Fouad Abou-Rya n'a rien à voir avec les célébrités du Caire, mais il sait couler une satire bien égyptienne dans de nouveaux moules. Telle dénonciation du « sommeil arabe » est incontestablement bien venue. Son roman Nuit de noces est centré autour des « saintetés », pas toujours convenables, d'un imam zélé. L'histoire est du reste traitée très librement. La vie dans les quartiers pauvres du Caire est plus fidèlement rendue, en dépit de quelques fioritures pseudo-élégantes dans le style du roman. Fouad Abou-Rya tente toujours, que ce soit dans ses romans ou ses nouvelles, une observation minutieuse et souvent pénétrante de l'actuel Caire. Il pousse toujours plus loin « ses enquêtes », à la lumière d'un idéal artistique de plus en plus exigeant. Ses nouvelles, conçues d'abord comme des satires « sociales », sont parfois dominées par la passion du document. Son recueil l'hiver nu est un modèle du genre : la peinture du milieu, des usages urbains, des mœurs (pas toujours convenables) des citadins du Caire, est d'un trait net et sobre. La ferveur désordonnée du mouvement citadin a toujours inspiré Fouad Abou-Rya et lui a offert une riche matière pour ses écrits, souvent précis et impartiaux où religiosité, brutalité et brigandage voisinent. Fouad Abou-Rya est le conteur d'un art parfois idéaliste, mais qui a saisi l'immense portée dans toute œuvre d'imagination d'une reconstitution honnête du milieu, condition d'existence, peut-être, du roman ou de la nouvelle moderne. Certes, parfois un humour cristallin atténue le tranchant de ses écrits, mais l'engagement de l'auteur pour une société égyptienne plus moderne, rationnelle et vouée à la science est clair. Les contrastes entre les personnages des nouvelles (l'hiver nu) de Fouad Abou-Rya ne relèvent pas uniquement de la comédie légère ; l'intention sociale de l'auteur ou ses inquiétudes devant les injustices économiques de l'Egypte contemporaine nous valent de petits chefs-d'œuvre. On est subjugué par sa verve, sa curiosité pour les minuscules fluctuations sentimentales. Dans ce monde arabe, où l'Egypte n'est qu'un exemple, l'acuité des crises économiques, la misère des prolétariats agricoles ou ouvriers et les réceptions politiques exacerbent les esprits critiques. Socialement, le contraste est frappant entre l'opulence des uns et la misère des autres. Malgré tout, en dépit d'explosions de mécontentement sporadiques, localisées dans le temps et dans l'espace, en dépit de dénonciations vengeresses, les régimes politiques, souvent dictatoriaux, rétablissent l'ordre ; un ordre fragile et précaire que Fouad Abou-Rya ne manque pas de souligner de sa plume acerbe. La tonalité dominante dans certaines œuvres de l'auteur, malgré les inquiétudes ou les désenchantements, est caractérisée par la confiance en un avenir meilleur. Cela n'empêche pas Fouad Abou-Rya d'être pour une littérature qui articule la protestation outrée, le refus indigné des dissidents dans un monde arabe à la dérive. Ici, en effet, le renouvellement proviendra d'une remise en question du statu quo.