Devenu la référence des créateurs contemporains, Paul Poiret continue de révolutionner et d'influencer la mode d'aujourd'hui. Pour mémoire, le créateur libéra la femme du corset et inventa la robe-chemise en imposant les lignes droites. Il popularisa, même, les couleurs vives. Il a fait fureur outre-Atlantique, avec ses tenues qui s'arrachaient à tour de bras. On le surnomme The King of Fashion, le roi de la mode. C'est, d'ailleurs, ainsi qu'il a intitulé son autobiographie parue en 1931. C'est le nom que le Metropolitan Museum de New York a donné à l'exposition consacrée à ce pionnier, inaugurée la semaine dernière. Son train de vie, son amour et son goût prononcé pour l'orientalisme lui ont valu d'être surnommé Le Magnifique à Paris. Le jeune Poiret fait ses premières classes chez la couturière Madeleine Chéruit, puis chez Doucet, avant d'intégrer la maison de couture en 1901. En 1903, il décide de voler de ses propres ailes en ouvrant sa propre maison de couture. Une occasion qui lui permettra de donner forme à ses patrons. Ainsi, il libère la femme du jupon. En 1906, c'est l'abandon du corset. Les épaules deviennent désormais le point d'appui de cette silhouette qui libère la taille, déplace la ceinture sous la poitrine, et laisse de côté la technique tailleur et les pièces à manches trop construites. Quatre ans plus tard, le succès des Ballets russes dans Shéhérazade libère totalement son goût pour l'esthétique orientaliste. Ses pantalons de harem ou ses tuniques « abat-jour » feront l'objet d'une fête somptueuse qu'il donne en 1911 sous le signe des « Mille et seconde nuits ». Chemin faisant, il collabore avec de nombreux artistes, dont Constantin Brancusi, Robert Delaunay, André Derain Picabia ou encore Picasso. En 1908, il réussit le style Poiret en lançant les Parfums de Rosine et la ligne pour la maison Martine, nommés d'après les prénoms de ses filles. Au lendemain de la Première Guerre mondiale, Poiret ne trouve plus ses marques dans une époque qui acclame la naissance de la fameuse petite robe noire, lancée en 1926 par une jeune couturière affranchie du nom de Gabrielle Chanel. Il ferme les portes de sa maison de couture en 1929. L'exposition que lui consacre le Metropolitan Museum de New York est installée dans les décors du début du XXe siècle. La cinquantaine de mannequins requisitionnée offre une vision spectaculaire de couleurs chatoyantes, de tissus luxueux, de coupes des plus audacieuses pour l'époque. Pour rappel, Paul Poiret est revenu sur le devant de la scène l'année dernière, à la faveur d'une vente aux enchères-événement, qui vit se disputer à Paris les plus grands musées pour les trésors vendus par sa petite-fille. La rétrospective de 2005 est une occasion de présenter la vingtaine d'ensembles acquis lors de cette vente. D'autres pièces, venues de l'Historical Society de Chicago, du Musée de la Mode de Paris ou d'ailleurs, complètent l'exposition. Les modèles exhibés montrent l'émergence, avant la Première Guerre mondiale, des lignes droites, comme en témoigne cet ensemble jupe plissée et corsage T-shirt évasé en crêpe orange, ou encore ces manteaux plats empruntés aux kimonos japonais. L'exposition en question rend également hommage à l'épouse et à la muse du couturier. Une jeune femme de province qui sut se vêtir avec de l'audace à revendre.