Du haut de ses 40 ans, Hanafi Boudjemâa est l'animateur radio le plus aimé du public à Oran. Son « Min Wakie El Baladiat » est incontestablement l'émission culte des Oranais. Il cartonne quand il sévit chaque mardi de 15h à 16h. Issue de l'ancêtre « Adhoua' Ala El Baladiat », l'émission met, sans concession, aux prises durant 52 minutes un élu municipal avec les auditeurs. On aura droit alors à des empoignades des plus chaudes. Entretien. Produit de proximité par excellence avec une vue sur la région, votre émission a le cœur sur les quartiers et la tête sur les acteurs locaux. Un éclectisme de rigueur ? Votre émission n'est pas vraiment comme les autres… Oui. L'émission se veut à large spectre et traite tout ce qu'il faut voir savoir et entendre dans votre commune ou quartier. Tour à tour, les petites communes isolées à l'image d'El Bria ou bien d'autres, sortent de leur anonymat. L'émission a fêté son premier anniversaire en septembre dernier. Toutes les opinions sont les bienvenues en toute transparence. Pourvu que les propos ne versent pas dans l'invective ou la violence verbale. C'est cela la démocratie. L'échange se fait dans la limite du respect mutuel. Et puis, nous évitons aussi que l'émission donne l'impression que nous sommes dans un tribunal. Cela dit, aucune censure n'est faite. Ceci permet aux auditeurs de s'exprimer en toute liberté en direct avec leurs responsables. A battons rompus. Les auditeurs parlent ainsi de ce qui les préoccupent. Des choses les plus concrètes. Leurs problèmes quotidiens : de la conduite d'eau mal colmatée à l'égout bouché…Et ce n'est pas les exemples qui manquent : Une fois, je recevais le maire de Bir El Djir le jour même où les inondations ont tétanisé Haï Khmisti. Ce dernier a eu ainsi à répondre aux auditeurs. Après l'émission, ce maire a retroussé ses manches pour intervenir personnellement sur le terrain… Il est même arrivé une fois que les auditeurs interpellent leur maire sur un dossier judiciaire en cours... Bien des indicateurs montrent que l'émission cartonne… Le résultat semble tout aussi payant pour Radio El Bahia en termes d'audimat… Oui. Le standard est souvent pris d'assaut par les appels. On prend jusqu'à une vingtaine d'appels par émission. C'est un vrai bonheur. Quel enseignement avez-vous tiré de votre expérience au bout de 7 ans de radio ? Franchement, je sens encore que j'ai beaucoup à apprendre. Je ne vous apprend rien en vous disant que le métier de journaliste est en mal de formation dans notre pays. Il faut d'avantage de stages de perfectionnement. C'est un domaine qui n'est jamais figé. Il évolue. Il exige une adaptation permanente aux besoins du public. C'est indéniable, un seul créneau : la proximité. Forte de ses milliers d'auditeurs en région oranaise et d'un maillage efficace dans les communes reculées, votre émission semble avoir compris l'intérêt d'un tel travail de proximité. C'est quoi la proximité pour toi ? Une manière d'être « près de chez vous » ? C'est rapprocher le citoyen de son administration. Ce sont les préoccupations de chaque matin. Les choses immédiates qui font l'environnement proche du citoyen : le quartier, l'école, le bus du matin… Comme dans de nombreux pays en voie de développement où la tradition orale est de règle et où, d'une part, l'illettrisme limite l'accès à l'information écrite, en terme de proximité, la radio est le média le plus privilégié. Ceci exige de nous de proposer une offre radiophonique abondante et variée. L'objectif prioritaire de notre travail s'inscrit dans une perspective de rapprochement. C'est d'ailleurs notre mission. La force de l'émission reste, à mon sens, son impact au plan local. Notre stratégie consiste à donner les informations générales de proximité. La radio est un média de proximité important. Cette émission est concise et renvoie à la fois systématiquement au quotidien. Mais nous avons l'ambition d'aller plus loin. Tout ce qu'un auditeur cherchera sur la région, il devra le trouver dans notre émission. Notre ambition est d'aboutir à une sorte d'« émission à la demande » que tout auditeur pourrait se concocter avec, par exemple, les informations locales, les projets d'aménagements… Sur les ondes, le coeur de la guerre n'est pas tant l'info brute, mais plutôt les substantielles plus-values liées à son impact chez le public. Encore bien installée dans un quasi-monopole sur la scène locale, l'émission ne semble pas redouter la concurrence… Je crois, en toute modestie, que à l'image de tous les médias, la radio joue un rôle indéniable dans le développement. Il ne suffit pas d'avoir des budgets. Ma conviction, c'est qu'il n'a y a pas de développement sans communication et dialogue. A vous entendre, il y a forcément des projets… Oui. J'ai projet de relancer mon émission économique avec un angle local. Une émission qui a déjà eu beaucoup d'échos. Un autre projet est de lancer une émission culturelle. Nous essayons pour notre part de fédérer les idées, dès qu'une d'entre elles, nous paraît intéressante.