IL faudra attendre encore plusieurs années pour pouvoir espérer des retombées positives de l'accord d'association Algérie-Union européenne sur l'économie nationale. Vingt et un mois après son entrée en vigueur, le 1er septembre 2005, l'accord en question n'a pas eu l'impact escompté, celui de booster les exportations hors hydrocarbures. Pis, c'est plutôt l'inverse qui s'est produit. Le constat établi hier par des responsables algériens invités à une conférence-débat sur l'accord d'association, organisée par la Chambre algéro-allemande du commerce et d'industrie en collaboration avec la Fondation Friedrich Naumann, est, à ce titre, illustratif. Le directeur de l'évaluation et de la réglementation du commerce extérieur au ministère du Commerce, Saïd Djellab, affirme que l'entrée en application de l'accord d'association a permis surtout de consolider la part de l'UE dans le marché intérieur qui se situe aujourd'hui à 55%. Les quatre premiers mois de l'année 2007 ont été marqués, souligne le responsable, par une augmentation significative des importations en provenance d'Europe de l'ordre de 18% comparé à la même période en 2006. Quant aux exportations algériennes vers l'UE, elles restent très faibles. A peine 259 millions de dollars ont été exportés au cours des quatre derniers mois. Pour les prochaines années, fait remarquer M. Djellab, il est attendu à ce que ce déséquilibre commercial augmente, encouragé par la faiblesse continue des exportations algériennes. Une faiblesse aggravée par les conditions d'accès au marché européen qui sont, indique le représentant du ministère du Commerce, de véritables barrières non tarifaires. Parmi ces conditions, il citera la politique de protectionnisme de l'UE, les normes imposées aux produits exportés, le calendrier et les subventions à l'agriculture pratiquées ouvertement par plusieurs pays de l'UE. Des entreprises non compétitives Il indiquera toutefois que pour exporter le produit algérien, il faut qu'il soit intégré à un réseau international d'exportation. Et ce réseau ne peut se faire sans investissements directs étrangers (IDE). Le président de la commission de suivi et de la mise en œuvre de l'accord d'association, Hadjam Belaïd, a estimé pour sa part que le défi imposé par l'accord d'association à nos entreprises est très grand. Des entreprises qui ne sont pas encore compétitives au point où elles n'arrivent même pas à défendre leurs parts de marché sur le marché intérieur. « Actuellement, nous n'arrivons même pas à exploiter le quota de 5000 tonnes de pommes de terre que l'UE nous a offert », révèle M. Belaïd. L'urgence, pour lui, est à l'organisation rapide de nos entreprises qui doivent avant tout s'imposer sur le marché local. Le même constat est dressé par le directeur général de l'Algex, Mohamed Bennini, pour qui, l'accord d'association « n'a eu aucun impact » sur le niveau des échanges. Le faible niveau des exportations hors hydrocarbures en Algérie, relève l'intervenant, est dû au fait que nos entreprises, notamment celles du secteur privé, n'ont pas une vocation à exporter. L'entreprise algérienne, poursuit-il, « se débat dans des contraintes qui l'empêchent d'exporter ». Aussi, la mise à niveau qui devait suivre la mise en œuvre de l'accord d'association « est quasiment nulle », exception faite des programmes MEDA. A cela, il faudra ajouter le retard accusé dans l'achèvement des réformes dites de la 2e génération. Quant au climat des affaires, M. Bennini dira que le flux attendu des IDE est relativement « décevant » en raison de plusieurs problèmes liés entre autres au manque de transparence des règlements, absence des réseaux de sous-traitance, mais aussi d'hommes d'affaires nationaux compétents et convaincants. Invité de marque de cette conférence-débat, l'ex-ministre délégué allemand de l'Economie, Klaus Bünger, a été plutôt optimiste. L'accord d'association, d'après lui, « peut être un moteur de développement ». L'adhésion aux groupements commerciaux internationaux ne peut avoir, indique-t-il, que des résultats positifs, car les processus d'adaptation sont assez douloureux. Afin d'atténuer les effets négatifs de l'ouverture de marché, il faut, recommande le ministre, accompagner cette ouverture par des réformes internes dans le sens des objectifs de la libéralisation de l'économie. Les études en rapport avec les comportements des décideurs ont montré que « la conviction en politique est une chose, la mise en application est une autre chose », rapporte-t-il. Ce qui est sûr, pour lui, c'est que l'ouverture du marché est une « chance » et pas une « menace ».