Le jeudi 19 avril 2007, le CSC s'écroule à Tiaret et laisse ainsi filer une chance certaine de rejoindre l'élite du football algérien. Depuis, les Sanafirs, force dynamique et attractive du doyen des clubs algériens, semblent résignés, en voie d'abandonner même la formidable campagne de soutien de leur club vers le sacre, entamée au début de la saison. Constantine : De notre bureau Une semaine après, soit le 26 avril 2007, une autre campagne est lancée. Morose, timide et insipide, la course à la députation n'intéresse pas, a priori, les jeunes de Constantine. Face à la précarité, l'incertitude, les promesses creuses, mais également la désillusion causée par les mauvais résultats enregistrés par le CSC, ces jeunes semblent totalement étrangers à des joutes électorales où ils ne sont pas représentés. « Quel parti soutenir ? Qui sont donc ces candidats qui promettent des merveilles et puis disparaissent une fois élus ? » relève amèrement Mounir, un universitaire au chômage et « senfour » attitré qui exprime d'ores et déjà son intention de boycotter carrément le rendez-vous électoral du 17 mai. A-t-il un rêve à formuler ? Un seul pour le moment : « Voir le CSC accéder en première division. » Un rêve également caressé par deux personnalités politiques locales, allant jusqu'à conjuguer leurs efforts pour atteindre cet objectif commun, même s'ils sont issus de deux partis connus pour leur rivalité. Le premier, c'est le général à la retraite Mohamed Betchine, fondateur du RND et parrain du CSC. Il s'est totalement investi pour que le CSC arrive en division supérieure, mais depuis la défaite du 19 avril dernier, ce rêve est devenu moins accessible. Le second, c'est le Dr Mahssas, issu quant à lui des rangs du FLN. Intronisé porte-parole du club à un moment donné, il est classé en 7e position sur la liste FLN de Constantine en perspective des législatives du 17 mai. En somme, le CSC est une affaire propre au RND comme au FLN, au même titre d'ailleurs que la course à l'APN, où ces partis de l'Alliance présidentielle, en sus du MSP, sont donnés favoris, – comme d'habitude–, pour se partager « le gâteau » dans la ville du Vieux-Rocher. Des partis qui passent pour être les « troubadours » du Président, allant jusqu'à s'approprier le programme présidentiel dont ils font les louanges depuis le début de la campagne électorale. C'est notamment le cas du RND, un parti qui se reconnaît justement dans ce programme et dont la liste à Constantine est conduite par Abderrahmane Refaâ, secrétaire de wilaya et syndicaliste. Ce dernier nous dira justement, à ce titre, qu'une commission est chargée actuellement d'établir une fiche technique relative à chaque commune pour que ce programme soit adapté aux spécificités de chacune d'elles. Mais pour l'heure, la préoccupation majeure du RND, est d'amener les citoyens de la ville du Vieux-Rocher à voter massivement le 17 mai et de choisir, bien entendu, sa liste électorale. « Notre souci, c'est avant tout d'inciter la population à voter ; sans l'aide des électeurs nous n'arriverons à rien, car le peuple est souverain », affirme M. Refaâ, en ajoutant que son parti est « fort », pouvant décrocher 3 à 4 sièges à l'APN à condition, estime-t-il, que les électeurs ne boudent pas les urnes. Pour ce faire, le parti de Ouyahia a décidé de consacrer 80% des activités de sa campagne électorale au travail de proximité. « Nous ne misons pas beaucoup sur les meetings. Nous voulons avant tout sensibiliser les citoyens en faisant du porte-à-porte et avons à cet effet constitué 8 groupes de femmes qui sillonneront les quartiers pour cibler l'électorat féminin », précise notre interlocuteur au sujet de la « stratégie électorale » du RND qui aspire, selon le candidat Refaâ, à « mener une campagne propre et transparente ». Du côté du FLN, les ambitions sont clairement affichées : l'ex-parti unique doit obtenir pas moins de 4 sièges à l'APN. La patate ou la vente concomitante des élections « On aimerait bien décrocher plus de postes, mais pas moins de quatre », assure le directeur de campagne du FLN à Constantine, Ahmed Habachi. Un score que le parti de Belkhadem envisage de remporter avec l'implication des jeunes dans leur programme électoral, –celui du président de la République s'entend–, par l'organisation d'un meeting par commune et par le travail de proximité. D'autres rencontres en direction des jeunes et des femmes sont également prévues, nous dit-on, mais leur timing reste tributaire de la disponibilité des salles. Mais pour ces jeunes et ces femmes, qui constituent un réservoir électoral certain pour les candidats en lice, les préoccupations sont ailleurs, loin des calculs des politiciens et des opérations de charme que ces derniers mènent à leur intention le temps d'une campagne électorale pour amasser le maximum de voix. Il est vrai que depuis le début de la campagne, c'est souvent par simple curiosité que les citoyens daignent s'arrêter un instant pour jeter un œil sur les listes électorales, collées sur les panneaux d'affichage essaimés à travers la ville ou de manière anarchique et sauvage comme celles du FNIC qui trônent sur le mur jouxtant le… siège de la CPWSEL de Constantine. Dans cette ambiance de grande monotonie, la pomme de terre importée du Canada occupe les esprits des petites bourses. « Voir la pomme de terre se négocier à 25 DA le kilogramme au lieu des 50, il n'y a pas si longtemps, c'est une chose concrète qui fait du bien au porte-monnaie », se réjouit ammi Omar, retraité de l'éducation. Que pense-t-il du timing de cette baisse du prix coïncidant avec les élections ? « Sincèrement, je perçois cela comme une action de vente concomitante des législatives orchestrée par le pouvoir. » Et que fera-t-il le 17 mai ? « Je n'ai jamais raté une élection, mais j'avoue que cette fois-ci, la tentation de faire faux bond est grande », affirme-t-il. En somme, le sujet de la pomme de terre s'est invité, en ces jours de campagne, à ces joutes électorales et s'est ainsi retrouvé « à la une » des conversations des citadins, ravissant de ce fait la vedette aux candidats à la députation et aux centaines d'affiches imprimées par les partis politiques. « Cela fait des années que nous votons pour des candidats et des programmes qui ne répondent pas en fin de compte aux attentes du peuple. Et justement, celui-ci aspire à une vie meilleure, à un quotidien moins rude. Quand le prix de la pomme de terre devient le principal souci du citoyen et quand c'est presque un luxe d'en acheter, à cause de spéculateurs agissant en toute impunité, les élections deviennent secondaires pour la population, car ce n'est ni la campagne électorale, ni le vote, ni les promesses des partis politiques qui rassasieront les petites gens », soutient Nadira M., enseignante dans un lycée. L'original et le « Taiwan » Visiblement conscients du désintérêt des Constantinois pour la campagne électorale, les candidats en lice pour les législatives semblent avoir concentré leurs efforts sur le travail de proximité, jusque-là considéré comme le domaine de prédilections des islamistes. En effet, en sus du RND, du FLN et du MSP, Assala l'unique liste indépendante de la ville, conduite par Abdeljalil Boulaâssel, transfuge de l'ex-parti unique, investit elle aussi le terrain en ciblant des quartiers défavorisés comme El Guemmas, Oued El Had, Benchergui, les alentours de la commune du Khroub comme El Gourzi et Salah Derradji. Voulant concurrencer les grosses cylindrées, les candidats d'Assala souhaitent, à cet effet, obtenir une quote-part le 17 mai prochain. « Notre liste n'est pas importée, contrairement à d'autres formations. Les candidats qui composent Assala sont de Constantine. C'est une liste locale. Notre force vient du peuple et notre vœu est de le servir », soutient le candidat à la députation Boulaâssel, qui estime que cette liste indépendante a toutes ses chances à Constantine. Pour d'aucuns cet ex-cadre du FLN pourrait, en effet, mettre en difficulté le parti de Belkhadem, notamment au niveau du Khroub, seconde grande commune de la wilaya. Cela étant, la mouvance islamiste, autrefois omnipotente et omniprésente, voire arrogante lors des précédentes consultations électorales, affiche à présent un profil bas. Extrêmement fragilisés après l'expérimentation du modèle participationniste cher au MSP, les islamistes de Constantine jouent carrément leur existence d'autant que le MRN « domestiqué » par le pouvoir ne bénéficie plus du réservoir électoral du parti que l'on dit influent dans certains quartiers populeux. En effet, entre le MRN des légalistes restés fidèles au président déchu et le MRN des redresseurs mené par Boulahia, la guerre de positions fait rage et les partisans du cheikh ont promis de faire une campagne « anti Taiwan », qualificatif accordé aux compagnons de Boulahia. MRN contre MRN. Une campagne inédite offerte par les islamistes ! Mais le plus désappointant, c'est que l'atomisation et la fragilisation de la mouvance islamiste ne profitent guère aux démocrates qui, une fois de plus, se présentent en rangs dispersés. Cela étant, en attendant le verdict des urnes, le CSC a désormais à sa tête un nouveau président à la faveur de l'assemblée générale élective tenue le 28 avril dernier. Il s'agit de Ahmed Boudjriou, ex-P/APC d'obédience RND de Constantine et connu pour être un proche du général à la retraite Mohamed Betchine. « A présent, l'OPA lancée par le RND sur le CSC est réussie », avance-t-on dans les milieux du club. Pour d'aucuns, le RND vient, partant de là, de remporter une première victoire en s'appropriant la direction du CSC, mais qu'en sera-t-il si ce dernier rate définitivement l'accession ? Un pari risqué pour le parti de Ouyahia tout comme son ambition de concurrencer le FLN lors de la grande confrontation du 17 mai. D'ailleurs, à en juger par certaines déclarations de Belkhadem, le premier chef de parti à avoir animé un meeting à Constantine, « le FLN n'a pas besoin de campagne pour gagner ». C'est tout dit !