Suffit-il d'assumer ses actes pour échapper aux poursuites pénales ? Grande question posée depuis les déclarations faites, samedi 10 février au tribunal criminel de Blida, par Abdelmadjid Sidi Saïd, président du conseil d'administration (CA) de la Caisse nationale des assurances sociales (Cnas) et secrétaire général de l'UGTA. Il a avoué, devant la juge, avoir pris la décision, contraire à la loi, de déposer l'argent de la Cnas dans la banque privée Khalifa. Décision prise sans informer les membres du CA et le ministère de tutelle. Cette déclaration a-t-elle été faite devant le juge d'instruction ? Si oui, pourquoi l'inculpation n'a pas été générale ? Au-delà du fait que l'instruction du dossier Khalifa révèle chaque jour, et au fil du procès de Blida, des failles et des omissions, il y a, tout de même, un fait qui défie la logique. Le responsable des finances de la Cnas, qui a exécuté un ordre du chef du CA de déposer l'argent à El Khalifa Bank, est inculpé et mis en prison. Alors que celui qui a donné l'ordre n'est pas inquiété. C'est à peine qu'on lui offre la qualité de témoin. Même la juge Fatiha Brahimi insiste sur cette « qualité ». Du coup, un froid s'empare de la salle des audiences de Blida. Cela compte-t-il réellement de faire des aveux devant le tribunal ? Ou s'agit-il de faire plonger le procès dans une marée de détails (l'histoire des cartes de thalassothérapie est un exemple type) pour contourner l'essentiel ? L'opinion publique observe de près. D'autant plus que les propos londoniens de Abdelmoumen Khalifa, principal accusé dans l'affaire, rajoutent des couches au trouble ambiant sans qu'ils soient contredits d'une manière officielle. Comme si l'affaire était banale ou relevait de la simple « association de malfaiteurs ». Autre chose : il est incompréhensible que le conseil d'administration de la Cnas soit dominé par l'UGTA. La facilité déconcertante avec laquelle le premier responsable de l'ex-syndicat unique a joué avec les fonds des contribuables — acte qu'il a reconnu — suffit pour obliger les autorités à réformer les textes régissant la Cnas, s'il y a réellement volonté d'instaurer les règles de la bonne gouvernance. L'argent de la sécurité sociale n'appartient pas à l'aristocratie de la Maison du peuple d'Alger. Maison qui ressemble, de plus en plus, à une résidence dorée. L'urgent, aujourd'hui, pour tous les travailleurs et leurs représentants des syndicats autonomes, est d'extirper définitivement la Cnas de l'UGTA, qui, tout compte fait, ne représente que ses adhérents. Les salariés algériens n'ont pas chargé Abdelmadjid Sidi Saïd de parler en leur nom. Une vérité qui, visiblement, doit être rappelée à chaque fois. Autant de fois qu'il le faut.