Durant ces trois derniers mois, les opérateurs économiques du secteur privé des wilayas de Annaba, d'El Tarf et de Guelma ont exporté l'équivalent de 2 millions de dollars en divers produits. Hier inaccessibles aux Algériens, les marchés italien, français, belge, marocain, bulgare et brésilien ont été les plus forts demandeurs des produits algériens. Ces marchés se sont montrés très intéressés par la qualité de ces produits du secteur agroalimentaire, des produits de la mer, les déchets ferreux et non ferreux, le papier et le liège. Plusieurs opérateurs économiques algériens ont qualifié de très fructueux les contacts entrepris avec leurs homologues étrangers très intéressés par les produits algériens. Certains ont même parlé de négociations très avancées portant sur l'exportation d'importantes quantités de produits de la mer et agroalimentaires. Sur leur carnet de rendez vous et de possibilité de transaction, le exportateurs algériens ont mentionné plusieurs pays du Moyen-Orient, d'Asie et d'Europe centrale. « Nous ne sommes plus aux petits pas hésitants. Aujourd'hui, je peux dire que les opérateurs algériens sont devenus véritablement offensifs sur les marchés extérieurs où ils ont réussi à s'imposer. Il reste que certaines de nos institutions sont toujours figées et, il nous arrive parfois d'user de toutes les ficelles pour faire admettre notre point de vue pour exporter des produits sensibles tels que les poissons et ceux agricoles. L'autre problème réside au niveau de l'absence des moyens de conservation au niveau de nos ports et de nos aéroports », a argumenté Abdelmoumen B. un opérateur économique algérien qui s'est transformé en trader pour la commercialisation des produits algériens sur les marchés extérieurs. D'autres entreprises, à l'image de Fertial, Ferphos, Ferrovial, Anabib et Naftal ont réussi à se placer sur les marchés maghrébin, arabe et européen. Avec respectivement 11,4 millions et 4,8 millions de dollars, Fertial et Ferphos ouvrent la marche des exportations quoique devancées par la société indienne de statut privé avec 13,4 millions de dollars. Bon nombre de sociétés n'ont pas caché leur satisfaction face à ce qu'ils ont estimé être une évolution sensible de leurs activités commerciales à l'exportation. Particulièrement celles liées aux produits de la mer très prisés par le marché italien dont le poisson frais, marron, langouste, cigale, crevette royale, thon et tonnite. Les escargots, le liège et la ferraille dite toutvenant, sont d'autres exportations qui donnent matière à satisfaction aux opérateurs économiques de la région. « Bien que les gérants de la trentaine de PME/PMI algériennes intéressés par le marché extérieur s'inspirent dans leur démarche de leurs homologues italiens, tous réunis n'arrivent pas à atteindre les 4 millions de dollars de chiffre d'affaires/an. Ce qui n'est pas normal comparativement aux 3 300 000 PME/PMI italiennes qui, pour la plupart, engrangent annuellement et par unité une moyenne de 50 millions de dollars », a estimé Mohamed T., un homme d'affaires de Annaba. En fait, tout autant que pour les importations, l'activité à l'export est soumise au même règle du trafic d'influence et de la corruption. D'importantes sommes en devises, fruit de transactions dont les montants sont largement minorés, sont versées sur des comptes bancaires domiciliés dans des banques à l'étranger. « Il ne faut pas croire que les statistiques en votre possession sont réelles. Comme pour les opérations à l'importation, celles à l'export sont soumises à des règles hors la loi. Le non-respect de ces règles implique des difficultés et des tracasseries administratives à ne plus finir », a précisé notre interlocuteur. A vocation industrielle, notamment dans la production des pâtes, boissons gazeuses, papier et tomate industrielle, les 3 régions n'ont toujours pas atteint leur régime de croisière avec des opérateurs économiques n'arrivant pas à exporter leur excédent de production. Le dossier du concentré de tomates est à ce titre révélateur. Une vingtaine d'unités implantées entre Annaba, Guelma et El Tarf-Skikda est en mesure d'exporter jusqu'à 100 000 tonnes/an de CT sur une capacité théorique de 160 000. Depuis plus d'une décennie, elle n'a pu écouler un seul kilogramme sur le marché extérieur malgré leurs multiples tentatives de sensibiliser les pouvoirs publics sur la question. « Nous avons les capacités de placer notre produit sur le marché international. Nous avons tenté avec succès des expériences en présentant notre CT lors des foires internationales. Sa qualité a fait l'objet de nombreux éloges de nos partenaires étrangers qui ont souhaité en acquérir d'importantes quantités. Malheureusement, notre produit est excessivement cher par rapport à celui des autres pays. Et même s'il est de qualité meilleure, il est resté inabordable », a indiqué le président de l'Association des conserveurs de tomate (ACTOM). L'absence de soutien en amont et en aval de l'Etat à cette spéculation est à l'origine de ce lourd handicap. Il est aggravé par l'application d'une fiscalité à l'exportation très dissuasive et par l'absence de facilitations douanières. Toutes ces difficultés ont été dénoncées par le président d'Actom qui considère : « Comme cela se fait dans les autres pays à l'image des Européens et des Tunisiens, l'Etat doit trouver des mécanismes de soutien à l'exportation. Notre produit est très apprécié surtout sur le marché européen. Pour encourager les opérations d'exportation, il est nécessaire que le soutien sur Fond spécial de promotion des exportations (FSPE) soit au moins de l'ordre de 40%. » La question du FSPE est reprise par un autre opérateur économique spécialisé dans l'exportation de la ferraille tout- venant à Annaba. Il a affirmé : « Nous n'arriverons jamais à développer les exportations avec une fiscalité aussi dissuasive et des mesures de facilitations douanières appliquées avec parcimonie. Le FSPE créé par la loi de finances 1996 est destiné à apporter un soutien financier aux opérations et actions de promotion des exportations hors hydrocarbures. Il doit être accessible à tous. Par rapport à leurs homologues du Centre, les opérateurs économiques des autres régions du pays sont lésés. Il y a une discrimination qui se confirme chaque jour un peu plus. »