L'amendement apporté aux dispositions de l'article 273 du code de procédure civile est rejeté sans aucune nuance par les avocats du barreau de Tlemcen qui se sont réunis samedi dernier en session extraordinaire au palais de justice de Tlemcen. Dans sa délibération, le Conseil de l'ordre des avocats dudit barreau considère que la réintroduction du délit d'audience commis par l'avocat constitue « une atteinte grave au libre exercice de la profession d'avocat et annihile le principe d'indépendance de la défense tel que défini et consacré par l'article de la loi n°91/04 du 8 janvier 1991 portant organisation de la profession d'avocat ». Tout en relevant que le délit d'audience commis par l'avocat a été banni de la législation algérienne depuis des décennies, les avocats remarquent que sa réintroduction laisse entrevoir une « dérive grave vers une justice désuète, rétrograde, inique et revancharde tendant à museler l'avocat et à fragiliser l'institution de défense et, partant, à priver le citoyen de son droit constitutionnel de disposer d'une défense forte, libre, indépendante et responsable ». Renvoyant les initiateurs de cet amendement devant les engagements du président de la République qui a promis le renforcement de l'Etat de droit et la promotion des libertés publiques et individuelles, les avocats concluent qu'un tel amendement ne peut trouver sa place et constituerait un retour en arrière. A ce propos, ils rappellent la sinistre période où la défense a eu affaire à des textes régissant le fonctionnement des cours spéciales et qui a débouché sur un arrêt de toute activité professionnelle des avocats. Revenant sur l'amendement actuel, les avocats du barreau de Tlemcen constatent avec regret « l'acharnement d'une tendance au sein de la magistrature, fort heureusement minoritaire, à vouloir à tout prix instaurer un climat de méfiance vis-à-vis de l'avocat et cultiver un antagonisme exacerbé entre le corps de la magistrature et la défense ». A cet effet, ils attirent l'attention des pouvoirs publics sur les dangers que ferait courir une telle mesure à l'équilibre indispensable entre les prérogatives attribuées à la défense, au ministère public et au juge du siège et sans lequel il ne pourrait y avoir de procès serein et équitable. Passant à l'offensive, les avocats décident de tout mettre en œuvre pour faire échec à toute velléité tendant à affaiblir les droits de la défense, à remettre en cause la liberté de parole à l'audience et à placer l'avocat dans une situation d'infériorité dans le cadre de l'exercice de sa mission de défense. Ainsi, les avocats n'excluent pas l'éventualité de réunir une assemblée générale extraordinaire pour prendre les mesures qui s'imposent. Dans la même optique, ils interpellent le chef du gouvernement et le garde des Sceaux pour se pencher sur la gravité de cette mesure dont le but « est de déstabiliser sans raison et gratuitement la défense, de l'affaiblir et de l'intimider en plaçant l'avocat devant un perpétuel chantage ». Pour ces raisons, les avocats sollicitent Ahmed Ouyahia et Tayeb Belaïz pour user de tous leurs pouvoirs afin d'empêcher la réintroduction d'une mesure « rétrograde et inique » dans la législation algérienne.