L'émoi était, hier, perceptible au siège du quotidien Le Jour d'Algérie, suite au décès, jeudi, de son fondateur, Abderrahmane Mahmoudi. La tristesse se lisait sur les visages des journalistes, décidés, malgré tout, à préparer une édition spéciale en hommage au défunt. Mais aussi prêts à relever le défi et poursuivre le combat de Abderrahmane. Nadia Kerraz, chef de la rédaction, était, hier encore, terrassée par le décès de celui qui fut, dit-elle, « comme un guide spirituel pour nous ». Retenant difficilement ses larmes, Nadia témoigne : « Abderrahmane était toujours disponible à l'écoute et respectait tout le monde. On pouvait même le contredire, il acceptait. Il avait établi un pont avec la rédaction, notamment les journalistes avec lesquels il entretenait beaucoup d'échange d'idées. » Nabil Benali, directeur de la rédaction, résume, pour sa part, ce qu'était le défunt : « Il était audacieux, modeste et d'une grande gentillesse. » « Mahmoudi avait un aspect austère mais un bon fond », selon le SG de la rédaction du Jour d'Algérie, Farouk Maghraoui. Ce dernier, qui a exercé plusieurs années avec lui, a encore en mémoire beaucoup d'anecdotes sur le désormais ex-directeur du Jour d'Algérie et de l'hebdomadaire Les débats, notamment au temps de leur passage à El Moudjahid. « Un jour, il avait écrit un papier politique et Kamel Belkacem, qui était alors directeur de la rédaction de ce journal, a refusé de le lui faire publier, il était alors venu me solliciter. Et puis, le lendemain, quand il a vu son papier publié, il était venu m'embrasser chaleureusement », se souvient-il. « Mahmoudi était une plume fantastique, c'était un grand journaliste », estime encore M. Maghraoui. « Enfermé la plupart du temps dans son bureau, il n'embêtait personne. Il était copain avec tout le monde et il était d'une confiance terrible avec ses collaborateurs. Mahmoudi savait écouter, il fallait, selon lui, juste le convaincre. » Le journaliste Chenouf Dahmane estime, pour sa part, que Mahmoudi avait une capacité phénoménale à disséquer les intrigues et à débusquer le vrai du faux et le mensonge des hommes politiques. Il avait, selon lui, « ce don de lire la ruse et la roublardise chez les ronds-de-cuir ». Sur le plan humain, a-t-il ajouté, « au temps du service national où il était mon ami de chambre ainsi qu'au niveau de la rédaction d'El Moudjahid, Mahmoudi distribuait la bonté et la générosité comme le fait un grand-père avec ses petits-enfants. » Mourad Kechad, un jeune journaliste du Jour d'Algérie, pense que le décès de Abderrahmane Mahmoudi « est une grande perte pour la presse ». Pour ce journaliste, « les écrits de Mahmoudi montrent bien qu'il était à la hauteur de son rang », exprimant ses regrets de ne l'avoir connu que quand il était malade. « C'était un professionnel, très modeste, et toujours fidèle à ses écrits, il nous conseillait toujours de dire la vérité », se souvient, de son coté, Fatima Arab. Karima abonde dans le même sens en déclarant que « Mahmoudi était à jour dans les informations, malgré sa maladie et toujours là à orienter tout le monde et c'était lui qui insistait à ce qu'on parle de nos problèmes ». Pour Habiba Ghrib « c'est une perte d'un professionnel pour la rédaction du journal car sa maladie nous a empêchés de puiser de son savoir ». Habiba qui a rejoint Le Jour d'Algérie depuis près de deux années pense que « le grand professionnalisme de Mahmoudi n'avait d'égal que sa modestie et son humanisme. Il nous a appris à avoir un regard différent ». L'une des filles du défunt, Fouzia, qui travaille à la rédaction, affichait, hier, un extraordinaire courage et avait aussi tenu à apporter son témoignage de professionnelle : « Mon père détestait le népotisme. Il ne me privilégiait pas. Au contraire, il était plus sévère avec moi car il attendait beaucoup de moi », avait-t-elle tenu à dire.