Les confessions sur les colonnes d'El Watan dans l'édition d'hier d'un spécialiste en génie sismique et expert désigné par la justice dans le cadre de l'enquête sur le séisme de Boumerdès donnent froid dans le dos. « Aucune leçon n'a été tirée du séisme de Boumerdès », a observé Chelghoum Abdelkrim estimant que la recherche de boucs émissaires « n'est pas productive » et ne nous prémunit pas contre de nouvelles catastrophes à l'image de celle vécue par la population de Boumerdès et de sa périphérie en 2003. On pensait qu'avec l'épisode tragique du séisme de Boumerdès l'Algérie est désormais parée pour une meilleure maîtrise du risque sismique. Tout au moins au plan réglementaire. On s'attendait à ce que les normes parasismiques soient rigoureusement intégrées dans les nouvelles constructions et que soient mis en place les outils adéquats pour le suivi des chantiers et le respect de la conformité des bâtisses aux nouvelles règles de l'urbanisme et de la construction. Les quelques mesures prises dans l'urgence, à la suite du séisme de Boumerdès pour mettre un peu d'ordre dans ce secteur livré à l'anarchie la plus totale en durcissant les conditions de délivrance du permis de construire et en mettant fin au laxisme dans la délivrance du certificat de conformité des bâtisses réceptionnées ne sont pas suffisantes selon cet expert pour faire face à la gravité de la situation. Son constat est sans appel : en dépit des centaines de victimes et des dégâts matériels occasionnés par le séisme de Boumerdès rien ou presque n'est fait pour que le secteur stratégique de l'habitat et de la construction ne fasse plus les frais de comportements et de politiques volontaristes imposés par l'urgence et le lourd passif accusé par ce secteur. L'appel pressant lancé pour associer les professionnels du secteur à l'élaboration d'un nouveau code parasismique et à la mise en place rapidement d'un conseil scientifique de la construction indique clairement que les experts et les scientifiques qui devraient constituer théoriquement la cheville ouvrière dans l'acte de bâtir furent et demeurent un corps marginalisé qui n'a aucune emprise sur les réalités du secteur. Tout reste à faire pour cet expert qui n'hésite pas à observer que l'on se trouve aujourd'hui dans le même état d'esprit qu'en 1980. La meilleure preuve de l'immobilisme dans lequel est empêtré le secteur reste ce conformisme spécifiquement algérien qui fait que l'on continue encore aujourd'hui de l'avis de cet expert à former à l'Epau et à l'Inforba sur la base de programmes datant des années 1970. Tout est dit. Faudrait-il alors s'étonner que des quartiers entiers comme ce fut le cas à Chlef en 1980 et à Boumerdès en 2003 s'affaissent comme des châteaux de cartes à la moindre secousse sérieuse ?