de tout ce qu'il y a de meilleur comparable aux standards universels. Des chanteurs comme Hamidou, Yousfi Toufik, Abderrahmane El Kobi, Houari Dauphin, Fella Ababsa, Hassiba Amrouche, Samir Toumi, Rachid Koceila, Samir El Assimi ont été séduits par ce son. L'excellent Brahim Tayeb... Brahim Tayeb est époustouflant. Brahim Tayeb est une révélation musicale. Et les bandes sonores scéniques lors du show inaugural de l'événement « Alger, capitale de la culture arabe » ont été enregistrées chez Sono Star, notamment la bande du aloui et où a évolué la formation Ferda. Sono Star se veut un label... La profession est « polluée ». Certains font dans la spéculation. La qualité musicale laisse à désirer. Les œuvres qui marchent bien sont festives. C'est très rare actuellement pour un artiste d'avoir les moyens pour produire une œuvre, un album. La belle musique n'existe pas chez nous parce qu'il n'y a pas d'éditeur et producteur suffisamment concernés pas le bel art. C'est le raï, la chanson kabyle légère, le chaoui-dance avec une pauvreté dans la ligne mélodique, textuelle... Vous avez des chanteurs qui arrivent au studio, ils mettent la boîte à rythmes en marche, ils improvisent des textes rimés avec des paroles sans aucun sens. D'ailleurs, je ne fais plus d'édition plus d'une dizaine d'années. Quel est le chanteur dont vous aurez aimé booster la carrière aujourd'hui ? Le cas du chanteur Brahim Tayeb est patent. C'est quelqu'un qui est venu enregistrer à son propre compte parce qu'il n'avait pas trouvé de producteur. Et les frais du studio sont onéreux pour cet artiste faisant du bon travail, de la recherche et qui est perfectionniste voulant donner à son public des mélodies agréables avec des textes sensés. Ainsi, nous lui avons trouvé un producteur ayant les moyens financiers par opposition à Sono Star. Quelle est l'urgence en matière de culture ? L'urgence, c'est de donner son importance à la création culturelle. Par conséquent, de rémunérer décemment les artistes toutes disciplines confondues. Les artistes ne peuvent pas vivre de leur art. Ceux qui vivent de leur art, ce sont ceux qui animent les fêtes et les mariages et les raïmen. Même une chanteuse comme Fella Ababsa a dû s'expatrier. Et encore, à l'étranger, ce n'est pas facile. C'est comme Brahim Tayeb. Sans producteur, son album serait resté peut-être dans un tiroir.