Quelle est votre réaction après les deux attentats qui viennent de secouer la capitale ? Ce sont deux attentats d'une exceptionnelle particularité puisque le symbole d'un Etat, en l'occurrence le Palais du gouvernement, a été ciblé. C'est très grave dès lors que c'est la première fois, depuis le début du terrorisme, qu'un édifice de souveraineté est visé. D'autres part, il y a cette utilisation d'homme suicide ou de bombe humaine, ce qui est tout à fait nouveau chez nous, mais qui nous renvoie à ce qui se passe au Moyen-Orient. Tout cela montre que nous faisons face à un terrorisme qui tente de reprendre du poil de la bête, dopé en cela par la situation internationale et les événements en Irak, en Palestine et en Afghanistan. Comment expliquez-vous que cela puisse être possible alors que les officiels parlent de retour de la paix et de réconciliation nationale ? On veut bien qu'il y ait retour de la paix, mais ce retour s'est accompagné d'une certaine forme de laxisme, d'un déficit en vigilance, ce qui a fait que le terrorisme en a tiré profit. C'est à la faveur d'un certain laisser-aller qu'il essaie de reprendre, ajoutant à cela l'affaiblissement de l'autorité de l'Etat sur le plan moral et l'affaire Khalifa qui n'a pas encore fini de produire des conséquences. Cette affaire-là a affaibli l'Etat et a encouragé ceux qui veulent détruire l'Etat algérien républicain. Que peut-on faire, d'après vous, devant une telle situation ? Il faut prendre de nouvelles mesures qui peuvent traduire une nouvelle fermeté et une nouvelle vigilance. Il n'y a pas d'autres solutions. Il faut prendre des mesures beaucoup plus fermes pour faire face à ce phénomène. Quel genre de mesures ? C'est aux responsables de voir quelles sont les possibilités qui se présentent à eux. Ils doivent trouver de nouveaux moyens pour faire face à cette situation. Il faudrait également que toute la classe politique nationale, que tous les citoyens dénoncent comme un seul homme ce phénomène. Il n'est plus question de tolérer que des gens puissent rester à l'écart tout en étant neutres ou que d'autres accusent des officines de l'Etat d'être derrière des attentats. Ce genre de bavardage doit cesser définitivement. On ne peut plus tolérer ce langage. Il faut faire face à cette situation d'une manière sérieuse et ne tolérer aucun laxisme ni aucune supercherie. Sur quoi, selon vous, déboucheront ces événements ? Y aura-t-il des changements dans les politiques du gouvernement ? Certainement. Ce sont des événements trop importants pour qu'ils restent sans conséquence. Il est clair qu'il faudra relancer les affaires de l'Etat avec beaucoup de rigueur et de cohérence. Le terrorisme profite de la moindre défaillance de l'Etat dans n'importe quel domaine pour frapper. Est-ce que ces attentats démontrent une quelconque démobilisation dans les services de lutte antiterroriste ? Il y a une certaine démobilisation et un déficit en vigilance. C'est vrai que le terrorisme a reculé depuis des années grâce aux efforts, à la lutte des services de sécurité, ainsi que celle de tout un peuple qui a réagi contre ce phénomène. Nous avons cru avoir triomphé définitivement, alors que ce problème se pose encore. La bataille pour la survie de l'Etat est une bataille qui doit continuer. Elle ne s'arrête pas. La consolidation d'un Etat républicain est un impératif fondamental si on veut sortir de cette ornière du terrorisme.