Alger, capitale de 3,5 millions d'habitants, a toujours enregistré le plus mauvais taux de participation aux différentes consultations électorales qui se sont succédées. Les Algérois sont-ils plus détachés de la chose électorale que le reste du pays ? Moins séduits par toutes les promesses électorales faites par les différents partis et candidats en lice ? Serait-ce une forme de rejet de la classe politique et des programmes proposés ? Le mythe longtemps entretenu selon lequel la faible capacité de mobilisation électorale à Alger ressemble à celle de toutes les grandes villes du monde a vécu comme on l'a vu encore cette semaine avec l'élection présidentielle en France. Le choix de grosses pointures dans la compétition électorale à Alger comme têtes de listes des partis qui ont pignon sur rue ne semble pas avoir donné un cachet particulier et des couleurs à la campagne électorale dans la capitale. Avec des candidats qui ne sont pas à présenter pour avoir capitalisé derrière eux de longues années de militantisme et d'expérience dans les institutions de l'Etat pour certains d'entre eux, on pensait légitimement que la scène électorale allait s'emballer et s'enflammer à Alger . M. Ziari, représentant le Fln, ayant à son actif plusieurs mandats inaugurés avec la première législature, Saïd Sadi du Rcd dont le combat pour un projet de société démocratique avait créé dans le pays, dans les moments difficiles, une réelle dynamique de changement, Mme Louisa Hanoune, porte-parole des travailleurs, des laissés pour compte, anti-libérale patentée, M. Harchaoui, ancien ministre, cadre influent du Rnd, Amar Ghoul, que les citoyens connaissent et apprécient beaucoup plus pour son efficacité en tant que ministre des Travaux publics que dirigeant du MSP. Un cocktail explosif ! Ce savant dosage de candidatures ne s'est pas fait ressentir sur le terrain. Les dispositions légales régissant la campagne électorale et interdisant aux candidats d'investir les rues et places publiques pour des raisons sécuritaires ont créé un sentiment de frustration auprès des candidats. « Les meetings dans les salles fermées et le travail de proximité ne suffisent pas pour une capitale comme Alger en vue de mobiliser et de sensibiliser au mieux les citoyens », regrette M. Ziari. Il estime que l'on aurait gagné « à libérer un peu plus les énergies ». En dehors des passages à la télévision et à la radio des représentants des partis et des candidats indépendants, des actions d'affichage au demeurant mal inspirées, il n'y a pas, constate M. Ziari, d'initiatives à même de sensibiliser les citoyens et de les inciter à accomplir leur devoir électoral. La crainte de l'abstention hante tous les esprits. A qui profitera l'abstention ? Triple défi Les statistiques des précédents scrutins font ressortir qu'un candidat sur deux vote à Alger. Les pratiques de la fraude qui ont entaché les précédents scrutins, l'instabilité politique et sécuritaire, la mauvaise gouvernance dans la gestion des affaires locales ont fait que le citoyen n'attend plus rien ni des élections ni des candidats quelle que soit leur couleur politique. La prise en charge des préoccupations locales est la meilleure des pédagogies électorales, observe M. Ziari. Elle est au centre de tous les enjeux. « Après avoir sillonné les 53 communes de la capitale, je n'ai pas entendu de contestation portant sur des programmes politiques, l'essentiel des préoccupations des citoyens tournaient autour des problèmes locaux d'hygiène publique, d'emploi, de logements... », relève la tête de liste du Fln à Alger. Autre caractéristique de cette campagne : des slogans tels que la lutte contre la hogra qui avaient été au centre des préoccupations des citoyens lors des précédentes campagnes ont disparu du lexique de campagne des partis et des citoyens, observe M. Ziari. Cela signifie-t-il pour autant qu'il n'y a plus d'injustice dans le pays ? Le statut de chef de parti, de ministre d'un gouvernement sortant ou d'ancien ministre, fait que certaines candidatures sont placées sous les feux des projecteurs. Le moindre faux pas dans ce scrutin ne manquera pas d'avoir de lourdes conséquences sur l'avenir politique du candidat concerné, d'abord, et sur son parti ensuite. M. Ziari est conscient de cet état de fait. Il est d'une certaine manière dans la position d'un athlète de performance qui n'a pas le droit à l'erreur en tant que ministre, candidat d'un parti majoritaire et pour couronner le tout, en tant que personnalité présentée comme étant proche du président de la République. Un triple défi . « Nous sommes investis d'une mission pédagogique qui n'est pas celle des autres candidats », relativise M. Ziari qui estime que la fonction de ministre « nous oblige à la réserve pour ne pas promettre des choses que l'on ne peut pas réaliser. Les citoyens sauront faire la part des choses et c'est à eux que reviendra le dernier mot ». Quelle appréciation fait-il de la campagne électorale qui s'achévera demain ? « C'est une campagne digne, ce qui est un signe de maturité politique des Algériens », observe-t-il. Quant aux craintes de fraude formulées par certains partis, il considère qu'elles sont injustifiées dans la mesure où les partis sont impliqués dans l'opération de surveillance et de contrôle de la régularité du scrutin dans les bureaux de vote. « C'est une vieille rengaine de certaines formations qui crient à la fraude avant le scrutin pour justifier demain leur faible résultat », commente M. Ziari.