Le procès de l'affaire liée au séisme de Boumerdès a débuté avec l'appel de toutes les parties (accusés au nombre de 38, les 45 témoins et les quelque 300 victimes qui se sont constituées partie civile). Afin de permettre une meilleure progression, le juge a scindé le dossier en chapitres basés sur les projets et les maîtres de l'ouvrage. Hier, le juge a entendu les six accusés poursuivis pour « homicide involontaire, blessure involontaire, fraude dans la qualité et la quantité des matériaux de construction et non-respect des décisions administratives et de la réglementation dans la construction ». Seul dossier à avoir été traité hier, la cité des 132 Logements de Zemmouri, construite entre 1999 et 2003, a pris toute la journée sans que la justice ait eu le temps d'entendre toutes les parties. Le juge a passé plus de trois heures à interroger l'ex-directeur général de l'OPGI de Boumerdès, Henni Adda Kamel. Redouane Benabdallah a insisté sur le parcours de l'ancien premier responsable de l'OPGI. On saura ainsi que celui-ci, sociologue de formation, aura été directeur de la culture et directeur du transport de la wilaya d'Alger, puis conseiller au ministère de la Culture. « Votre parcours m'intéresse dans le sens où nous avons besoin de définir les responsabilités », a dit le juge à l'accusé. « Les six bâtiments composant cette cité se sont totalement effondrés. Les expertises révèlent qu'il y a eu fraude et tricherie dans leur construction. Les études n'ont pas été faites correctement. Des poteaux qui devaient être composés de 6 barres de fer n'en contenaient que 4 et du diamètre 12 mm au lieu de 14 mm. Les espaces entre les étriers sont de 35 à 40 cm, alors qu'ils ne doivent pas dépasser 15 cm. Les bâtiments A et B ont été construits sur une nappe d'eau. Les expertises ont révélé qu'à 189 m de profondeur, il ne s'y trouve pas une couche solide. Le ciment utilisé est du 250 au lieu du 350. Le gravier utilisé est du type roulé à la place du concassé et le béton était préparé à Draâ Ben Khedda avant d'être acheminé, par camion, à plus de 50 km, ce qui est contre-indiqué, nous apprennent l'enquête et les expertises », dit le juge avant d'annoncer à l'accusé les chefs d'inculpation cités plus haut, pour lesquels ils devait répondre. Sur le plan administratif, le magistrat, reprenant les termes de l'enquête, souligne que « le suivi de la construction n'a pas été rigoureux ». « Il n'y a ni procès-verbal de réunion ni carences, encore moins des sanctions à l'encontre des contrevenants ou au moins des mises en demeure », a ajouté M. Benabdallah. La séance de l'après-midi a débuté avec l'audience d'un autre cadre de l'OPGI, M. Smati, chef du service de suivi des projets. Celui-ci se défendra mieux que son ex-chef et rejettera toutes les accusations dont il est accablé, car poursuivi pour les mêmes chefs d'inculpation. M. Mohamedi, le responsable du bureau d'études chargé du suivi des travaux sur le plan architectural et de génie civil, a lui aussi nié avoir une quelconque responsabilité dans l'effondrement de tous les bâtiments de cette cité. Il se défendra et soutiendra que son travail était fait dans les normes et qu'à son niveau il n'y a « jamais eu de fraude ». L'OPGI tout autant que Mohamedi devaient répondre du fait qu'ils étaient parvenus à un contrat, malgré le manque d'expérience du bureau d'études qui venait d'être lancé. Les deux entrepreneurs poursuivis dans ce dossier nieront à leur tour la fraude qui leur est reprochée. Le représentant du CTC, le dernier accusé à être appelé à la barre, jettera un pavé dans la mare en déclarant qu'il n'y a jamais eu de tricherie en s'appuyant sur des « explications scientifiques ». Pour les six accusés entendus hier, il n' y avait pas eu de triche dans l'acte de bâtir. Ils ont tous nié les accusations qui ont été portées contre eux.