Comment expliquez-vous la participation d'organisations chrétiennes au combat que mène la Fondation Al Qods. Quelles sont vos propres motivations ? Me concernant, j'en fais partie, consciemment, tout en étant chrétien, sans appartenir à aucune organisation ou un parti politique, juste à mon église, car j'aime être indépendant. Ma foi chrétienne m'oblige à collaborer avec mon frère musulman pour lutter contre tout ce qui afflige l'identité arabe. Ce qui donc me motive moi, c'est ma foi chrétienne. Le prophète arabe Job disait : « J'étais l'œil de celui qui est aveugle (…) », et en tant que chrétien, je ne peux me contenter d'observer l'oppression d'un frère sans lui porter assistance. N'importe quel opprimé est mon frère. La Fondation Al Qods m'a sollicité et je collabore avec mes confrères musulmans pour défendre la Palestine et Al Qods, pour que celle-ci renoue avec sa face arabe, qu'elle recouvre son indépendance et son identité islamo-chrétienne. Retrouve-t-on ce même état d'esprit chez les organisations chrétiennes du Proche-Orient ? Malheureusement, les organisations qui s'investissent dans la défense de la cause palestinienne ne sont pas nombreuses. Je suis presque seul ici. On attendait monseigneur Hena Attallah qui devait venir de Palestine, hélas, l'autorité israélienne lui a refusé de nous rejoindre à Alger. Au Liban, les chrétiens, les maronites surtout, sont nombreux, mais nous n'avons aucun d'eux avec nous. Vous pensez donc que les chrétiens d'Orient sont moins enclins à apporter leur soutien à la cause palestinienne, pourquoi ? En Europe laïque, les chrétiens sont paradoxalement plus nombreux à la soutenir alors que nous sommes du pays et nous devrions être les premiers à s'élever contre l'oppression. L'Eglise d'Orient serait-elle, d'après vous, pro-israélienne ? Oui, on peut le dire. L'Eglise d'Orient est un peu à l'image de celle de l'Occident. Je dirais même plus : les chrétiens qui se réclament de l'Eglise de Rome sont plus nombreux à soutenir les Palestiniens dans leur combat. C'est une situation que j'explique par la fragilité de la foi chrétienne au sein même de notre Eglise. N'avez-vous pas l'impression de servir de caution en répondant à l'invitation de la Fondation Al Qods ? Non. Je ne pense pas qu'ils versent dans la propagande ou qu'ils soient hypocrites. Je soutiens la cause à partir de ma foi. Je ne dirais pas que ma position est unique, mais elle est minoritaire. Les autres sont soit indifférents, soit pro-Occidentaux. Il faut relever aussi le fait que les chrétiens constituent une faible minorité et que la direction de l'Eglise d'Orient est gérée par une association hellénique, elle est formée d'étrangers, des Grecs. Monseigneur Attallah est le seul évêque arabe. Même notre église d'Antioche, dont le siège est à Damas, était gérée jusqu'au XIXe siècle par des Grecs. Pensez-vous que les chrétiens d'Orient ont beaucoup plus à gagner en soutenant la cause palestinienne ? Exactement. La cause des opprimés est notre premier devoir de chrétiens. C'est tout naturel de la soutenir, car il s'agit de notre pays, de notre peuple. Pour moi, Israël est l'image du diable, c'est un Etat diabolique, comme disait Khomeiny : il n'a cure ni des chrétiens ni des musulmans.